Affiche sorties de films mercredi 27 avril 2022
Universal/ Bac Films/ Warner

Ce qu’il faut voir en salles

L’ÉVÉNEMENT
DOWNTON ABBEY II : UNE NOUVELLE ERE ★★☆☆☆

De Simon Curtis

L’essentiel

Sept ans après son ultime épisode, la série de Julian Fellowes continue sa vie sur grand écran. Un nouvel opus non dépourvu d'un charme suranné mais dispensable

Sept ans après sa sixième et dernière saison de Downton Abbey, on retrouve la plus célèbre des familles aristocrates british et ses domestiques en 1928 pour une double intrigue. D’un côté, le tournage d’un film hollywoodien muet au cœur du château. De l’autre, un voyage vers le sud de la France pour en savoir plus sur l’homme qui a donné en héritage à Lady Violet (la toujours magistrale Maggie Smith) une somptueuse villa en bord de Méditerranée. On ne boude pas son plaisir à retrouver les personnages qu’on a tant aimés et les acteurs qui les incarne comme les nouveaux venus frenchies (Jonathan Zaccaï et Nathalie Baye qui campe le fils et la femme du mystérieux donateur). Mais il y a vraiment quelque chose de trop plan plan tant dans la conduite du récit que dans la réalisation pour être emporté. Cette suite a tout d’un épisode à la fois trop étiré et manquant de temps pour développer en profondeur les différentes sous- intrigues qui le composent. Rien ici n’est désagréable mais tout est trop survolé pour que ce Downton Abbey II- Une nouvelle ère apparaisse indispensable.

Thierry Cheze

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PREMIERE A ADORE
BABYSITTER ★★★★☆

De Monia Chokri

Une bande de mecs braillent, engloutissent des litres de bière, draguent les deux femmes assises devant eux, avant que les ring girls en minishorts ne viennent donner le coup d’envoi du match de MMA auquel ils assistent.. La caméra s’attarde sur les fesses des filles, leurs seins, puis les combattants se mettent à se taper dessus…. Le deuxième long-métrage de Monia Chokri impose d’entrée de jeu un tempo de cartoon survolté avant de se révéler un ovni sans véritable équivalent.

Après le match, Cédric (le très rigolo Patrick Hivon), ivre mort, embrasse une journaliste sportive, en plein direct, devant la caméra en hurlant « Je t’aime, Chantal ». Et découvrira le lendemain à son réveil que la vidéo de son baiser volé est devenue virale. Aussitôt licencié par son employeur, il va se mettre à réfléchir aux fondements de sa misogynie grâce au coaching de son frère, intello bienpensant aux manières doucereuses qui va le convaincre d’écrire une lettre d’excuses à ladite Chantal, puis carrément un livre. Et pendant que les deux hommes se gargarisent de leur nouvel engagement politique, la femme de Cédric (Mona Chokri) qui vient d’accoucher, se morfond dans une dépression post-partum. Avant que débarque Amy (Nadia Tereszkiewicz), babysitter espiègle qui va pousser ses employeurs à questionner leurs tabous, et ainsi révéler leur vraie nature.

Adaptant ici une pièce de Catherine Léger, Monia Chokri signe un état des lieux rigolard des nouveaux rapports hommes-femmes mais en faisant d’abord du cinéma, parsemant son film de stridences burlesques à la Coen, trempant son petit cirque domestique dans une imagerie horrifique et parano venue tout droit des sommets de la frousse seventies. Monia Chokri se sert de ces modèles pour observer le grand bordel des mœurs contemporaines, un immense sourire aux lèvres. Et impose un ton vraiment unique.

Frédéric Foubert

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PREMIÈRE A AIME

LA RUSE ★★★☆☆

De John Madden

Après six ans d’absence, John Madden signe son retour en revenant sur l’opération Mincemeat en partie imaginée par le futur créateur de 007, Ian Fleming - pour le contre- espionnage britannique – dans le but de faire croire en 1943 aux Nazis que les Alliés allaient envahir les Balkans et non la Sicile comme programmé. En s’appuyant sur le livre de Ben Macintyre, le réalisateur de Shakespeare in love raconte les coulisses de ce coup de poker insensé et risqué (qui avait déjà inspiré L’homme qui n’avait jamais existé à Ronald Neame) avec moult détails savoureux pour le rendre palpitant. Le résultat est classique certes - Madden oblige – mais porté par une interprétation emballante, à commencer par le duo Colin Firth- Kelly Macdonald dont les personnages vivent une histoire d’amour aussi passionnelle que longtemps tue. Ils apportent ce supplément de malice qui donnent un charme fou au film.

Thierry Cheze

MA FAMILLE AFGHANE ★★★☆☆

De Michaela Pavlátová

Le sujet est aussi essentiel que complexe à embrasser. Comment parler de la condition de la femme en Afghanistan sans enfoncer des portes ouvertes ou verser dans le pur registre émotionnel ? Michaela Pavlátová fait un sort à tous ces obstacles, avec un film à l’animation élégante et au scénario d’une richesse d’autant plus frappante que tout tient en seulement 80 minutes. L’adaptation d’un livre de Petra Procházková qui y racontait sa propre expérience. L’action débute en 2001. Nara, une jeune Tchèque décide par amour de tout quitter pour suivre celui qui deviendra son mari et s’installer à Kaboul. Un changement de vie radical qui la met aux premières loges de l’enfer angoissant, constituant le quotidien de ce pays. Sauf que comme l’indique son titre, ce film ne se construit pas sur son seul point de vue mais sur ceux de l’ensemble des membres de cette famille, dans laquelle elle va peu à peu trouver sa place. Des personnages écrits tout en nuances, contradictions voire ambiguïtés, loin de tout manichéisme. Michaela Pavlátová épouse au plus près les situations vécues par ceux- ci, n’hésitant pas ainsi à glisser des moments de légèreté dans cette ambiance oppressante. Tendu jusqu’à sa dernière image, Ma famille afghane parle à tous les publics sans jamais que cette pédagogie ne vienne rien simplifier ou abimer.

Thierry Cheze

LA COLLINE OU RUGISSENT LES LIONNES ★★★☆☆

De Luàna Bajrami

Luàna Bajrami passe derrière la caméra à 20 ans avec une envie et un enthousiasme qui emportent tout sur son passage. Pour cette première, l’héroïne de Portrait de la jeune fille en feu a choisi un retour à ses racines au Kosovo et de célébrer la sororité comme moyen de faire voler en éclats ce patriarcat à tous les étages qui obscurcit l’horizon de ses héroïnes refusant de se faire voler leur avenir. Trois adolescentes en rébellion qui vont s’improviser braqueuses, certaines que dans ce monde d’hommes, personne ne pourra les soupçonner de tels méfaits. La délinquance comme seul moyen d’évasion, tel est le paradoxe de ces actions que Luàna Bajrami filme en immersion, au fil des paradoxes qui constitue ce trio aussi puéril que mature. Ce parti pris conduit à des trous d’air, à faire soudain disparaître brutalement des personnages, à une fin trop abrupte… Mais ces imperfections font aussi tout le charme d’un film qui, comme ce gang pas comme les autres, refuse de rentrer dans un cadre. Incarné par une bande de comédiennes stupéfiante de naturel, La Colline où rugissent les lionnes vous déstabilise autant qu’il vous emporte.

Thierry Cheze

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HIT THE ROAD ★★★☆☆

De Panah Panahi

Un père à la jambe plâtrée, une mère dont les fous rires masquent mal une tristesse qu’on sent profonde, leur jeune fils volubile jusqu’à l’épuisement et son grand frère taiseux. Cette famille tout en contrastes est au cœur du premier long du fils du réalisateur de Taxi Téhéran. Où vont- ils ? Que fuient- ils ? Le plaisir pris à la découverte de ce road- movie iranien tient précisément dans ce mystère qui l’entoure et la manière dont Panahi va dévoiler avec parcimonie les pièces du puzzle par le prisme d’une mise en scène maîtrisée privilégiant précisément le hors- champ pour traduire les non- dits. Alors, certes, une fois le motif de ce voyage connu, Hit the road perdra de ce mystère qui faisait son charme et les dialogues explicatifs auront tendance à prendre un peu trop le pouvoir. Mais sans abimer l’espièglerie fantasque et l’humanité poétique de ce voyage vers l’inconnu.

Thierry Cheze

SENTINELLE SUD ★★★☆☆

De Mathieu Gérault

C’était l’une des belles surprises du dernier Festival de Saint-Jean-de-Luz. Ses deux interprètes principaux – Niels Schneider et Sofian Khammes – étaient d’ailleurs repartis avec les lauriers dédiés.  Voilà un film de guerre sans la guerre. On suit un soldat français fraîchement revenu du front qui peine à retrouver des repères dans une vie civile qui a tout du champ de bataille (lieu décimé, périphérie glacée, trafic...) Il retrouve des frères d’arme mêlés à une sale histoire d’opium qui pourrait bien trouver ses racines au sein de l’armée de française. Avec ce premier long-métrage, Mathieu Gérault joue l’abolition des frontières aussi bien territoriales que mentales et projette un monde en friche d’une implacable noirceur. Outre son duo principal, la présence d’India Hair et de Denis Lavant ajoute un supplément d’âme à ce thriller intense.

Thomas Baurez

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LA FEMME DU FOSSOYEUR ★★★☆☆

De Khadar Ayderus Ahmed

Né à Mogadiscio, Khadar Ahmed a quitté la Somalie ado pour se réfugier en Finlande avec ses parents. Mais c’est à son pays natal, ses us, ses coutumes et ses souffrances qu’il consacre son premier long. Une histoire d’amour et de maladie. Celle d’un couple, Guled et Nasra et de leur fils embarqué dans une course contre la montre pour trouver l’argent nécessaire à l’opération indispensable à Nasra, atteinte d’une grave maladie rénale. Ahmed fait vivre ce suspense dans la tête de ce fossoyeur, certes cerné par la mort mais croyant toujours à la lumière au bout du chemin, même dans un périple de la dernière chance qu’on sent perdu d’avance vers le village de sa famille avec qui il a coupé les ponts depuis son mariage. Et grâce à une mise en scène sans fioriture, il trouve le ton juste pour ne jamais verser dans le mélo sirupeux sans pour autant couper le robinet à émotions.      

Thierry Cheze

GHOST SONG ★★★☆☆

De Nicolas Peduzzi

Une ville comme une prison à ciel ouvert, dont il semble impossible de s’échapper. Cette ville, c’est Houston, plongée dans une ambiance apocalyptique en attendant un ouragan et elle fascine le français Nicolas Peduzzi qui lui avait déjà consacré son premier film, Southern belle. Son ambition, bien plus que de la raconter, est de nous la faire ressentir. En s’appuyant sur deux repères – la rappeuse OMB Bloodbath et un fils de bonne famille bouffé par ses addictions -, Peduzzi explose tout fil narratif classique pour proposer un cocktail détonnant où les fusillades en pleine rue côtoient les confessions intimes de ses personnages et de longues séquences où la musique (du rap au blues) occupe tout l’espace. Âpreté et onirisme ne font qu’un dans ce voyage où on ne sait jamais vraiment ce qui est vrai et ce qui est joué. Un trip envoûtant pour peu qu’on accepte de jouer son jeu en s’y abandonnant.

Thierry Cheze

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PREMIÈRE A MOYENNEMENT AIME

L’AFFAIRE COLLINI ★★☆☆☆

De Marco Kreuzpaintner

A Berlin, en 2001, Fabrizio Collini, un septuagénaire italien, abat de quatre balles dans la tête Hans Meyer, un industriel de la haute société allemande. Il décide dès lors de se murer dans le silence. Commis d’office, un jeune avocat novice – promis à l’échec sur le papier – va devoir remonter le fil de cette histoire qui, au final, fait surgir des profondeurs où il a été volontairement enfoui un secret lié à l’amnistie des criminels nazis, organisée trente ans plus tôt par les hautes autorités de l’Etat. On prend donc une leçon d’histoire, pas forcément connue de ce côté- ci du Rhin. Mais Marco Kreuzpaintner ne se montre jamais à la hauteur de son sujet captivant car il est à la fois trop lisse dans sa mise en images et use et abuse d’effets (musique omniprésente en tête) alourdissant un récit qui aurait mérité à l’inverse une sobriété exemplaire.

Thierry Cheze

 

PREMIÈRE N’A PAS AIME

ANNEES 20 ★☆☆☆☆

De Elisabeth Vogler

Une qualité domine ce deuxième long signé Elisabeth Vogler après Paris est à nous (sorti sur Netflix) : l’enthousiasme. La volonté de revivre après tout ce temps passé enfermé. Années 20 a en effet été tourné après le premier confinement, le temps d’un unique plan séquence d’1h30 dans les rues de Paris. La caméra passe de personnage en personnage, de rue en rue avec l’ambition de capter l’essence et les questionnements de la jeune génération d’aujourd’hui. Seul hic mais d’importance, la performance technique prend le pas sur le reste et donne l’impression d’une course à la virtuosité qui ne permet jamais de se poser et de creuser en profondeur les personnages et leurs ressentis. Au contraire des déambulations nocturnes du récent Ma nuit d’Antoinette Boulat, autre portrait générationnel qui avait su allier, lui, fond et forme dans un même geste cinématographique.

Thierry Cheze

 

Et aussi

Envol de Frédéric Cerulli

Kaathu Vaakula Rendu Kaadhal de Vignesh Shivan

Le Médecin imaginaire de Ahmed Hamidi

Pas… de quartier de Paul Vecchiali

Le Pied nickelé de Jean- Loup Martin

Volodarka de Nathalie Vannereau

 

Reprises

La Vie criminelle d’Archibald De La Cruz de Luis Buñuel