Titre original Feng ai
Date de sortie 11 mars 2015
Durée 227 mn
Réalisé par Wang Bing
Distributeur Les Acacias
Année de production 2014
Pays de production France, Japon, Chine
Genre Film documentaire
Couleur Couleur

Synopsis

Un hôpital psychiatrique du sud-ouest de la Chine. Une cinquantaine d’hommes vivent enfermés traînant leur mal-être du balcon circulaire grillagé à leur chambre collective. Ces malades, déviants ou opposants, éprouvent au quotidien leur résistance physique et mentale à la violence d’une liberté restreinte. Wang Bing nous plonge dans la « folie » de la Chine contemporaine.

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Critiques de A la folie

  1. Première
    par Christophe Narbonne

    Dans un asile du sud-ouest de la Chine, le quotidien d’une cinquantaine de "patients" vivant dans des conditions spartiates. Pour son documentaire le plus "wisemanien", Wang Bing ("Les Trois Sœurs du Yunnan") s’est immergé de manière invisible dans une institution psychiatrique aux airs de prison. Au prix d’un délicat travail de mise en confiance, il est parvenu à faire oublier sa caméra aux occupants des lieux, en l’occurrence à des malheureux dont on ne saura jamais s’ils sont vraiment malades ou simplement dérangeants pour le pouvoir local, voire pour leurs familles, qui viennent leur rendre visite avec un sentiment de gêne évident. Totalement désinhibés, les "fous" de Bing traînent comme ils peuvent leur désarroi dû à la promiscuité, à l’enfermement et à l’absorption de médicaments. Certains urinent à même le sol ou les murs des chambres communes, d’autres font en courant le tour de la balade circulaire grillagée, seule ouverture vers l’extérieur mise à leur disposition. En plans fixes ou avec une caméra à la ceinture (moyen pratique pour coller aux plus excités), Bing enregistre, sans commentaires ni musique, parfois à la limite de l’intrusion, les accrocs, les incongruités, les moments de tendresse et de rire qui surviennent dans cet univers carcéral d’où étrangement la violence est exclue. Comme si les "patients", assommés de propagande et de cachets, convaincus de leur inutilité, s’étaient résignés. Une séquence résume à elle seule l‘ambiguïté de l’enfermement. Il s’agit du moment où Bing suit un malade qui profite d’une sortie autorisée pour aller voir ses parents. Une fois chez eux, il se heurte à l’animosité de son père, aux attentions maladroites de sa mère, à sa propre incapacité à communiquer, à ses petites manies qui tournent à l’obsession et à la logique économique qui préside à l’éloignement d’une personne à charge, comme lui. N’en pouvant plus, il quitte le domicile – ou plutôt le taudis – familial et va marcher pendant des heures comme il le ferait à l’asile pour évacuer son trop-plein d’angoisse. La durée titanesque d’"À la folie" trouve sa légitimité dans ce genre de séquence, où Bing prend le temps de cerner ses sujets pour leur donner une visibilité et, en quelque sorte, les faire exister aux yeux d’un monde qui les a symboliquement enterrés.