Le film culte fête ses 30 ans aujourd'hui, et il n'a rien perdu de son aura.
La Leçon de piano, film bouleversant de Jane Campion, a été pour la première fois montré au plus dans le cadre du festival de Cannes, le 19 mai 1993. Retour sur ce grand succès critique et public, qui fête donc son 30e anniversaire en ce jour.
Le pitch ? Holly Hunter joue Ada, une femme muette épousant un néo-zélandais (Sam Neill) après avoir eu une fille hors mariage (Anna Paquin). Elles s'installent chez lui, mais il se débarrasse de son piano, l’instrument grâce auquel elle parvient à s’exprimer. L’objet est récupéré par son voisin (Harvey Keitel), et Ada passe alors un contrat érotique avec ce nouveau propriétaire, afin de regagner son piano touche.
En 1993, le film de Jane Campion a été récompensé par la Palme d’or lors du festival de Cannes et Holly Hunter a également obtenu le prix d’interprétation féminine. L’année suivante, La Leçon de piano recevait le César du meilleur film étranger et les Oscars du meilleur scénario (pour Campion), de la meilleure actrice (Hunter) et du meilleur second rôle féminin (Paquin). Entre temps, public avait été conquis avec rien qu’en France plus de 2.6 millions de spectateurs.
Première avait adoré ce "film magnifique", comme le détaillait Jean-Jacques Bernard dans sa critique "coup de cœur" du numéro de juin 1993. "Une façon de réapprendre la passion et le romanesque comme s’ils foulaient l’un et l’autre une terre vierge. Une terre où le cinéma lui-même semble être le témoin inédit et secret d’une histoire sauvage au bout du monde. (…) Au fond, c’est le retour simplissime du trio primaire : ‘la femme, le mari, l’amant’. Mais Jane Campion retourne cette simplicité, cette brutalité, avec des arguments fantastiques. (…) Les scènes dites ‘chaudes' sont filmées avec une sensualité qui ne vient d’aucun autre artifice que de l’amour de Jane Campion pour ses personnages. Harvey Keitel est montré nu, musculeux et trapu dans son essence d’homme des îles dont on ne sait rien. Bref, il est montré comme l’Autre, l’antipodique absolu, et il est aimé pour cette redoutable différence. (…) Ne comptez plus les pas qui doivent vous précipiter voir ce film. Jane Campion, qui a su donner une forme moderne au plus beau des contes classiques, mérite un triomphe."
En 2015, la réalisatrice avait commenté sa filmographie auprès de Frédéric Foubert, et elle gardait un souvenir ému de cette aventure : "C’est la première fois que je travaillais avec des acteurs américains de ce calibre. J’étais terrorisée à l’idée de rencontrer Harvey Keitel, je l’imaginais aussi sauvage et dangereux que dans les films de Scorsese, mais il s’est révélé charmant. Il voulait vraiment faire le film, il me suppliait de l’engager. C’était le monde à l’envers ! J’ai d’ailleurs failli lui dire non car j’avais peur que son expérience m’inhibe, peur de me faire manger toute crue sur le plateau. Il m’a appelée un soir pour fixer les règles du jeu : ‘Pour chaque scène, je te proposerai mon interprétation, ma vision des choses. Mais si tu n’es pas satisfaite, promis, je travaillerai jusqu’à ce que tu le sois.’ J’ai beaucoup appris sur la direction d’acteurs grâce à lui. Avant, pour moi, ça signifiait embaucher des copines actrices et leur donner des ordres du matin au soir ! (rire) Le succès ? Je ne l’ai pas vraiment vu venir. Quelques semaines avant que le film ne soit sélectionné à Cannes, je l’avais montré à mon ami Monty Montgomery (futur producteur de Portrait de femme) et il avait fait la moue : ‘Ça marchera correctement dans le circuit art et essai australien, mais ça n’ira pas plus loin.’ On en rigole encore aujourd’hui."
Bande-annonce de La Leçon de piano :
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