Ridley Scott accompagné de Charlize Theron, Michael Fassbender, et Noomi Rapace, présentait ce matin un montage de 15 minutes de Prometheus à Paris. Trente ans après Blade Runner, le retour de Sir Ridley à la SF s’annonce absolument spectaculaire. On le savait en voyant les bandes-annonces monstrueuses du film (en matière de trailer, ce qui s’était fait de mieux depuis Avatar). Mais deux plans de vaisseaux et un Michael Fassbender bluffant sont venus ce matin enfoncer le clou. Décryptage.Le montage présenté ce matin s’ouvre en Ecosse : deux scientifiques, Shaw (Noomi Rapace) et Holloway (Logan Marshall-Green) découvrent des mystérieuses fresques pariétales. Des mammouths, des animaux et puis : un homme, la main tendue vers des vaisseaux... “Une invitation”, s’exclame Elisabeth Shaw. Fondu enchaîné avec la galaxie étoilée. Le vaisseau Prometheus apparaît dans l’espace. Un texte se superpose à l’écran, décrivant le vaisseau comme dans le premier Alien. La filiation avec le film de 1979 devient inévitable lorsque l’androïd David (Michael Fassbender) aide l’équipage du vaisseau à sortir du sommeil artificiel. Charlize Theron, visiblement maître à bord, enchaîne quelques pompes en sous-vêtements (Ripley, es-tu là ?) avant de convoquer l’équipage en salle de briefing. L’hologramme de Peter Weyland (Guy Pearce, maquillé pour paraître centenaire) explique alors aux astronautes rassemblés que, s’ils voient ce message, c’est qu’ils sont arrivés à destination et qu’il est probablement mort. On comprend que leur voyage a duré plus de deux ans. Weyland leur présente ensuite la mission : l’équipe va devoir trouver une planète abritant une forme de vie extra-terrestre, suite aux recherches de Shaw et Holloway, qui ont découvert des indices sur Terre prouvant que l’humanité fut dans un lointain passé au contact d’êtres venus d’ailleurs. Ces indices mènent à la planète LV-233. Dans une séquence sidérante en terme de cinéma, le capitaine Janek (Idris Elba) fait atterrir le Prometheus sur la planète et s’ensuit un montage violent et épique des gros moments du film, comme dans les diverses bande-annonces qui inondent le Net. Verdict ? Impossible de se faire un avis définitif au vu de ce montage qui n’apporte finalement que peu de révélations majeures : ces 15 minutes spécialement montées par Scott fonctionnent comme un gigantesque trailer de 15 minutes, étendant des scènes déjà vues au gré du web. Ce qui frappe, c’est surtout la dimension que prennent ces séquences sur grand écran; et s’il fallait se rassurer, l’évidence du génie technique scottien est immédiate : les deux scènes de vaisseaux en 3D sont stupéfiantes et rivalisent avec ce qu’a fait James Cameron de mieux dans Avatar. La présentation du vaisseau et l’atterrissage écrasent même tout ce que Ridley a pu produire en terme d’imagerie SF (et oui, on pense aux visions futuristes de Blade Runner). Mais outre l'évidence du génie technique, Prometheus promet bel et bien d'être cette odyssée mêlant enquête métaphysique (le personnage de Noomi Rapace et le conflit entre sa foi et la science), prospective à grand spectacle et aventure humaine, se calant pile dans la filmo SF de Sir Ridley qui fut toujours tiraillée entre les sphères de l’existentiel et celles de l'aventure SF. Fidèle à Alien et Blade Runner certaines séquences aperçues ce matin rejouent ainsi l'opposition structurante chez Scott entre claustro et agoraphobie, organique (les vomissements de Shaw) et mécanique (la démarche de David, l'androïde). Grandeur de l’humainCar, si les passages techniques se passent de commentaire (la 3D semble - comme chez Cameron - parfaitement gérée, presque naturelle, ce que confirmera Scott en conf de presse), c’est surtout le passage où Michael Fassbender arpente le vaisseau qui est le plus marquant de ces 15 minutes. Précision du geste et du regard (un simple boîtement pour incarner l’arrêt du vaisseau, splendide), look robotique hallucinant, Fassbender impressionne et, tout en faisant preuve d’une économie de moyens hallucinante, confirme tout le bien qu’on pensait de lui dans Hunger, Shame et même X-Men : Le Commencement. Après Rutger Hauer dans Blade Runner, Ian Holm dans Alien et même Ripley, Fassbender rappelle juste que pour Scott, au-delà du grand spectacle, c’est surtout “l’humain” qui prime. Sens de l’épopée, génie technique au service d’une narration ambitieuse : Prometheus promet de rappeler aussi que depuis quelques années, Scott est devenu un cinéaste classique. Au sens noble du terme.Après la présentation, Ridley Scott est apparu sur scène entouré de son équipe pour répondre aux questions des journalistes. Best of d’une conférence de presse animée, avec un Sir Ridley goguenard :Le mythe de Prométhée Ridley Scott : "Dans la mythologie grecque, Prométhée est un demi-dieu qui défia les Dieux en leur volant le feu... C’est une métaphore qui nourrit le film : Prometheus parle de l’homme et de ce qui dépasse notre condition... Un rapport avec le Prométhée déchaîné de Shelley ? Non, aucun."Alien et PrometheusRidley Scott : "L’ADN du premier Alien intervient dans le final de Prometheus, dans les 8 dernières minutes du film. Le truc, au fond, c’est que je suis un compétiteur. J’ai vu les autres films de la série. Est-ce que je les ai aimé ? Hmmm... OK, ils sont corrects. mais je voulais aller au-delà... Quand je regarde les 3 films suivants, je me rends compte que personne, PERSONNE, ne s’est posé la seule question vraiment intéressante : qui est ce gros mec dans le fauteuil ? Celui qu’on appelle le “space jockey” ? Qu’est-ce qu’il fait là ? Pourquoi ce vaisseau cargo s’est posé là ? Parce que si vous regardez bien, ce vaisseau en forme de croissant s’est posé ! Il ne s’est pas écrasé, il s’est posé ! J’avais envie de répondre à ces questions, au début. Du coup, il y a trois ans, j’ai été voir la Fox et je leur ai dit qu’il fallait réfléchir à la franchise, reprendre cette histoire pour l’emmener ailleurs... J’ai travaillé de manière très organique avec les scénaristes. On s’asseyait pendant des jours et on cherchait des réponses. Sans barrières ! On est parti d’Alien, mais on a été ailleurs et l’histoire s’est finalement ajusté dans quelque chose de différent, très loin du 8ème passager. Qui d’ailleurs n’aurait pas eu le même impact sans le mec dans sa tenue en latex qui jouait l’Alien."Quel rapport à la science-fiction ?Ridley Scott : "Ne vous trompez pas : c’est un job ! Quand j’étais plus jeune, je faisais beaucoup de tennis et j’ai eu un problème de hanche... mais pour moi, un réalisateur, c’est comme un tennisman : ça se prépare, un peu comme Federer. Je suis un athlète. Je ne peux pas courir le 100 mètres parce que je bois trop, mais au fond, j’envisage ma carrière de cinéaste de cette manière-là : je dois lancer la balle plus haut et plus fort que mon adversaire. Après, je me fous de savoir si je travaille sur un film de science-fiction, un mélo, un film d’époque... je fais des films. Et je suis content des films que j’ai fait". Le premier film en 3DRidley Scott : "Si on a la chance d’être une personne sensible aux arts visuels, ce n’est pas un problème. C’est presque naturel de travailler avec la 3D. C’est un atout immense pour un film : ça vous immerge dans l’univers du film... Dans notre quotidien, on oublie que nous voyons en 3D; et ces lunettes, ce procédé rappelle juste au cerveau comment on voit vraiment".Le casting Michael Fassbender : “Je joue l’androïd peut-être parce que je suis très robotique” Ridley Scott : “Le choix de Michael s’est imposé immédiatement : c’est l’un des 3 ou 4 meilleurs acteurs masculins de son époque. C’est un maître, mais aussi un véritable artiste". Michael Fassbender : “On s’est rencontré en 2008. Il avait vu Hunger - parce qu’une des choses à rappeler c’est que Ridley est un passionné de cinéma, il voit tout. Il m’a fait cette proposition, je suis rentré et... j’ai bossé comme un fou. Au début, je ne savais pas à quoi m’attendre. On travaillait dur, dans une très bonne ambiance... Ce qui est vraiment impressionnant chez Ridley, c’est qu’il commande une armée de 300 personnes. Il y a 300 types sur le tournage, des maquilleurs, les gens des décors, des effets spéciaux... Et Ridley est enthousiaste, précis, imaginatif avec chacun de ces gens”.Charlize Theron : “Si je parle du film, je serai obligée de vous tuer... Sérieusement, j’incarne Meredith Vickers, un personnage qui travaille pour la compagnie finançant cette expédition. On découvre rapidement que j’ai déjà bossé avec certains membres de l’équipage et que je connais David, le personnage joué par Michael (Fassbender). Mon personnage est au début très froid, très distant, mais il développe un rapport très spécial avec ce voyage, comme on le découvre à la fin du film”.Noomi Rapace : “Mon personnage, Elisabeth Shaw, est une scientifique, une anthropologue qui croit en Dieu. C’est une rêveuse, une passionnée, et c’est elle qui réussit à convaincre les gens de partir pour cette expédition. Du coup, pour elle, l’expédition revêt un caractère très personnel. Elisabeth est naïve et entretient un rapport presque enfantin à cette odyssée... Elle est persuadée qu’elle va trouver toutes les réponses aux questions qu’elle se pose sur le sens de la vie. Mais quand les problèmes surgissent, elle se métamorphose, se transforme en survivante et c’est un bouleversement pour elle". "Il y a une scène qui fut très éprouvante pour moi dans laquelle je suis nue et je cours... En la tournant, je me suis rendu compte à quel point Ridley vit et respire avec ses personnages... On venait de tourner quelques prises, j’étais épuisée. Il est venu me voir et m’a demandé si j’étais prête pour une nouvelle prise. J’ai dit oui, il m’a regardé et m’a dit : “Go ! Go ! Go”. Il était avec moi : il réclame le meilleur de nous, mais il nous soutient et nous ne sommes jamais seuls...” Inspiration Michael Fassbender : “Je n’ai pas voulu revoir les Aliens. Ca ne m’intéressais pas. Par contre, j’ai regardé Blade Runner. Les Réplicants sont passionnants ! Sinon, quand on a commencé à travailler sur le personnage de David, Ridley m’a conseillé de voir Lawrence d’Arabie, The Servant avec Dirk Bogarde et L’Homme qui venait d’ailleurs avec David Bowie. Et puis je me suis raccroché à des images qui me sont apparues en lisant le script... mais je ne voulais pas être influencé par ce qu’avaient fait les acteurs qui jouaient les androïdes dans la saga, comme Lance Henrikksen et Winona Ryder, dans la tétralogie."Les femmes warrior Ridley Scott : “Dans tous mes films il y a des femmes fortes. Ca vient sans doute de ma mère. Elle mesurait 1,50 mètre mais elle avait l’habitude de nous foutre des raclées, à moi et à Tony. Donc, oui, je suis habitué aux femmes balèzes et c’est sans doute pour ça que j’en mets dans mes films.”Par Gaël Golhen et Sylvestre Picard.Bande-annonce de Prometheus 3D, qui sortira le 30 mai prochain :
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