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Une vie meilleure relate le quotidien d'une gamine coréenne abandonnée par ses parents et pose un vrai débat de cinéma.Sorti mercredi dernier, Une vie toute neuve fait l'unanimité critique. Racontant le destin d'une jeune coréenne abandonnée par ses parents, le film bénéficie d'une critique unanime. Les journalistes saluent (à juste titre) une oeuvre qui évite le chantage à l'émotion pour parler d'un sujet fort, vue à hauteur d'enfance. Sans musique, sans pathos, Une vie toute neuve est donc un témoignage brut qui nous alerte sur le calvaire de ces gamins... mais laisse aussi certains spectateurs seuls avec leur souffrance. Témoin, cette lettre reçue à la rédaction, écrite par une spectatrice concernée (et avisée). Nous la publions pour apporter un autre point de vue sur ce film important et l'éclairer d'une vision... moins théorique. "Face au médecin qui constitue son dossier d'adoption, Jinhee, petite Coréenne de 9 ans, s'entend dire que son papa l'a abandonnée pour qu'elle ait une vie meilleure. Sans parents et sans repères pour une vie meilleure (une vie toute neuve, en fait)… Ah bon. Ounie Lecomte fait partie des centaines de milliers d'enfants coréens adoptés à l'étranger depuis les années 70. Moi aussi. Et même s'il y a sûrement des centaines de milliers d'histoires à raconter, elle choisit de parler avec cette voix qui nous met tous à l'unisson, celle de la douleur de l'abandon, souvent oubliée, cachée par la « beauté-de-l'adoption », chose qu'on entend souvent (ça va avec le concept de vie meilleure). Bonne idée. Une scène montre la fillette en train de s’enterrer vivante. Dans une autre, une des orphelines, copine de Jinhee, semble se vendre, comme à un entretien d'embauche, à de potentiels parents américains. Evidemment, c'est choquant (rassurez-moi, c'est choquant ?). On se dit que cette petite fille, croyant qu'il faut être parfaite pour avoir le droit d'être aimée, devra, comme les autres, subir des années de psychanalyse pour guérir son problème de dette. Mais ici comme ailleurs, le film refuse le pathos. C'est bien, mais pas si bien. Tellement flagrant qu'on se demande si Ounie Lecomte ne se cache pas derrière sa discipline anti-misérabiliste, comme si l'exercice servait surtout à prouver que la petite fille perdue du passé a bien laissé place à l'adulte d'aujourd'hui, capable de raconter son histoire sans (é)branler. Comme si cette histoire, « vue avec justesse », avait été glissée dans un document témoin. Sans amertume, sans gratitude, et du coup, sans moi. Parce que, dans le fond, oui oui, on est faites pareil, mais nous (enfin moi), une fois de temps en temps, on aime bien s'apitoyer sur notre sort, on aime bien qu'un artiste rende complètement légitime la souffrance de l'abandon, qui nous a construit, aussi. On aime qu’on nous raconte une histoire pouvant répondre à la nôtre. Et avec des larmes, s'il faut."