C’est le papa de tous les desperados du cinéma d’auteur français. Philippe Garrel, 67 ans, continue de sortir des films produits a minima qui, parfois, débouchent sur des petits miracles, des précis de mise en scène estampillés Nouvelle Vague dont il est l’un des derniers héritiers revendiqués.Dans L’ombre des femmes, donc, il est question d’amour - grande préoccupation du cinéaste - dont on parle et qu’on vit intensément dans des appartements parisiens. Parfois, on sort dans la rue pour se courir après, pour s’engueuler, se séduire. Une voix off neutre commente l’action. C’est en noir et blanc. Eustache et Truffaut (la supériorité des sentiments et de la langue) d’un côté, Godard (la supériorité de l’image et du sens) de l’autre, sont convoqués pour ce drame de la jalousie qui réunit l’homme, la femme et la maîtresse. On n’est pas loin du maniérisme, c’est même assez irritant, mais par la grâce des acteurs et la photo de Renato Berta, le charme opère peu à peu.Femme au centreCoécrit par l’immense Jean-Claude Carrière, cette intrigue ordinaire se pimente d’un rebondissement un peu original puisque l’homme apprend par sa maîtresse que sa femme a un amant. La réaction du mâle dominant ne se fait pas attendre : il est en rogne. Et Garrel d’autopsier les rapports hommes-femmes à l’heure de la parité, d’où il ressort que la femme a cette capacité formidable de pardonner quand l’homme n’a que celle de se flageller et de ruminer. En la matière, le cliché a la peau dure mais il souligne la volonté de Garrel de remettre la femme au centre du débat amoureux et érotique.Minéral et beau, Stanislas Mehrar incarne à merveille l’artiste maudit (il réalise un documentaire sur un résistant de pacotille) face à Clotilde Courau qu’on redécouvre lumineuse. Entre les deux : la révélation Lena Paugam. Avec sa beauté ordinaire et sa mélancolie, elle s’inscrit dans la veine des grandes héroïnes de la Nouvelle Vague qu’on a tant aimées.Christophe NarbonneL'ombre des femmes de Philippe Garrel avec Stanislas Mehrar, Clotilde Courau, Lena Paugam, présenté en ouverture de la Quinzaine des réalisateurs, sort en salles le 27 mai.
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L'ombre des femmes : un petit miracle d'un autre temps
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