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L'année dernière, Première était sur le plateau du troisième volet de la franchise.

C'est bien la première fois qu'on aperçoit le logo de Batman sur un tournage de film Marvel Studios. Il aura fallu aller jusqu'en Australie pour assister au mariage forcé : en septembre 2016, à une heure de Brisbane dans le Queensland, Thor : Ragnarok est en train d'être mis en boîte aux studios Village Roadshow, alors que juste à côté se tient fièrement le parc d'attraction Warner Bros. Avec ses montagnes russes qui culminent à une trentaine de mètres du sol, impossible de le manquer. "On est vraiment tout près du grand huit Superman. Pendant les premières semaines, depuis mon bureau, j'entendais régulièrement les gens crier pendant quatre ou cinq minutes ! À la longue on s'y fait", confie Taika Waititi entre deux prises. Le réalisateur a en effet d'autres chats à fouetter : ces jours-ci, il tourne une "grosse scène de bataille sur un pont d'Asgard", avec rien de moins que Thor, Loki, Hulk et la petite nouvelle nommée Valkyrie, incarnée par la vaillante Tessa Thompson.

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Des dizaines de figurants s'agitent dans tous les sens - et font à l'occasion une pause sandwich - pour fuir la menace d'Hela (Cate Blanchett), déesse de la mort et grande méchante du film, qui va rapidement faire comprendre à Thor qui est la patronne en explosant son marteau Mjolnir d'une seule main. "Elle vient d'un temps immémorial, très sombre, bien avant la naissance de Loki et Thor", explique le producteur exécutif Brad Winderbraum. "Elle fait partie des problèmes qu'Odin gérait quand il était sur le trône. Et Hela était sûrement son plus gros souci". Le roi des dieux d'Asgard a en effet disparu à la fin de Thor : Le Monde des ténèbres, quand Loki a volé sa place en se faisant passer pour lui. Depuis, rien ne va plus : "Odin avait mis beaucoup de stratégies en place pour maintenir la paix dans l'univers. Mais Loki n'en savait rien et tout refait surface d'un coup. Thor se retrouve aux quatre coins de l'espace pour résoudre des problèmes qui ne devraient pas exister".

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Tom Hiddleston, qui reviendra évidemment jouer Loki, ne se formalise pas quand on lui fait remarquer qu'à part son personnage, Marvel Studios a toujours eu du mal à fabriquer de bons méchants. "Je prends ça comme un compliment ! Mais je vois ce que vous voulez dire. Samuel L. Jackson m'a dit une fois sur Avengers que ces films se jaugent à la qualité de leurs méchants. Taika est très conscient de ça, et il est très fier d'Hela. Cate est absolument formidable. Et c'est très amusant pour moi car du coup je n'ai pas besoin de faire le méchant, ce qui permet à mon personnage de rester imprévisible. Loki a toujours été sur le fil entre le bien et le mal. Cette fois, il va devoir choisir son camp".

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Sakaar merde

On sait depuis le premier trailer que Thor va rapidement se retrouver sur Sakaar, où il sera capturé par le Grand Maître (Jeff Goldblum), avant d'être obligé de se battre dans face à son "collègue de travail" Hulk. Mais comment les deux héros se sont-ils retrouvés sur cette planète pour le moins étrange ? "Sakaar ressemble aux toilettes de l'univers", raconte Winderbraum. "C'est un endroit unique dans le sens où la planète n'orbite autour d'aucune étoile. Elle existe au milieu de l'espace et est entourée de trous de verre qui mènent à d'autres endroits du cosmos. Si quelque chose se passe mal, disons au hasard dans le Quinjet ou le bifrost, c'est là que vous allez vous retrouver". Voilà pour l'explication.

Depuis la fin d'Avengers : L'Ère d'Ultron, où il s'envolait pour une destination inconnue avec le vaisseau des Vengeurs, Hulk est devenu une star de l'arène du coin. Exactement comme dans l'arc Planet Hulk des comics, dont le scénario s'inspire largement. "Le Grand Maître est le patron de cet événement sportif qui joue un grand rôle dans la culture locale. Hulk est un héros, le plus grand gladiateur. Une machine à tuer. Et quand il gagne, tout le monde va dans la rue pour une parade où les gens portent des masques à son effigie". 

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Cette fois le géant vert sera doué de parole et pourra prononcer des phrases entières. "Il cause pas mal dans le film. Il n'est pas vraiment intelligent, mais il peut s'exprimer. Par contre il est bien plus malin que ce que sa façon de parler laisse paraître, ce qui donne lieu à des scènes inattendues et vraiment drôles". Le personnage est bloqué en position Hulk et n'est pas redevenu Bruce Banner depuis son arrivée. "La seule chose qui fasse peur à Hulk, c'est Bruce Banner. Ce qui est intéressant ici, c'est que Hulk est resté conscient pendant une longue période. Il est enfin lui-même". Et ne compte donc pas se faire déloger par son alter ego si facilement.

Quant à Sakaar, elle n'usurpe pas son surnom de "planète poubelle" : dans cet assemblage hétéroclite de déchets venus d'un peu partout dans l'univers (on a même trouvé un emballage de frites McDonald's sur un stand de vendeur de rue), les habitants ne doivent leur survie qu'à la récup'. "La population a besoin des choses qui tombent de l'espace. La nourriture est totalement synthétisée", assure le producteur de Thor : Ragnarok. "Tout est plus ou moins en métal ou en plastique, les gens fabriquent leurs habitations comme dans un bidonville".

Kirby's Dream Land

Un bidonville largement inspiré par l'oeuvre du dessinateur Jack Kirby, créateur de la plupart des grands personnages Marvel avec Stan Lee. Les couleurs vives et le trait anguleux et épuré du "king of comics" sont partout dans les décors de Sakaar. Une influence que l'on doit à Taika Waititi, qui a tenu personnellement à insuffler un esprit kirbyesque à la planète. "J'étais ravi quand Kevin Feige (NDLR : le patron de Marvel Studios) et les autres ont accepté d'aller vers ça. Mais c'est très compliqué de rendre en vrai des dessins de comics. Il a fallu la jouer fine, rester crédible. Sinon on a vite fait d'aller trop loin". Dan Hennah, chef décorateur qui a notamment travaillé sur Le Seigneur des Anneaux et Le Hobbit, a dû s'adapter : "On s'est plongé dans les dessins de Kirby. On a décidé de tout rendre anguleux, complètement à l'opposé d'Asgard, dont on ne pouvait d'ailleurs pas vraiment modifier le look puisqu'on a hérité du design des deux premiers films".

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Le poids du passé est lourd - la franchise Thor est loin d'être la plus populaire du MCU -, ce qui n'a pourtant pas empêché Waititi de s'émanciper. "L'idée de départ était d'ausculter les deux premiers films pour voir ce qu'ils avaient à offrir. Mais je ne voulais surtout pas faire le nouvel épisode d'un long-métrage de quelqu'un d'autre. C'est un stand alone qu'on peut regarder sans avoir vu le reste. L'univers Marvel est comme un puzzle mais chaque film doit tenir tout seul. D'ailleurs je n'ai lu aucun des autres scripts des longs-métrages à venir. Pour Ragnarok, Il fallait recenter le débat sur les personnages et surtout faire évoluer Thor", confie-t-il. "Il est évidemment toujours le héros, mais en plus contemporain. Comme il a  passé quelques années sur Terre, il est devenu plus drôle, il manie mieux le sarcasme et l'ironie. Les gens vont se sentir plus proches de lui. Je voulais trouver une façon marrante de faire une aventure cosmique avec Thor, Banner et Valkyrie. Je suis fan de buddy movies sur fond de road trip et j'ai envisagé le projet comme ça dès le début".

Libéré, délivré

On nous promet plus d'humour (la bande-annonce l'a d'ailleurs déjà prouvé) et pas mal d'improvisation, mais le mot qui revient à la bouche de tout le monde comme un mantra est "différent". Arborant désormais des cheveux courts et deux longues bandes rouges qui lui traversent l'oeil gauche, le massif Chris Hemsworth ne dit pas autre chose : "On sort d'Asgard et le ton des a énormément changé. Tout d'un coup, on se retrouve face à des choses inédites, couplées à des personnages qui apportent de nouvelles pierres à l'édifice". Son collègue Tom Hiddleston confirme et assure que Waititi "n'essaie pas de faire du réchauffé. C'est quelque chose de totalement neuf. Ces films sont une énorme machinerie, et parfois ça pèse très lourd sur les épaules du réalisateur. Pas pour lui. Il a toujours l'air léger comme l'air. Il invente en permanence".

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Même s'il s'agit de son premier blockbuster (le cinéaste s'est fait remarquer avec de petites productions comme les excellents Boy, Vampires en toute intimité et Hunt for the wilder people, encore inédit chez nous) Waititi promet être "libéré" par le budget massif accordé à Thor : Ragnarok : "Concrètement, j'ai plus de temps et plus d'options créatives. Mais quand je travaille avec mes acteurs, c'est exactement la même chose que pour mes précédents films. On s'amuse, on reste détendus, on invente des choses ensemble. Je ne me sens pas en dehors de ma zone de confort. Pas encore du moins !"

Thor : Ragnarok, sortie le 25 octobre 2017. Bande-annonce :