Découvert à 15 ans dans Les Diables, Vincent Rottiers a creusé son sillon toute en intensité rentrée. Retour sur son parcours en six rôles clés.
Ca fait déjà 15 ans que Vincent Rottiers trace sa route dans le cinéma français. Trois fois nommé aux César, l’acteur d’à peine 30 ans a débuté encore adolescent dans Les Diables de Christophe Ruggia qui fit l’effet d’une révélation instantanée. Il a tourné pour Gilles Lellouche, Florent Emilio Siri, Jean-Paul Salomé, Xavier Giannoli, Claude Miller, Michel Gondry, Pascal Thomas, Jacques Audiard ou encore Bertrand Bonello, alternant films intimistes et grandes fresques historiques, drames et comédies.
Partout où il passe, il impose son jeu toute en intensité rentrée et exploite à merveille une nature écorchée vive. Retour sur son parcours en six rôles.
Les Diables de Christophe Ruggia (2002)
Vincent Rottiers n’a que 15 ans quand il est révélé dans Les Diables, rôle qu’il a décroché grâce à un casting sauvage. Dans ce drame flamboyant, cavale de deux enfants à travers la France, l’acteur imprime déjà sa marque : l’intensité inquiétante de son corps tendu, la sidérante noirceur de ses yeux clairs, la possibilité constante de tout foutre en l’air. Avec Adèle Haenel, autre grande révélation du film, ils incarnent deux enfants d’une douzaine d’années, abandonnés à la naissance, qui fuguent sans cesse dans l’espoir de retrouver le chemin de leur maison. Une entrée fracassante dans le cinéma français.
Narco de Tristan Aurouet et Gilles Lellouche (2004)
Après Les Diables, Vincent Rottiers apparaît dans la comédie Narco, en 2004. Pas encore majeur, il joue ici le version comique d’un ado en pleine rébellion face à Zabou Breitman en mère au bout du rouleau et Guillaume Canet en figure paternelle affaiblie par une maladie qui lui gâche la vie : la narcolepsie. Il s’endort partout, tout le temps, et (en partie) à cause de cela, son fils ne le respecte pas. « La famille, tu parles d’une connerie ! », lâche ainsi son personnage au cours du film. C’est un rôle secondaire, et Vincent est peu présent à l’écran, mais poursuit son exploration des anti-héros qu’il a beaucoup joués au début de sa carrière : des jeunes en mal de repères, réfractaires à l’autorité.
A l’origine de Xavier Giannoli (2009)
En 2007, Vincent Rottiers est nommé au César du meilleur espoir masculin pour Le Passager, d’Eric Caravaca, et deux ans plus tard, il tient un second rôle marquant dans A L’origine. François Cluzet y joue un escroc vivant de petites combines sous de fausses identités, qui va s’improviser chef de chantier et relancer les travaux d’un tronçon d’autoroute dans le nord de la France. Pris à son propre « jeu », il s’attache peu à peu à la population locale, notamment au couple formé par Soko et Vincent, deux jeunes ouvriers qui voient en lui l’espoir d’un avenir plus radieux. « C’est un drôle de truc de pouvoir changer la vie des gens, non ? », lui demande Rottiers au cours du récit. Lorsque son mensonge le dépasse et que le pot aux roses est découvert, c’est à travers les yeux de ces amoureux déçus que la trahison est la plus forte.
La Marche de Nabil Ben Yadir (2013)
Avec Dheepan, l’autre « banlieue movie » de Vincent. Mais un "banlieue movie" finalement assez campagnard. Produit par Jamel Debbouze, porté un cast sensationnel (Tewfik Jallab, Hafsia Herzi, Olivier Gourmet…), La Marche raconte comment, en 1983, un curé et trois ados de la cité des Minguettes organisèrent une grande marche contre le racisme entre Marseille et Paris et finirent par rallier des dizaines de milliers de Français à leur cause. Un petit bijou à la fois feel-good et engagé dont on aurait bien aimé qu’il fasse un triomphe en salles.
Dheepan de Jacques Audiard (2015)
Vincent Rottiers n’a qu’un rôle secondaire dans Dheepan mais marque le film au fer rouge en seulement quelques scènes. C’est lui qui infléchit le cours des événements en déboulant dans la cité dans laquelle Dheepan et sa fausse famille ont été installés, fraîchement sorti de prison, prêt à occuper la place du patron des trafics de stup et à en (faire) payer le prix. Son retour engendre une recrudescence de violence jusqu’à transformer la cité en nouveau théâtre de guerre duquel Dheepan devra encore se sortir. Extraordinaire d’ambiguïté, comme le feu sous la glace, il impose une tension constante, notamment dans la séquence de rencontre avec Yalini (garde malade de son père), avec qui s’instaure un jeu de séduction dont on craint l’issue. Quelques scènes donc, qui lui valent une nomination au César du meilleur second rôle.
Nocturama de Bertrand Bonello (2016)
Le film brûlot de Bertrand Bonello (toujours à l’affiche) ouvre la porte à mille vertiges théoriques mais on peut aussi décider de le regarder comme la photo de famille d’une nouvelle génération d’acteurs (Finnegan Oldfield, Manal Issa, Laure Valentinelli…). Des corps neufs, des visages pour la plupart inconnus. En gourou intellectuel de la bande des terroristes du film, Vincent Rottiers aurait presque du coup des airs de grand frère, de figure tutélaire. C’est également comme ça qu’est regardée Adèle Haenel, lors d’un cameo évanescent. Rottiers, Haenel… Ils faisaient leurs débuts ensemble dans Les Diables il y a bientôt 15 ans.
Toril de Laurent Teyssier est actuellement en salles.
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