"Il y a pas mal de Paddington dans Wonka !", nous confie le réalisateur, Paul King. Entretien avec un amoureux de Roald Dahl.
Après avoir signé les délicieux et non moins acclamés films Paddington, le réalisateur britannique Paul King adapte un autre classique de la littérature anglaise. Amoureux de Roald Dahl, le cinéaste nous explique pourquoi son Wonka prend des distances avec la version de Tim Burton (2005) et pourquoi Timothée Chalamet était l'acteur idéal pour succéder à Gene Wilder.
Vous avez renoncé à réaliser Paddington 3 pour faire Wonka. Pas de regret ?
Paul King : Non (rires) ! J'ai passé 8 ans sur Paddington. J'ai mangé beaucoup de marmelade à l'orange et j'avais envie de goûter à autre chose
Qu'est-ce qu'il y a de Paddington dans Wonka ?
À première vue, il n'y a pas grand chose en commun entre les deux personnages. L'univers de Roald Dahl est clairement différent de celui de Michael Bond. Et en plus, j'avais envie de prendre mes distances avec Paddington en faisant ce film. Mais je crois que j'ai échoué au bout du compte (rires). Il y a cette espièglerie, cette envie de légèreté... Il y a certainement pas mal de Paddington dans Wonka !
Qu'est-ce qui rend le personnage de Willy Wonka si fascinant ?
C'est un personnage très ambigu. Dans les livres, il est parfois sombre, mystérieux et on n'est pas toujours certain de ce qu'il pense au fond. Roald Dahl joue beaucoup avec ça. Durant la visite de la chocolaterie, certains des invités le trouvent complètement fou, d'autres le voient comme le mal incarné et ça la fin qu'on se rend compte qu'il est indubitablement fantastique. Mais on découvre aussi qu'il est un étrange, reclus, à l'écart du monde. J'avais envie de raconter d'où pouvait venir cette excentricité, son cynisme et sa vision de l'humanité aussi. Parce que c'est un homme qui veut toujours voir le meilleur chez les autres, mais qui a aussi été blessé, qui est abîmé. C'est ce conflit intérieur que j'ai souhaité explorer.
Wonka est donc un préquel de la version 1971 de Charlie et la Chocolaterie, réalisé par Mel Stuart...
Oui, c'est le point de départ du projet. Parce que je suis né à la fin des années 1970 et donc dès que j'ai lu le livre, j'ai vu le film de Mel Stuart. C'est la base de Wonka. Je ne sais pas si c'est exactement un préquel à 100%, mais ce film a l'ambition d'accompagner celui de 1971, avec cette idée de ne rien abîmer, de le garder intact pour qu'on puisse toujours voir l'oeuvre de Mel Stuart sans se dire que ceci ou cela ne fonctionne plus. Je ne voulais pas avoir à réinventer tout ce qu'il avait si bien fait, comme ce décor européen du côté de l'Allemagne, les différentes langues, ce melting-pot de personnages. Un monde vraiment fun que j'ai tenu à conserver en l'état, cette idée d'une société post-guerre très propre sur elle, très conservatrice, dans laquelle Willy Wonka va débarquer, injectant une dose massive de couleurs et une certaine anarchie. Il est la métaphore des sixties qui bouleverse ce monde.
Rien à voir avec le film de Tim Burton du coup ?
Non, si ce n'est que c'est le même personnage. Vous pouvez oublier toute la partie flashback avec Christopher Lee, et cette histoire du père dentiste de Willy (qui expliquait la naissance de son obsession pour les sucreries, NDLR). Cette vision faisait de Willy Wonka un personnage bien plus cynique que celui que je connaissais enfant des livres de Roald Dahl. C'était un choix artistique pour justifier le remake, mais nous, on n'est pas sur cette ligne. La performance de Gene Wilder, à mon sens, était plus proche du Willy original que celle de Johnny Depp. Il ne faut pas que le personnage soit trop glauque ou sinistre, parce qu'il faut qu'on ait envie d'être meilleur ami avec Willy. Même s'il est bizarre, qu'il joue avec nos émotions, il faut que reste ce sentiment d'adoration du personnage.
Cela commence aussi par la photographie, qui est beaucoup moins sombre et beaucoup plus joyeuse dans Wonka, non ?
L'esthétique du film de Tim Burton était délicieuse, mais la nôtre est forcément un peu différente, parce que l'histoire parle de Willy Wonka. Il fallait que ce monde soit un peu plus réaliste pour que Willy soit la figure lunaire qui sorte du cadre. On a voulu un univers coloré et poétique, fidèle à Roald Dahl.
En quoi Timothée Chalamet est le parfait successeur de Gene Wilder ?
Très peu d'acteurs auraient pu jouer ce rôle aujourd'hui. Si vous me demandez, il y a Timothée, et puis c'est tout. C'est une partition très exigeante, qui demande un travail énorme. Willy est dans toutes les scènes. Il danse, il chante... Donc il y avait un gros boulot de répétitions en amont. Heureusement, Timothée est un acteur précis, qui veut toujours savoir pourquoi et comment. Donc il a agi comme un partenaire avec moi pour penser le film et la mise en scène.
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