Batman du pire au meilleur
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De The Batman au Dark Knight, on a classés les dix long-métrages consacrés au célèbre justicier de DC Comics.

The Batman, la dernière adaptation en date du personnage créé en 1939 par le dessinateur Bob Kane et le scénariste Bill Finger, est désormais disponible en DVD et Blu-Ray (et en VOD sur Première Max). Passée l'excitation ayant accompagné sa sortie en salle, où situer le film de Matt Reeves avec Robert Pattinson ? Mine de rien, il s'agit du 10e long-métrage en live action pour le justicier de Gotham, un record pour n'importe quel super-héros au cinéma (DC et Marvel confondus). Objet de toutes les passions, le Chevalier Noir a été incarné par sept acteurs différents et est passé entre les mains de réalisateurs aux profils incomparables, de Tim Burton à Christopher Nolan, avec à la clé quelques chefs-d'oeuvres, mais aussi quelques nanars. En toute humilité, la rédaction de Première s'est mise au défi (indice ?) de les classer du pire au meilleur. 

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10 - Batman et Robin (Joel Schumacher, 1997)

Bon, c’est facile de dégommer une ambulance telle que Batman & Robin, mais ce n’est pas une excuse. Le deuxième Batman de Schumacher est encore plus cartoon et délirant que Batman Forever - ce qui, chez certains déviants de la rédaction, le rend carrément adorable, mais on imagine que cela peut provoquer une sérieuse réaction allergique au spectateur lambda pour qui Batman rime avec ambition artistique, sinon avec rigueur et sérieux. Schumacher s’inspire directement de la série sixties avec son ton résolument "camp" (Batman dégaine une bat-carte bleue !), et met en scène le film comme un spectacle Holiday on Ice : des spots de lumière tourbillonnent partout, tous les acteurs sont surdéguisés et surmaquillés, la moindre réplique est un jeu de mots hyper naze (Uma Thurman et Schwarzenegger semblent faire un concours dans le domaine), la caméra fait des angles non-euclidiens… C’est sûr que pour une génération nourrie au (Very) Dark Knight, découvrir Batman & Robin doit faire tout drôle : si on vous dit que c’est le rappeur Coolio qui joue Jonathan Crane -alias l’Epouvantail- dans un caméo, vous voyez l’abîme artistique qui sépare ce film des visions batmaniennes du 21ème siècle. Mais il serait un brin injuste de le comparer avec son reboot Batman Begins : sa vraie antithèse, son contre-programme absolu, c’est Blade avec Wesley Snipes, sorti en 1998, qui remettait à zéro pour de bon le cinéma de superhéros que Batman & Robin semblait avoir achevé.

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Batman et Robin
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9 - Batman v Superman : L'Aube de la justice (Zack Snyder, 2016)

Avec en tête le comic book The Dark Knight Returns, Zack Snyder envisage Batman comme un justicier au physique de colosse, vigilante usé par une vingtaine d’années d’activité, et plus très loin de virer à l’extrême droite - peut-être y est-il même déjà. Problème : une fois les trente premières minutes passés, Batou a de moins en moins d’espace pour s’exprimer (la version longue corrige, légèrement, le problème), Snyder s’agitant en tous sens (comme sa caméra) pour tenter de justifier l’existence de son univers et sa galerie de personnages. Ça donne un méli-mélo snyderien bourré de CGI ras la gueule, à la frontière du rêve mouillé de nerd et du fantasme absolu de cinéma (Batman contre Superman !). Mais sans autre angle en vue qu’un combat des dieux et la métaphore messianique de l’Homme d’acier, le film s’enferme doucement dans sa gravité autoproclamée. D’autant plus dommage que Ben Affleck ne démérite pas, mais son Batman devra ensuite attendre cinq longues années et la sortie inespérée de Zack Snyder's Justice League pour dévoiler son potentiel dramatique.

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8 - Batman (Leslie H. Martinson, 1966)

A défaut d’avoir le temps de se lancer dans un rewatch endiablé des 120 épisodes de la série qui faisait « Pow ! Blop ! Wizz ! », le meilleur moyen d’accéder à l’humeur primesautière du Batman sixties est cet opus millésimé 1966, tourné à la va-vite entre les saisons 1 et 2. Un incontournable des soirées nanars, certes (ah, le spray anti-requins !), mais aussi le plus court chemin vers la faramineuse puissance d’incarnation d’Adam West et l’admirable zinzinerie de Cesar Romero, toujours candidat, près de 60 ans après, au titre de meilleur interprète du Joker. Le seul Batman ciné sans velléité théorique, ni surplomb postmoderne, ni météo déprimante. Juste des costumes flashy, des blagounettes bon enfant, et un charme fou.

Batman 1966
20th Century Fox

7 - The Dark Knight Rises (Christopher Nolan, 2012)

Si on était mauvaise langue, on dirait que dix ans (dix ans déjà !) après sa sortie, The Dark Knight Rises ne semble avoir survécu dans les esprits qu’à travers sa memification involontaire et quelques scories pas reluisantes (la voix incompréhensible de Bane, la mort de Marion Cotillard…). Constat un peu sévère pour le film le plus ouvertement politique de Christopher Nolan, qui maquillait en super hero movie sa tentative de résumer l’état de l’Amérique à travers l’effondrement programmé de Gotham City. Une belle idée, toujours traitée avec un sérieux papal, mais malheureusement rarement efficiente en matière de cinéma pur. La faute à un scénario inutilement complexe et brouillon, qui noie dans ses sorties de route les ambitions formelles parfois démentes du cinéaste. Nolan ne retrouvera jamais ici la fougue chaotique de The Dark Knight : Le Chevalier Noir, et achèvera son cycle Batman sur le moins bon volet de la trilogie.

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Bane The Dark Knight Rises
Capture d'écran

6 - Batman Forever (Joel Schumacher, 1995)

Ça veut dire quoi Forever dans le titre ? Rien du tout - et justement le film ne rime pas à grand-chose, simplement à mettre en scène Batman face à deux ennemis légendaires du comics, sur le modèle de Batman, le défi (le méchant justifie l’existence du film), en l’occurrence le Riddler et Double-face. Il est de bon ton aujourd’hui d’opposer radicalement Le Défi et Forever, Joel Schumacher laissant sa place de réalisateur à Tim Burton… Mais ce dernier reste toutefois producteur et laisse fortement son empreinte visuelle sur le film -bourré de super freaks vivant dans des caves fluorescentes - tandis que Joel y injecte une forte dose de sexualité explicite partout, tout le temps. Nicole Kidman en psy nympho, Jim Carrey et Tommy Lee Jones font un concours de cabotinage épique, Val Kilmer déploie toute son aura de connard arrogant qui ne le quittera plus (il dira dans le docu Val que c’était la faute de son costume)… Et franchement, ça ne va pas rester forever dans les mémoires mais ça a mieux vieilli qu’on ne pourrait le croire.

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Batman Forever
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5 - Batman (Tim Burton, 1989)

Moins un film qu’une sorte d’événement pop, une extravaganza, un hallucinant phénomène culturel. La B.O. de Prince ! Le numéro maboul de Jack Nicholson ! La Gotham à 5,5 millions de dollars inventée par le décorateur Anton « Full Metal Jacket » Furst ! Le box-office qui explose ! Sur le strict plan du cinéma, on peut voir le verre à moitié vide, et constater que Tim Burton n’arrive jamais à tirer un tout cohérent de cette succession de séquences tour à tour amusantes, enlevées, kitsch, pataudes, ou franchement navrantes. Mais on peut aussi se dire que le cinéaste réussissait là, malgré tout, un véritable coup de poker, un double uppercut à la fois industriel et artistique, peaufinant la grammaire encore balbutiante des comic book movies, tout en faisant découvrir sa griffe d’auteur aux spectateurs du monde entier. Tout était là, en germe, prêt à exploser dans Batman returns.

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Batman - Tim Burton
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4 - Batman Begins (Christopher Nolan, 2005)

On efface tout et on recommence. Après le désastre Batman & Robin, Warner engage Christopher Nolan pour faire renaître Batman. En s’inspirant cette fois de la BD Year One de Frank Miller, qui raconte dans un style urbain "néo-noir" (comme on dit) la naissance du dark knight dans une Gotham qui n’a jamais été aussi réelle et dangereuse. Oh, pas de panique, il y a tout ce qu’on attend d’un Batman, des ninjas, des super-méchants, des gadgets, et une Batmobile -mais en version 2.0. L’idée de génie est surtout de faire du dark knight un nouveau James Bond : élégant, sexy, sombre, nerveux… Le film cartonne, Batman redevient super cool (merci à la voix grave de Christian Bale) et Hollywood tombe définitivement amoureux de Nolan et du mot reboot. C’était en 2005. Un an plus tard, Casino Royale, qui aurait pu s’appeler 007 Begins, sort en salles.

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Batman Begins
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3 -The Batman (Matt Reeves, 2022)

Réalisateur de deux Planète des Singes, compagnon de route de J.J. Abrams, mais surtout co-scénariste de The Yards, Matt Reeves réinvente Batman en film de mafia à la James Gray, pluvieux et dépressif, mélancolique à mort, où il s’agit d’observer l’héritier d’un empire ployer sous le poids des crimes passés et de la culpabilité de ses aïeux. OK, l’intrigue policière patine un peu, mais The Batman s’apprécie surtout comme une succession de morceaux de bravoure contrariés, étouffés, sculptés dans les ténèbres par le chef op’ Greig Fraser (le Roger Deakins des millenials), entre fétichisme néo-noir et romantisme néo-grunge. Quant à Robert Pattinson, on ne sait pas s’il est le « meilleur » Batman, mais c’est incontestablement le plus émouvant – un justicier teenage qui fronce les sourcils et traine des pieds en sortant de l’obscurité de sa chambre d’ado, comme si on avait forcé James Dean à revêtir l’armure du Chevalier Noir.

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The Batman
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2 - The Dark Knight (Christopher Nolan, 2008)

Si la qualité d'un Batman se mesure à celles de son méchant, alors le Joker du Dark Knight est certainement le plus flippant de l'histoire de la saga. En choisissant de s'éloigner le plus possible de la performance offerte par Jack Nicholson près de 20 ans avant lui, Heath Ledger compose un adversaire inoubliable, qui ne cesse de surprendre le public par ses idées tordues et son nihilisme à toute épreuve. Ses desseins destructeurs déstabilisent Batman comme jamais, et Christopher Nolan le filme comme la véritable force de son blockbuster. Une force destructrice, incroyablement sombre et pourtant fascinante, qui font que ce Dark Knight porte si bien son nom. Marquant un tournant dans la saga, mais aussi dans l'histoire des blockbusters post-11 septembre 2001, cet opus est définitivement marquant. Dommage que certaines erreurs de montage ou des trous scénaristiques l'empêchent d'être un Batman parfait. Là où Le Défi représentait un travail d'équilibriste accompli, capable de mélanger les genres et les tons avec brio, tout en offrant au moins une scène folle à tous ses protagonistes, The Dark Knight est un peu bancal, avec ses séquences dingues mettant en scène le Joker (le braquage initial, l'hôpital, le crayon, la prison... la liste est longue), mais trop peu de place laissée aux autres personnages pour convaincre totalement. Face à lui, Christian Bale a beau user de ses poings et de sa voix aussi grave que l'ambiance du film, il finit éclipsé par un tel adversaire. "Why so serious ?", comme dirait le Joker, moqueur.

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The Dark Knight : Joker
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1 - Batman, le défi (Tim Burton, 1992)

Notre n°1 est donc un n°2 (comme notre n°2, d'ailleurs !). Batman, le défi, c'est avant tout un vrai film de "freaks", qui marche principalement grâce à sa multitude de méchants exceptionnels. Michelle Pfeiffer en Catwoman, Danny de Vito en Pingouin, Christopher Walken en Max Schrek... Tous les choix de casting sont une réussite, les acteurs s'amusant comme des fous à jouer des mauvais tours à Bruce Wayne/Batman (Michael Keaton, qui le leur rend bien), et touchant même pour certains, malgré ce statut de "bad guy", le coeur du public. Le basculement du personnage de Selina Kyle de la victime à la femme fatale, qui ne se laissera plus malmener mais donnera à son tour des coups de griffes, est notamment un exemple de mise en scène efficace. En les plongeant dans des ambiances gothiques à souhait, en empruntant au film noir, et en abordant des thématiques sérieuses (les traumatismes liés à l'enfance, à la pauvreté, à la misogynie...), Tim Burton réussit l'exploit de signer une adaptation à la fois respectueuse des comics, tout en étant remplie de ses propres obsessions. Ce ton adulte ne l'empêche pas pour autant de parsemer son film d'humour qui fait mouche. Le Défi bénéficie aussi d'une tension sexuelle bien dosée entre ses deux protagonistes principaux, ce qui ne gâche rien. C'est du grand spectacle, au sens noble du terme.

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Batman : Le défi
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Bonus - Batman Contre Le Fantome Masqué (de Bruce Timm et Eric Radomski, 1993)

C’est presque une lapalissade. Le Batman animé de Bruce Timm est sans doute la meilleure adaptation du Chevalier Noir qu’on ait vu à l’écran. La plus cool, la plus stylée, la plus drôle et la plus fidèle au personnage de comics créé par Bob Kane et le scénariste Bill Finger. Elle a accouché d’une série qui fait toujours référence 30 ans après, et de quelques longs-métrages bien foutus, mais n’a pas eu l’occasion de laisser une véritable empreinte au cinéma, à l’image d’Into The Spider-Verse pour Spider-Man. Batman contre le fantôme masqué illustre parfaitement ce rendez-vous manqué. Avec ses 76 minutes au compteur et son animation calquée sur celle de la série, on est plus face à un épisode spécial qu'à un long-métrage. Clairement trop petit pour le grand écran, il fut d’ailleurs un échec en salle, où Warner Bros. le sortit sans une campagne de promotion digne de ce nom. Bref, un super téléfilm bien plus plaisant à voir que certains Batman en live action, mais qu’on a dû mal à classer parmi eux.

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Batman contre le fantôme masqué
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