Comédien, cinéaste, metteur en scène à grand spectacle, homme de théâtre et de télévision, l'artiste décédé à l'âge de 93 ans, était à la tête d'une carrière protéiforme.
Robert Hossein est mort et avec lui sa voix grave dont l’éraillement témoignait tout à la fois d’une profondeur et d’une faiblesse. Cette voix, chacun pourra toutefois la réentendre indéfiniment en suivant les lignes de son imposante filmographie. De la fin des années quarante au début du XXIe siècle, le comédien aura incarné les séducteurs, les voyous mais aussi les aristocrates pour Sacha Guitry (Le diable boiteux), Jules Dassin (Du Rififi chez les hommes...), Gérard Oury (La menace), Bernard Borderie (la série des Angélique Marquise des anges), Henri Verneuil (Le Casse), Marguerite Duras (La musica) mais aussi Claude Lelouch (Les Uns et les Autres...), Alexandre Arcady (Le Grand Pardon...) ou Tony Marshall (Vénus beauté, institut...) Cette filmo au profil bigarré, qui à défaut d’être justement sans défaut, dessine la vitalité d’un acteur qui fut aussi homme de théâtre et de télévision mais aussi metteur en scène. Devant et derrière, c’est-à-dire partout.
Vers la lumière
Robert Hossein se voyait volontiers vorace. Son ami Frédéric Dard le comparait d’ailleurs à un loup. L’intéressé prenait ça pour un compliment. Le loup avance en bande, il est constamment pourchassé. Robert Hossein était le fils d’un musicien iranien originaire de la cité mythique de Samarcande en Ouzbékistan et d’une mère russe, passée à deux doigts d’une brillante carrière d’actrice. Mais le racisme (sa maman était juive), la guerre, auront raison de leur gloire respective. Robert Hossein né à l’ombre de ces lumières éteintes aura donc passé sa vie à entretenir la flamme de son propre flambeau. « Mes parents m’ont appris l’humilité, l’imagination sans limites et l’espérance... », confiait l’intéressé lors d’un entretien à France Culture en 1995. Et tant pis, si tout ça ne faisait pas bouillir la marmite, ni chauffer la chambre de bonne de la rue de Vaugirard à Paris.
« L’espoir fait vivre », n’est pas une vaine expression. Elle peut être aussi un crédo. Elevé dans des pensionnats, l'homme s’est toujours méfié des « écoles » préférant celle de la vie. Le jeune Hossein s’enfonçait volontiers dans les salles obscures du Quartier Latin à Paris et de retour dans les dortoirs, racontait ce qu’il avait vu à ses camarades qui buvaient ses paroles. Un comédien né, en somme.
L’acteur jouera le plus souvent les beaux ténébreux lui dont les professeurs d’art dramatique disaient qu’il était né sous une mauvaise étoile, « ni beau, ni moche, ni brun, ni blond, ni jeune premier, ni second, avec une voix bizarre... » Pour Marguerite Duras, il était : «un Don Juan de bazar, un Casanova pour midinettes. » Là-aussi, Hossein y voyait un compliment.
Fresques pharaoniques
Robert Hossein était avant tout un homme de spectacle. Spectacles plus grands que nature. A partir des seventies, il aura mis en scène des grandes fresques pharaoniques où le public pouvait décider du dénouement de l’intrigue : La Cuirassé Potemkine, Notre-Dame de Paris, Danton et Robespierre ou encore Jésus de Nazareth. Des pièces « grand public » qui feront sourire la critique et les intellos. Il y a eu aussi Les Misérables, l’une des grandes affaires de sa vie. En spectacle musical d’abord, transposé à Broadway avec succès puis au cinéma en 1982 avec Lino Ventura en Valjean, Michel Bouquet en Javert et Jean Carmet en Thénardier. Parmi ses propres réalisations cinématographiques, celle qu’il préférait était Le vampire de Düsseldorf en 1965 avec sa femme d’alors, Marie-France Pisier. Il a aussi dirigé Johnny Hallyday dans l’oubliable Point de chute en 1970.
Robert Hossein a donc rejoint Dieu. Lui qui s’était fait baptiser à l’approche de la cinquantaine. « J’ai vécu dans l’espoir de Dieu... », avait-il coutume de répéter. L’éternité se dresse désormais devant lui.
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