Après mai, le film autobiographique d’Olivier Assayas a été applaudi. On peut comprendre que le public, en majorité italien, ait vu avec bienveillance ce coup d’oeil dans le rétroviseur sur une époque principalement vécue en France, mais dont les répercussions se sont étendues à toute l’Europe, et en particulier à l’Italie, où les personnages d’Après mai ont des liens privilégiés. Le film d’Assayas s’inscrit aussi dans cette tendance du cinéma italien, avec des films comme Romanzo criminale ou Buongiorno notte, à se pencher sur le passé récent.Ce qui ressort le plus d’Après mai, c’est l’effet de miroir qu’il tend à l’époque contemporaine en montrant à quel point les mentalités ont changé. Au début des années 70, être jeune signifiait couper tous les ponts avec le passé, refuser de se conformer aux modèles, se mettre en marge par conviction, vivre au jour le jour. Quelle différence avec les jeunes manifestants d’aujourd’hui qui revendiquent avec angoisse la sécurité de l’emploi jusqu’à la retraite! Gilles, l’alter ego d’Assayas, est étudiant aux beaux-arts et cherche sa voie entre engagement politique, travail pictural, expériences culturelles, déceptions sentimentales, et voyages. A un moment, une ex lui affirme avec une pointe d’envie qu’il a de la chance de savoir qu’il sera peintre, parce qu’elle-même vit dans un présent incertain, à se consumer auprès d’un clone de Keith Richards. Assayas recrée les années 70 avec la précision d’un historien, le recul d’un écrivain, et la sensibilité d’un artiste fécondé par le formidable bouillon de contre-culture de la période, évoqué ici sous des formes multiples.