Nom de naissance Glauber Rocha
Naissance
Vitória da Conquista, Bahia, Brazil
Décès
Genre Homme
Profession(s) Réalisateur/Metteur en Scène, Musique, Scénariste
Avis

Biographie

Après avoir interrompu des études de droit, il devient journaliste et participe à l'effervescence culturelle de Salvador et Rio. Le porte-parole du Cinema Novo, polémiste redoutable, restera toujours fidèle à l'écrit, qu'il manie avec une désinvolture presque aussi grande que les images. D'emblée, ce protestant haut en couleur se présente comme un hétérodoxe : il entreprend de démolir les valeurs établies et de secouer le cocotier, par des articles qui débouchent sur une Révision critique du cinéma brésilien (1963). Cependant, il n'accepte guère davantage les dogmes esthétiques de l'orthodoxie marxiste, qui circulent alors parmi les intellectuels nationalistes. Les premiers courts métrages révèlent une veine nettement expérimentale. Ni le néoréalisme ni le réalisme socialiste ne satisfont sa vocation novatrice. Néanmoins, son long métrage initial intègre très partiellement ces inquiétudes, puisque Glauber Rocha remplace Luís Paulino dos Santos à la mise en scène de Barravento (1961) en plein tournage. Le rôle d'un médiateur thaumaturge, intervenant parmi des pêcheurs exploités, y annonce bien d'autres protagonistes de la même lignée, mais Barravento reste une uvre hybride sur le plan du propos comme sur celui du style, le souffle de Rocha n'y passe qu'à moitié. Pourtant, l'utilisation de matériaux hétéroclites constitue une des originalités de le Dieu noir et le Diable blond (1963), qui intègre harmonieusement, dialectiquement plutôt, les influences d'Eisenstein et de la littérature de colportage du Nordeste brésilien, de Visconti et du western, l'apport du documentaire social et du film de samouraïs, la méthode introspective et psychologisante de Stanislavski et la distanciation chère à Brecht, la complexité chorale de l'opéra et la simplicité des mélodies populaires, les données concrètes et précises de la région natale du réalisateur et la parabole sur les options générales posées par le sous-développement. Ainsi, Deus e o Diabo na Terra do Sol participe d'un optimisme conjoncturel, lié aux perspectives de réformes de l'époque, tout en démultipliant considérablement sa portée par la création d'un langage foisonnant, baroque, tout à fait personnel et nouveau, susceptible de devenir le porte-drapeau d'un mouvement contestataire comme le Cinema Novo et l'annonciateur d'une Esthétique de la faim ou Esthétique de la violence (1965). Proposée sous forme de manifeste comme modèle aux cinématographies émergentes du tiers monde, cette reformulation des données de la mise en scène et des structures du récit a pu frapper aussi d'autres cinéastes révolutionnaires (Jancso, Angelopoulos) ou paraître en syntonie avec leurs démarches. Celle de Glauber Rocha renvoie alors à l'entreprise de création d'un langage propre, enraciné dans l'imaginaire de l'auteur aussi bien que dans le contexte culturel dont il est issu, projet inscrit dans la littérature brésilienne depuis le mouvement moderniste de 1922 et superbement réalisé à travers la prose poétique d'un Guimarães Rosa, influence sensible dans le roman de Glauber, Riverão Sussuarana (1977). Les illusions politiques enterrées par le coup d'État militaire de 1964 trouvent en Terre en transe (1967) leur description la plus acerbe. Mais le populisme, le réformisme, les manuvres politiciennes, la tentation messianique de la lutte armée ne sont pas les seules en cause dans cette nouvelle uvre débordante de vitalité : par un tour de vis décisif, les conventions dramaturgiques du réalisme cinématographique implosent dans un récit d'une liberté inédite, comparable uniquement à Buñuel, dont l'influence s'impose ailleurs, avec le théâtre et la musique « tropicalistes ». Glauber Rocha y est à l'apogée de son inspiration poétique, tout en gardant la maîtrise parfaite de ses moyens et de ses ruptures, assurant l'unité d'uvres totalisantes, envoûtantes, d'une remarquable cohérence interne. Antônio das Mortes (1969) constitue une variation autour du personnage de le Dieu noir et le Diable blond, en couleurs, en plus plastique et chorégraphique : le paysage rural du Nordeste y accueille telle figure issue du milieu urbain. Ces archétypes, repris souvent, paraissent nettement plus figés, presque abstraits, dans les deux principaux films de l'exil de Rocha : le Lion à sept têtes et Têtes coupées (1970). L'éclatement du langage, l'obsession de la déconstruction, mis à l'épreuve lors d'expériences comme Câncer et Claro, embrouillent le propos de l'auteur, alors qu'il prétend l'étendre et le généraliser (voire le rendre plus didactique) au contexte ibéro-américain et au tiers monde. Les chemins de Rocha et de Godard se sont croisés dans Vent d'Est. Le cinéaste devient lui-même son propre personnage, Glauber évolue à contre-courant, s'embrouille dans des controverses politiques et des querelles individuelles, échoue à trouver sa place sur l'échiquier bouleversé du cinéma brésilien (ou d'ailleurs). Il réinterprète le passé sous un angle nationaliste et réformiste qui fait la part belle aux militaires (História do Brasil, 1974) et débouche sur une sorte de perplexité contemplative, tantôt lyrique tantôt frénétique, empreinte d'un mysticisme retrouvé et remettant à l'honneur un messianisme réincarné dans un singulier syncrétisme populaire (l'Âge de la Terre, 1980). Le cinéaste, désormais incompris, isolé, meurt prématurément. Lui qui avait filmé les funérailles du peintre Di Cavalcanti en parfait iconoclaste, a droit aux hommages posthumes d'une société à laquelle il aura eu du mal à s'adapter. Le Brésil perd tragiquement avec Glauber un grand créateur de formes, l'apôtre d'un cinéma toujours nouveau, le prêcheur d'une insaisissable révolution et un infatigable agitateur culturel, pourfendeur du conformisme, dont les écrits essayent de cerner tant bien que mal le mouvement souterrain des idées et aspirations libertaires durant notre « siècle du cinéma ».

Filmographie Cinéma

Année Titre Métier Rôle Avis Spectateurs
2015 Patio (court-métrage) Réalisateur -
1980 L'Âge de la terre Réalisateur -
1977 Di Cavalcanti Réalisateur -
1976 Di Cavalcanti Réalisateur -
1975 Claro Réalisateur, Scénariste -

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