Apple va investir un milliard de dollars par an dans des films distribués exclusivement au cinéma

Les prochains films de Martin Scorsese ou de Ridley Scott seront-ils proposés en salles et non directement sur Apple TV+ ?

Bloomberg publie cette semaine un article intéressant sur la décision similaire prise par les gérants d'Amazon et d'Apple d'investir davantage dans la sortie de leurs films inédits en salles, et non systématiquement sur leurs plateformes de streaming. On y apprend ainsi que peu après qu'Amazon ait communiqué le souhait de distribuer entre 12 à 15 longs métrages au cinéma par an, Apple annonce vouloir miser environ 1 milliard de dollars chaque année pour sortir des films sur grand écran.

"Voir de grosses plateformes de streaming décider qu'elles avaient besoin des salles de cinéma, cela prouve bien que le grand écran a encore de la valeur", commente Eric Wold, analyste des médias et de l'industrie du divertissement américain chez Riley Securities. "Cette question représente un problème, poursuit-il au cours de l'article. Mais il peut y avoir un avantage pour les streamers de montrer leurs films en salles. Ils peuvent en tirer des bénéfices supplémentaires par rapport aux compagnies qui ne misent que sur le streaming."

En sortant certaines oeuvres sur grand écran, triées sur le volet en fonction de leur qualité et des attentes du public, ces plateformes pourraient en tirer profit et faire au passage de la publicité pour leur service de streaming. "Dans l'idéal, plus un film reçoit d'attention au cinéma, plus les gens auront envie de le voir quand il sera disponible en ligne, écrit Variety à ce propos. Et plus ils seront prêts à s'abonner (ou à conserver leur abonnement mensuel) à Apple TV+ ou Prime Video." Le magazine américain précise aussi que ce genre de décision peut attirer des stars et des talents, plusieurs acteurs et cinéastes phares de Hollywood ayant fait part de leurs inquiétudes face à la montée du streaming et voulant privilégier les salles de cinéma.

On ne sait pas précisément sur quels films à venir les deux plateformes vont développer cette stratégie de sortie, excepté en ce qui concerne Air, de Ben Affleck, qui sortira le 5 avril dans les salles américaines, avant d'être proposé plus tard sur Prime Video ? Quand sera-t-il visible en France ? Et sur quel support ? Mystère. Car ce genre de décision a un revers : en proposant des inédits au cinéma, les studios ne peuvent ensuite plus les programmer sur leurs plateformes de streaming avant plusieurs semaines, voire mois. Chez nous, la chronologie des médias est plus stricte qu'aux Etats-Unis, ce qui fait que cette question se pose régulièrement. Aux Etats-Unis, Amazon et Apple ont déjà sorti des films de cette façon par le passé, par exemple Manchester by the Sea, ou en ont proposé en "limited release" là-bas, à l'image de CODA, le premier projet d'Apple TV+ à recevoir l'Oscar du meilleur film.

Ce studio pourrait notamment miser sur les sorties prochaines de Killers of the Flower Moon, de Martin Scorsese, pour une sortie en salles en 2023 ? Les oeuvres du cinéaste sont généralement attendues par le public, et celle-ci est portée par deux comédiens très populaires : Leonardo DiCaprio et Martin Scorsese. Cela pourrait aussi lui assurer une sélection dans le cadre du prochain festival de Cannes ? Son délégué général, Thierry Frémaux, prend soin de mettre en avant des films qui seront ensuite destinés à sortir au cinéma, et a déjà critiqué ouvertement les stratégies de diffusions de certaines plateformes, notamment Netflix.

Prochainement, Apple TV + doit aussi dévoiler le biopic de Napoléon par Ridley Scott, avec Joaquin Phoenix dans le costume de l'Empereur, qui pourrait lui aussi trouver son public sur grand écran, ou encore le film d'espionnage Argylle, de Matthew Vaughn, avec Henry Cavill dans le rôle principal. Soit des candidats ambitieux (qui ont coûté cher, ont bénéficié de nombreux décors, costumes etc., ce qui devrait se voir à l'écran), réalisés par des cinéastes reconnus et portés par des stars planétaires.

Qu'en sera-t-il de Netflix et de Disney + ? La plateforme au N rouge a bien proposé Glass Onion, la suite d'A couteaux tirés, au public américain en salles, mais ce fut sur une durée limitée -une semaine autour des fêtes de Thanksgiving- avant de le mettre en ligne en décembre pour tous ses abonnés. Elle peut décider de faire la même chose de façon exceptionnelle, au cas par cas. Quant à la firme aux grandes oreilles, elle dénonce régulièrement la chronologie des médias française, en menaçant de ne pas sortir leurs grosses productions au cinéma, à l'image de Black Panther 2 l'hiver dernier. Parfois, elle finit par assumer cette décision, par exemple pour les films d'animation Alerte rouge ou Avalonia, tous les deux proposés directement sur Disney+ (partout pour le premier et seulement en France pour le second) malgré leur accueil critique positif.