De Cartel au Grand Sommeil : les films auxquels on n'a rien compris
Les films auxquels on n'a rien compris
Le plus beau casting du mois, un grand réalisateur mainstream et un écrivain de génie au scénario : sur le papier, Cartel a tout pour plaire. Pourtant, dans une certaine tradition du film noir, l'intrigue du film de Ridley Scott reste opaque, les personnages et leurs motivations énigmatiques, et les dialogues cryptiques, courant le risque de perdre en chemin un certain nombre de spectateurs. On comprend vite qu'il ne faudra pas essayer de tout comprendre à ce thriller dans lequel on navigue comme en eaux troubles, à l'image de son héros (Michael Fassbender) qui ne sait jamais où il met les pieds, et accepter qu'on nous raconte l'histoire différemment.Du plus confus au plus barré ou raté, voici d'autres films auxquels, honnêtement, on n'a pas tout compris.
Le Grand Sommeil (Howard Hawks, 1946)
<strong>Ce qu'on n'a pas compris</strong> : Tout. Le film noir séminal d'Howard Hawks (adapté de Raymond Chandler) est notoirement in-com-pré-hen-sible. Même l'identité du coupable de l'enquête du privé Marlowe (Humphrey Bogart) est sujette à caution. Il paraît que Raymond Chandler lui-même ne savait pas comment le film se terminait.<strong>Ce qu'on a compris</strong> : Que le but du film d'Howard Hawks n'était pas de fournir une intrigue compréhensible.
Au Service Secret de Sa Majesté (Peter Hunt, 1969)
<strong>Ce qu'on n'a pas compris</strong> : En remplaçant Sean Connery par le one-shot George Lazenby, le sixième film 007 devient -dès 1969 !- le James Bond le plus méta de la série. Comme pour se venger du départ de Connery, le film maltraite l'icône Bond, le faisant s'adresser à la caméra, l'habillant en kilt et en veste en velours, le lançant sur un scénario absurde (le SPECTRE menace l'agriculture mondiale à l'aide de pin-ups au cerveau lavé... quoi ?). Lazenby partit ensuite dans une communauté hippie et Sean revint mettre de l'ordre dans la franchise dès le film suivant, <em>Les Diamants sont éternels</em>.<strong>Ce qu'on a compris</strong> : La seule femme que James a jamais aimée et épousée (Teresa DiVicenzo, jouée par Diana Rigg) était corse. Forza !
Lost Highway (David Lynch, 1997)
<strong>Ce qu'on n'a pas compris</strong> : A peu près tout. Récit en boucle (le début est la fin et vice-versa) avec des personnages doubles (Patricia Arquette en brune et en blonde), des maux de tête, des twists improbables (un personnage en remplace un autre lors d'une nuit en prison), et caetera ad nauseam.<strong>Ce qu'on a compris</strong> : On ne va pas mentir, pas grand-chose. Ce n'est pas grave, parce que le but du film de David Lynch est d'être imbitable, en empruntant au film noir sa narration dense et labyrinthique (coucou Le Grand sommeil !) visant plus à créer une atmosphère angoissante et cauchemardesque qu'autre chose.
Pirates des Caraïbes - Jusqu'au bout du monde (Gore Verbinski, 2007)
<strong>Ce qu'on n'a pas compris</strong> : Le comportement des personnages - surtout du script - du troisième volet des <em>Pirates</em> de Disney défie la logique. On se trahit et on se poignarde dans le dos à gogo, au mépris de toute cohérence (Feng trahit Will qui trahit Jack qui trahit tout le monde... gné ?). Le style pirate ? On penche plus pour l'effet bouteille de rhum sur les scénaristes.<strong>Ce qu'on a compris</strong> : Qu'il y aurait de toutes façons un quatrième <em>Pirates des caraïbes</em>. Lorsque celui-ci sortit (<em>La Fontaine de jouvence</em>), il fut très compréhensible mais surtout bien mauvais.
Matrix Reloaded (Andy et Lana Wachowski, 2003)
<strong>Ce qu'on n'a pas compris</strong> : La fameuse scène de l'Architecte. Après une copieuse scène de baston, Néo rencontre le deux ex machina... Qui débite des phrases comme "certaines de mes réponses tu comprendras, d'autres pas. De la même manière, alors que ta première question semble être la plus pertinente, tu réaliseras ou tu ne réaliseras pas qu'elle est également la moins appropriée". Ou comment faire semblant d'être intelligent avec des tournures à la Yoda.<strong>Ce qu'on a compris</strong> : Que les Wachowski ont créé un univers hyper complexe autour du premier film, et que son succès a forcé le studio à leur faire filmer leurs notes de background. Le résultat, un beau bordel.
Film Socialisme (Jean-Luc Godard, 2010)
<strong>Ce qu'on n'a pas compris</strong> : Un bateau-casino-club de vacances croise en Méditerranée, tandis que les personnages s'interrogent en voix over sur le passé et le destin de l'Europe, et toutes ces choses-là, à peu près et environ.<strong>Ce qu'on a compris</strong> : Que JLG ne fait vraiment que des films pour sa fanbase, et surtout pour lui-même. Ce qui est peut-être la même chose.
Sublimes créatures (Richard LaGravenese, 2013)
<strong>Ce qu'on n'a pas compris</strong> : A peu près tout. Il semble que cette romance teenager surnaturelle dans le Sud profond raconte le fight entre deux clans de magiciens, des méchants et des gentils. Il semble y avoir une histoire de réincarnation, aussi, qui n'est pas plus claire.<strong>Ce qu'on a compris</strong> : Que le studio producteur voulait faire du fric avec un pseudo-<em>Twilight</em>.
Southland Tales (Richard Kelly, 2006)
<strong>Ce qu'on n'a pas compris</strong> : Deux bombes atomiques, Justin Timberlake, The Rock en star de films d'action amnésique, Sarah Michelle Gellar en star du porno, Seann William Scott qui joue des jumeaux (un flic et un terroriste marxiste), la rotation de la Terre qui ralentit, Justin Timberlake en narrateur vétéran de la guerre d'Irak, et caetera pendant 160 minutes - la durée du premier montage présenté à Cannes 2006. Abandonne tout espoir, toi qui pénètres ici.<strong>Ce qu'on a compris</strong> : Que Richard Kelly voulait faire - après le carton de Donnie Darko - le magnum opus du cinéma postmoderne, le film cyberpunk ultime façon <em>Tous à Zanzibar</em> qui allait entrer d'office dans les tops des meilleurs films de SF de tous les temps, entre <em>2001</em> et <em>Blade Runner</em>.
Cartel (Ridley Scott, 2013)
<strong>Ce qu'on n'a pas compris</strong> : Michael Fassbender est un avocat vénal et amoral qui se retrouve dans une sale histoire qui met en danger sa vie et celle de sa fiancée. Quelle est exactement l'histoire dans laquelle il s'est fourré ? Qui le menace ? Qui est Brad Pitt auprès de qui il prend conseil mais qui ne lui répond que par aphorismes et métaphores cryptiques ? Quel rôle Cameron Diaz tient exactement dans tout ça et comment, accessoirement, fait-elle l'amour avec une bagnole ? On comprend vite que, dans <em>Cartel</em>, il faut renoncer à comprendre vraiment ce qui se passe et accepter qu'on nous raconte une histoire différemment.<strong>Ce qu'on a compris</strong> : Que le dernier film de Ridley Scott porte plus l'empreinte de son scénariste Cormac McCarthy que du réalisateur de <em>Gladiator</em>.
Le plus beau casting du mois, un grand réalisateur mainstream et un écrivain de génie au scénario : sur le papier, Cartel a tout pour plaire. Pourtant, dans une certaine tradition du film noir, l'intrigue du film de Ridley Scott reste opaque, les personnages et leurs motivations énigmatiques, et les dialogues cryptiques, courant le risque de perdre en chemin un certain nombre de spectateurs. On comprend vite qu'il ne faudra pas essayer de tout comprendre à ce thriller dans lequel on navigue comme en eaux troubles, à l'image de son héros (Michael Fassbender) qui ne sait jamais où il met les pieds, et accepter qu'on nous raconte l'histoire différemment.Du plus confus au plus barré ou raté, voici d'autres films auxquels, honnêtement, on n'a pas tout compris.
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