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Lors de la conférence de presse de Nymphomaniac à Berlin, Shia Labeouf, mal sapé et mal rasé, coiffé d’une casquette sale, a répondu à la question d’un journaliste par une citation (forcément vénère) d’Eric Cantonna et s’en est allé. Le soir, il foulait le tapis rouge avec un sac en papier sur la tête où était écrit « I’m not famous anymore ». Puis on le retrouvait quelques jours plus tard dans une galerie de Los Angeles où, toujours avec son sac sur la tête, il offrait une performance silencieuse intitulée #IAMSORRY. Shia LaBeouf a-t-il totalement pété les plombs ? #IAMSORRY: le « coup » de Joaquin PhoenixSa performance artistique pourrait donner rétrospectivement un nouveau sens à son burn out. Ce serait la « voie Joaquin Phoenix ».L’acteur chéri des productions Spielberg veut s’affranchir de son mentor. A l’affiche du très sulfureux Nymphomaniac de Lars Von Trier, Shia LaBeouf a depuis longtemps entamé son processus d’émancipation. En 2012, il passe derrière la caméra pour un court métrage intitulé HowardCantour.com. Mais en décembre dernier, l’auteur de romans graphiques Daniel Clowes découvre que le film s’inspire directement d’un de ses albums, Justin M. Damiano, et accuse l’acteur de plagiat. Là commence une campagne d’excuses surréaliste de Shia sur Twitter, postant frénétiquement des messages allant de la dénégation à l’aveu, en passant par une salve d’excuses toutes plus étranges les unes que les autres (« J’ai eu tort, terriblement tort. Et je dois expliquer pourquoi aux générations futures »). Sans oublier, dans toute la splendeur de la démesure, des excuses présentées dans le ciel de Los Angeles le jour de l’an :Comble de l’ironie, il s’avère que ces différents actes de contrition sur les réseaux sociaux étaient des phrases piquées à d’autres (Tiger Woods, Kanye West ou même Robert McNamara). Coup de génie ou folie pure ? Shia LaBeouf s’excuse publiquement et compulsivement d’être coupable de plagiat… en plagiant encore. Deux mois plus tard, et après son coup d’éclat à la Berlinale, on retrouve donc la star des Transformers dans une petite galerie de L.A. où il exécute une performance silencieuse, avec son sac en papier sur la tête, intitulée #IAMSORRY. Ah. C’était donc ça ? On pense forcément à Joaquin Phoenix, qui avait brutalement annoncé la fin de sa carrière puis avait multiplié les apparitions embarrassantes avant de revenir avec son mockumentaire I’m Still Here, but de la manœuvre. Depuis, il a redoublé de talent dans des performances inouïes, enchaînant The Master de Paul Thomas Anderson, The Immigrant de James Gray et bientôt Her de Spike Jonze. Et rejoint le cercle des grands comédiens respectés. Le maître de Shia ?I’m not famous : la transgression de James FrancoS’il n’a pas la trempe de Phoenix, LaBeouf pourra-t-il s’accrocher à un autre modèle ? Entre son court-métrage arty, son obsession pour l’art ready made et une perf dans la dernière provoc de Lars Von Trier, l’acteur de 27 ans, devenue star hollywoodienne très jeune, pourrait vouloir virer Auteur. Le mainstream permet tout et surtout sa transgression. C’est grâce à son personnage de Sam Witwicky dans Transformers qu’il avait acquis la célébrité et était devenu cet animal singulier dans le panorama contemporain. Son charme de joli cœur et le grand écart qu’il tente d’opérer entre blockbusters et films indés font de LaBeouf un nouveau James Franco (mélange freaks entre Tom Cruise et River Phoenix). Et quand on sait qu’il rêve d'adapter Bukowski, poète dont Franco est justement en train de porter la vie à l’écran, on l’imagine volontiers marcher dans ses pas. Franco, justement lui, publiait mercredi soir une tribune dans le New York Times pour prendre la défense de LaBeouf ou du moins tenter d’expliquer son comportement, en esquissant le parallèle avec la longue farce de Joaquin Phoenix : « Je pense que le projet de M. LaBeouf, s’il en a un, en vaut la peine ». Mais de s’inquiéter malgré tout pour l’avenir de son collègue : « J’espère juste qu’il ne va pas sacrifier le respect qu’il a gagné en tant qu’acteur juste pour prouver qu’il est un artiste »I fucked up : le crash de Lindsay LohanLa crainte de James Franco semble absolument justifiée. Mais on pourrait même lui prédire pire : en plus de ces pétages de plombs privés, Shia LaBeouf a déjà largement terni son image professionnelle et risque de se mettre Hollywood à dos. Après s’être vanté publiquement d’avoir pris de la drogue pour mieux cerner son personnage de Charlie Countryman et d’avoir envoyé des photos de son pénis à l’équipe du film de Lars Von Trier pour obtenir le rôle dans Nymphomaniac, il s’est attiré les foudres de ses coéquipiers sur le tournage de Fury, notamment de Brad Pitt. Voulant prouver son dévouement total au film de guerre de David Ayer, LaBeouf aurait arrêté de se laver pendant des semaines pour mieux comprendre ce que son personnage avait vécu dans les tranchées, et se serait même auto-arraché une dent. Méthode ou décadence ?  Entre cures de désintox, revers professionnels et ennuis judiciaires chroniques, Lindsay Lohan est devenue l’archétype du fiasco des Disney Kid. L’héroïne de La Coccinelle et du Disney Club a multiplié les frasques et les provocs au point de faire oublier son (vrai) talent et de s’aliéner la profession, même si elle tente un (dernier ?) come-back ce mois-ci avec The Canyons, dont le tournage a d’ailleurs été tellement épique qu’il est finalement plus intéressant que le film. On l’a oublié, mais c’est aussi chez Mickey qu’avait commencé Shia, dans la série La Guerre des Stevens sur Disney Channel. Depuis, il y a eu la drogue, les bagarres dans les bars, les gardes à vues, les débordements publics et les comportements professionnels bordeline. De quoi finir personnage récurrent des rubriques gossip de la presse people plutôt que héros de critiques cinéma. Comme Lindsay Lohan.Vanina Arrighi de Casanova et Gaël Golhen