Close de Lukas Dhont
Menuet-Diaphana Films-Topkapi Films-Versus Production

Rencontre avec le cinéaste belge dont Close, récit d’une amitié de deux gamins de 13 ans, brisée par une tragédie, fait partie des concurrents sérieux à un prix ce soir à Cannes.

Comment rebondit- on après la Caméra d’Or reçu par Girl et le succès international qui en a découlé ? Est- ce facile de trouver le sujet d’un deuxième long ?

Lukas Dhont : Je ne vais pas vous mentir, on se sent attendu au tournant. Girl a été pour moi le film de toutes les premières. Mon premier film. Ma première visite à Cannes. Mes premiers prix. Mes premières critiques. Donc avant de repartir sur un nouveau projet, j’ai dû faire le deuil de Girl et de ces années où il avait été en moi.  Et je suis longtemps resté sans inspiration. Je me suis même un jour retrouvé à taper dans Google « Comment un réalisateur parvient à faire un deuxième film ? » Car en dépit des propositions que je recevais, le déclic n’arrivait pas. J’avais une idée précise de ce que je voulais : faire comme Girl un film inspiré de ce que j’ai pu vivre plus jeune pour m’adresser aux jeunes gens d’aujourd’hui, rester fidèle donc à ce que je suis mais sans bégayer. Mais rien n’y faisait. Je n’y arrivais pas.

Comment le déclic est arrivé ?

Un jour, j’ai eu envie de retourner à mon école primaire dans un village près de Gand, où je ne m’étais pas rendu depuis mon enfance. Comme un besoin irrépressible de me reconnecter à ce pan- là de mon existence. Et en entrant dans cette école, tous mes souvenirs de cette période où je me cherchais ont ressurgi. J’y ai trouvé les thèmes qui allaient me conduire à Close et soudain j’étais de nouveau capable de noircir des pages et des pages

De quoi avez- vous eu envie de parler ?

D’abord de ces amitiés qui se déploient dans ce moment si particulier de nos vies, entre l’enfance et l’adolescence. Une amitié entre deux garçonsn très physique, très expressive qui, je trouve, est rarement montrée au cinéma, en tout cas moins que le même type d’amitié entre deux filles au même âge. J’ai voulu m’y employer pour que de telles images finissent un jour par devenir banales, afin que les jeunes d’aujourd’hui et de demain ne vivent plus ce que j’ai dû vivre : cette douleur de voir des amitiés très fortes être brisées par la violence de certains regards extérieurs, par certaines réflexions. Et puis, à travers la tragédie qui va soudainement séparer à jamais les deux amis de Close, je voulais aussi traiter du sujet de la culpabilité et de son corollaire, la responsabilité. De ce moment où comme enfant tu prends soudain conscience que tes actions peuvent avoir des conséquences qui les dépassent et te dépassent. Et du coup te perturbent et te font mal. Close est la synthèse de tout cela. Le récit de la fin de l’innocence.

APRES GIRL, LUKAS DHONT BOULEVERSE ENCORE LA CROISETTE AVEC CLOSE [CRITIQUE]