La "suite" des Misérable arrive cette semaine en VOD, DVD et blu-ray.
Haby, jeune femme très impliquée dans la vie de sa commune, découvre le nouveau plan de réaménagement du quartier dans lequel elle a grandi. Mené en catimini par Pierre Forges, un jeune pédiatre propulsé maire, il prévoit la démolition de l'immeuble où Haby a grandi. Avec les siens, elle se lance dans un bras de fer contre la municipalité et ses grandes ambitions pour empêcher la destruction du bâtiment 5.
Bâtiment 5 est le deuxième film de la trilogie prévue par Ladj Ly sur la banlieue. Après Les Misérables, gros succès de l'année 2019, qui retraçait un violent fait divers, cette "suite" se déroule aux environs de 2005, et traite notamment du "mal logement". Rencontré au festival de Sarlat, en fin d'année 2023, le réalisateur avait accordé un entretien à Première, et décrypté deux scènes de Bâtiment 5 en particulier : son ouverture "forte", qui donne immédiatement le ton du film, et sa séquence d'évacuation, centrale dans l'intrigue et spectaculaire dans sa mise en scène. Nous repartageons ses propos à l'occasion de l'arrivée de ce drame en VOD, DVD et blu-ray, en ce mercredi 17 avril. Notez qu'au sein des bonus, il y a un making-of insistant notamment sur les conditions de tournage exceptionnelles au sein de l'immeuble sur le point d'être démoli.
Deux scènes son particulièrement marquantes dans Bâtiment 5 : son ouverture et celle de l'évacuation. Comment les avez-vous conçues ?
LL : C'était important d'avoir une séquence forte en ouverture, qui en dit long sur ce que ces habitants des quartiers peuvent vivre. Il y a ce personnage qui dit : 'C'est difficile de vivre dans ces conditions et d'y mourir.' C'est une phrase terrible, qui en dit tellement sur la situation des gens qui habitent là. On a pris le temps de la faire durer pour que les spectateurs comprennent tout le processus de deuil, mais aussi ce que ça fait de descendre un cercueil sur plusieurs étages, dans des escaliers étroits. Cela représente d'emblée toutes les difficultés qui arrivent dans ces endroits. Nabil vous le racontera mieux que moi, vu qu'il joue l'un des porteurs du cercueil.
Nabil Akrouti : Oui on a tourné dans un endroit particulièrement exigu et la caméra le montre très bien. La difficulté pour moi, c'est tout simplement qu'on portait un véritable cercueil. Et qu'on a refait la prise cinq ou six fois. On ressentait son poids, et c'était important car Ladj voulait tellement coller à la réalité, il tenait à nous mettre dans des vraies conditions pour que ça marche. Et l'émotion est là. Déjà parce que pour nous en tant qu'être humain, le fait de porter un cercueil, c'est très fort. La scène, je la trouve plus que réaliste. Le rendu, pour moi, il est magnifique.
LL : L'autre séquence, déjà dans le scénario, c'était notre climax. Pour avoir vécu ce genre d'évacuation, malheureusement, ce sont des choses qui arrivent vraiment souvent. La question est beaucoup revenue au cours de la promo : 'Est ce que ça a vraiment existé ? Est-ce que ça arrive qu'on exclue les gens comme ça du jour au lendemain, en quelques heures ?' Oui, effectivement, c'est arrivé à Clichy, puis c'est arrivé dans plein d'autres villes.
Ce sujet spécifique, ça m'intéressait de traiter. On a pris le temps de le faire bien. C'est une séquence qui dure presque quinze minutes dans le film. Ce n'était pas évident à tourner bien qu'on ait cette tour à notre disposition, parce qu'il y avait plus de 200 figurants, de grosses équipes techniques, trois caméras qui tournaient en même temps et surtout ces cages d'escalier très, très étroites. Avec autant de monde, c'est un vrai challenge ! D'ailleurs, on avait déjà expérimenté quelque chose de proche sur Les Misérables avec cette scène finale qui dure aussi quinze minutes dans cette cage d'escalier. Mais celle-ci, c'est une séquence que j'apprécie énormément, j'espère qu'on va en parler.
Les Misérables, on l'a fait avec des bouts de ficelle, on a eu très peu d'argent, très peu de moyens, donc ça a été beaucoup à l'énergie. Les gens se sont impliqués, ont joué le jeu et y sont allés avec le coeur. Grâce à son succès, forcément, on a eu plus de facilité. Notamment plus de moyens techniques, alors on a essayé d'élever la mise en scène. Vous pouvez voir qu'elle est assez différente sur Bâtiment 5 où on tournait en général à trois caméras. On a eu une grue énorme, c'était vraiment du plaisir à diriger. Surtout qu'on avait cet immeuble désaffecté rien que pour nous : dix étages, 150 appartements où on pouvait tourner ce qu'on voulait. Pendant trois semaines. C'est grâce à ça qu'on a tourné cette grosse séquence d'évacuation. On était assez à l'aise quand même !
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