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De quoi ça parle ?Comme dans GI Joe : Le Réveil du cobra, réalisé par Stephen Sommers en 2009, il est encore question d’ogives nucléaires, de complots internationaux, de terrorisme et de faux semblants dans GI Joe : Conspiration. Le premier épisode mettait l’accent sur la relation amoureuse tumultueuse entre Conrad « Duke » Hauser (Channing Tatum) et Anastasia « La Baronne » Decobray (Sienna Miller), devenue méchante après la mort de son frère sous les yeux impuissants de son protecteur Duke. Le nouvel opus signé Jon Chu reprend le personnage de Duke, mais concentre le tir sur son collègue et héritier Roadblock (Dwayne Johnson). Moins manichéennes qu’elles n’en ont l’air, les frontières Bien/Mal se font poreuses et interchangeables dans cette saga paramilitaire, tandis que l’avenir de la planète se joue sur plusieurs continents entre organisations secrètes armées jusqu’aux dents. La recette scénaristique reste donc à peu près la même (bonnes vieilles valeurs patriotiques US et punchlines un peu lourdingues, dévouée à l’action), mais les décors changent dans ce nouvel opus. Dans le premier épisode, les célèbres agents de l’équipe d’élite US sautaient du Pôle Nord à la Tour Eiffel, en passant par le désert égyptien. Cette fois, ils atterrissent dans la fournaise des déserts d’Islamabad et font un tour dans une prison souterraine en Allemagne, avant de s’envoler vers les gratte-ciels de Tokyo et de gravir les cimes de l’Himalaya. Le tournage a duré 72 jours, en partie à La Nouvelle Orléans et dans ses environs, privilégiant les prises de vues réelles aux CGI.Qui part, qui reste, qui fait son entrée ? Et Channing Tatum ?Le casting est l’un des points forts du film. Mais ceux qui viendront voir GI Joe : Conspiration uniquement pour les beaux yeux de Channing Tatum seront déçus - voilà ce qu’on peut dire, sans trop dévoiler l’intrigue. En effet, l’acteur révélé par la saga Sexy Dance (épisode 1 et 2, lequel était réalisé par Jon Chu) et héros du premier film dans le rôle de Duke, laisse rapidement sa place à Roadblock, son subalterne incarné par l’ex-catcheur Dwayne Johnson. Toujours aussi à l’aise dans les rôles de brutes au grand cœur, The Rock cite Jay-Z dans le texte pour motiver ses troupes avant l’assaut, conduit des engins inspirés des jouets Hasbro comme le Cobra Air Boat (un bateau à deux réacteurs) ou le Cobra Air Tank (une version améliorée du tank qui a nécessité 12 semaines de fabrication), tire sur tout ce qui bouge avec ses gros calibres et fait parler son physique colossal dans d’âpres combats au corps à corps, brutaux comme il faut. Il forme un duo badass au possible avec Bruce Willis, dans la peau de Joe Colton, vétéran pince-sans-rire et GI Joe originel du comics. Si l’on retrouve la star coréenne Byung-Hun Lee dans le rôle de Storm Shadow, ninja expert en arts martiaux et as des Sais (sorte de tridents utilisé par la tortue ninja Raphael), Sienna Miller, Marlon Wayans, Saïd Taghmaoui et Dennis Quaid ne sont plus de la partie. Dans le rôle du soldat Flint, DJ Corona est un peu transparent, comme éclipsé par l’aura solaire de sa cible amoureuse : Adrianne Palicki. Mémorable dans le rôle de Tyra dans la série Friday Night Lights, l’actrice désormais brune incarne Lady Jane, tireuse d’élite charismatique et seule présence féminine dans l’unité des GI Joes, saturée de testostérone.Que vaut la 3D ?Avec Sexy Dance 3D, Jon Chu s’est imposé comme un virtuose de la 3D, sur les traces de Robert Zemeckis et James Cameron. Dans son beau film de danse, il utilisait d’ailleurs la même caméra fusion-3D que le réalisateur d’Avatar. GI Joe Conspiration déçoit un peu les attentes dans le registre 3D, car le film n’a pas été tourné dans cette optique au départ. Réalisé en 2D, il a été converti en 3D après le tournage, pendant de nombreux mois, sous la supervision de Chu qui n’a quasiment rien re-tourné. Mais heureusement pour le public, la mise en scène du cinéaste américain, fluide, est naturellement portée pour la technologie 3D. Le spectacle en relief ne pâtit pas trop de ce relief « de seconde main » : les films de danse de Jon Chu ressemblaient à des films d’action (avec des battles et des flashmobs commandos), son film d’action ressemble logiquement à un film de danse, du moins par moments, privilégiant le combat réel aux explosions et aux effets spéciaux. Si les combats au corps à corps, rugueux et montés nerveusement, gagnent peu au change avec cette gonflette, le film bénéficie ailleurs de belles embardées 3D : on pense à l’évasion de la prison allemande, dans laquelle l’eau et le verre brisé jaillissent avec éclat, aux jeux de miroirs et d’écrans également, dont les perspectives outrées accentuent le vertige des faux semblants, mais surtout à la scotchante scène de varappe en Himalaya.La scène d’anthologieDans GI Joe : Le Réveil du cobra, c’était une course poursuite dans les rues de Paris, avec des combinaisons robotiques qui accéléraient les mouvements des héros de manière spectaculaire, lesquels gravissaient les buildings, jouaient à saute-mouton avec les voitures et traversaient les vitres d’un tram tandis que la Tour Eiffel ployait sous le coup d’une attaque terroriste. GI Joe : Conspiration offre lui son moment de bravoure loin de la civilisation, en montagne, dans les hauteurs himalayennes. Au milieu de ce décor enneigé, Jon Chu orchestre une incroyable poursuite en tyrolienne, entre ninjas-alpinistes. Les combattants masqués se chevauchent, se frappent, s’esquivent, fendent l’espace et coupent leurs cordages avec leurs sabres dans une chorégraphie vertigineuse, à flanc de falaise. Inspirée par un épisode célèbre du comics original (le numéro 21, intitulé « Silent Interlude ») opposant les frères ennemis Snake Eyes et Storm Shadow, la scène évoque également l’ingénieuse chorégraphie des sept nains, en rappel, dans le ballet « Blanche Neige » signé Angelin Preljocaj. Avec la virtuosité formelle qu’on lui connaît depuis Sexy Dance 2 et Sexy Dance 3D, Chu coupe le son pour laisser parler l’image et la pureté du mouvement : 10 minutes de silence, de frissons et de grâce absolue, qui valent à elles seules le déplacement.Eric VernayBande annonce de G.I. Joe : Conspiration, en salles le 27 mars :