Comment Damien Chazelle a lutté pour aller au bout de son projet.
Mise à jour du 27 février : La La Land remporte 6 Oscars lors de la 89e cérémonie. Mais voit l'Oscar du meilleur film lui échapper au profit de Moonlight
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« Bof, c’est pas une bonne idée ». C’est ainsi, au mieux, que la plupart des décideurs à Hollywood ont, pendant des années, accueilli le projet de Damien Chazelle de faire La La Land, le chef d’œuvre qui va tout emporter (le public, les prix) sur son passage.
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Ce qui semble être aujourd’hui une évidence ne l’a jamais été. La première fois que Chazelle pitche son idée de comédie musicale, il a 25 ans. Il vient à peine de réaliser son premier film, Guy and Madeline on a Park Bench, genre de brouillon de La La Land, comédie romantique et musicale hommage au jazz et au vieil Hollywood, sur une musique, déjà, de Justin Hurwitz. Le tout jeune cinéaste espérait utiliser ce premier essai pour convaincre un studio de financer le deuxième, tout comme il a plus tard monté Whiplash en tournant d’abord une version court métrage – en l’occurrence, ça a marché. Mais dans le cas de La La Land, aucune porte ne s’ouvre. Il faut dire que l’idée d’une comédie musicale originale réalisée et mise en musique par deux inconnus n’avait pas de quoi rassurer les executives des studios frileux de nature.
Damien Chazelle avant La La Land
Damien Chazelle est donc parti faire Whiplash, un projet plus simple et moins coûteux à monter. Et il a bien fait : révélation de Sundance, buzz de Cannes, succès public et critique, trois Oscars (et une nomination à celui du meilleur film), le film lui colle un label « jeune cinéaste surdoué à suivre ». De quoi convaincre des investisseurs ? « Le projet restait compliqué à vendre, et seul un studio, Lionsgate, était prêt à nous accorder le budget dont nous avions besoin et faire ce pari » confie le réalisateur à Vulture. Un mal pour un bien, au fond, car le temps qu’il lui a fallu pour réaliser son dream project lui a permis de mûrir suffisamment pour être à la hauteur de ses ambitions, et a laissé le temps à Miles Teller et Emma Watson, qui devaient originellement incarner Sebastian et Mia, d’abandonner le projet et de faire de la place à Ryan Gosling et Emma Stone (on n’a rien contre Teller et Watson mais avec eux, franchement, ça n’aurait pas été le même film).
Comme ses deux héros qui vont jusqu’au bout de leurs rêves, Chazelle a bien fait de persévérer. Depuis le mois de septembre et sa présentation à Venise, le monde du cinéma ne parle plus que de La La Land. Aux Golden Globes, le film a gagné 7 prix (sur 7 nominations), et vient d’égaler le record de nominations aux Oscars détenu par Eve et Titanic. Il pourrait même égaler, voire battre, le record de statuettes récoltées, détenu par Ben-Hur, Titanic et Le Seigneur des anneaux (11 Oscars). Et il ne s’agit pas juste d’un délire de critiques : le film est parti pour atteindre les 100 millions de dollars au box-office américain (faisant de La La Land le plus gros succès de Lionsgate après la saga Hunger Games) et devrait faire une belle carrière en France, où SND a eu la bonne idée de le sortir le lendemain de l’annonce des nominations aux Oscars. Plus qu'un film, un phénomène.
« Quand on a fini le film et qu’on s’est pointé dans les festivals, il restait beaucoup d’incertitudes. Alors oui, je suis soulagé nous confiait Chazelle dans les pages de Première, content de donner tort à ceux qui m’ont dit : « Bof, c’est pas une bonne idée ». Mais à aucun moment, ça n’a été une évidence. Jamais ».
Et c’est comme ça que les plus belles histoires s’écrivent à Hollywood.
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