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Les Mystères de l’amour : pourquoi ça marche encore ?

Hier, la chaîne TMC diffusait un prime consacré à la série Les Mystères de l’amour : un double épisode sur le mariage costumé (nappé de fantastique) d’Hélène et de Peter, intitulé Amour, fantômes et mariage. Cet épisode a réuni près de 659 000 téléspectateurs, soit 2.3% du public, un score honorable et même impressionnant pour une série originale française, diffusée sur une chaine du câble (TMC). A raison de deux saisons chaque année, la série Les Mystères de l’amour en est déjà à sa huitième saison là où beaucoup de séries françaises peinent à atteindre une saison 5.Démarrée en 2011 (le 12 février) sous le regard nostalgique et dubitatif de beaucoup d’observateurs, la série dérivée (des dérivées) dHélène et les garçons est un succès discret, mais assurément un succès.Certes, Nicolas, Hélène, Laly, Cricri (d’amour), José et les autres jouent à fond la carte de la nostalgie avec des clins d’œil auto-référencés, propres à ne toucher que les trentenaires (ah, la relation Mr Girard/Annette a fait couler beaucoup de pixels !), mais cela n’explique pas seul le succès.Il serait trop simple de réduire la série créée par Jean-François Porry a une madeleine de Proust enchaînant les cameos de Jacky, des Musclés, de Rochelle et son accent, ou de tous les copains de Dorothée des années 90 (Hélène et les garçons date de 1991).Depuis leurs début, les productions AB ont su en effet créer un méta monde, remplis de couleurs chatoyantes et de rires préenregistrés où les problèmes existentiels sont tous plus futiles les uns que les autres, mais interprétés (oui, les productions AB sont jouées !) au premier degré, comme si la vie en dépendait. Rien n'est anxiogène, tout est beau et les méchant sont (un peu) châtiés ou deviennent le plus souvent gentils, conscients de leurs erreurs. Le politiquement correct avant l’heure : la série que l’on peut regarder tout en surfant sur internet ou en pleine conversation SMS. Tout un concept.Les Mystères de l’Amour perpétue cette tradition née avec Salut les Musclés en 1989, mais en modernisant les propos, les personnages et les situations, faisant fis biensûr des rires enregistrés, plus vraiment au goût du jour. Les couleurs chatoyantes sont restées et les garçons s’appellent toujours "Les Garçons", et les filles "les Filles". Le meta monde idéalisé, simplissime et rassurant est toujours là mais touche désormais les jeunes générations, fascinées à leur tour par des histoires d’amour qu’ils ne vivront jamais tout en rêvant qu’elles leur arriveront un jour. Les plus âgés continuent, eux, de suivre les aventures des héros de leur enfance par peur de trop perdre la leur. L’addiction pavlovienne cathodique est née avec les productions AB, et Les Mystères de l’amour la prolonge.Hormis Plus Belle la vie, qui ne vise pas la même cible, il n’y a pas de série française concurrente. C’est quasi impossible. Beaucoup ont essayé, tous ont échoué. Totalement assumées, les histoires font en effet corps avec leurs interprètes dont on a oublié les véritables noms depuis longtemps (Cricri, Nicolas, José sont désormais les patronymes quasi officiels de Sébastien Roch, Patrick Puydebat et de Philippe Vasseur), symboles à eux seuls des productions AB. Ils ont réussis depuis longtemps à faire partie de l’ADN de la télé au même titre qu’un Drucker ou qu’un Chiffres et des Lettres. On ne les regarde pas forcément, mais s’ils n’étaient pas là ils nous manqueraient assurément quelque chose.N. Bellet