Le réalisateur du magnifique Josep, lauréat ce matin du prix du premier film 2020 de la SFCC, évoque pour Première son rapport à la critique
Quelle a été votre première réaction quand vous avez appris que Josep a été sacré meilleur premier film français de l’année par le Syndicat Français de la Critique Cinématographique ?
Aurel : Ce prix me touche tout particulièrement car ceux qui le décernent sont à cheval comme moi sur deux milieux, la presse et le cinéma. Je me dis que j’ai réussi ce pari de rendre hommage au dessin et je sais énormément gré au milieu du cinéma de le considérer comme un outil de cinéma. Car cette générosité n’existe pas forcément dans la presse qui considère le dessin comme un genre humoristique mais jamais vraiment comme un outil journalistique à part entière.
Quel rapport entretenez-vous à la critique comme spectateur ?
J’en consomme beaucoup car j’ai été éduqué comme ça. J’ai grandi dans une « famille Télérama » qui était très attentive aux têtes du petit Ulysse (rires). J’ai donc cette culture de me laisser guider par la critique. Quand je ne connais pas un film, j’aime bien regarder un panorama de regards critiques sur lui, sans tout lire de fond en comble, pour m’orienter. Et ce n’est qu’après avoir vu le film en question que je me plonge plus en détails dans les critiques pour prolonger le plaisir ou les interrogations, pour trouver des réponses ou des éclairages. Je suis donc un lecteur a posteriori
Et comme réalisateur, comment appréhendez- vous la critique ? Avez-vous cherché à tout lire sur Josep ?
J’ai évidemment suivi tout cela mais avec les pare- feu des attachés de presse du film. Je ne me suis pas précipité pour tout lire de A à Z, l’écho que j’en avais me suffisait. Et j’ai eu la chance que dans l’ensemble tout se soit très bien passé, à deux ou trois exceptions près. Mais étant un lecteur de presse averti, je ne suis pas dupe de certains de ses mécanismes.
JOSEP: LE FILM D'ANIMATION DE L'ANNEE 2020 [CRITIQUE]Certains cinéastes expliquent que même si 99% des critiques positives, ils se focaliseront sur le 1% restant qui les mineront. Ce n’est pas votre cas ?
Non. Au contraire, celle du Figaro qui était la plus mauvaise m’a fait beaucoup rire. Sans compter qu’ils ont eu la sympathie de ne traiter Josep qu’en cinq lignes et de ne perdre ni temps ni énergie à le descendre dans un long papier. Comme je l’ai dit à mes attachés de presse pour les dérider, cela ne me dérangeait absolument pas que Le Figaro n’aime pas un film qui parle d’un anarchiste espagnol (rires)
Quels sont vos coups de cœur de cette année cinéma, que les critiques ont pu vous inciter à aller découvrir ?
Les Choses qu’on dit, les choses qu’on fait. Car Emmanuel ne cherche jamais à être réaliste tout en traitant d’histoires on ne peut plus quotidiennes. Ce décalage - notamment dans les dialogues a totalement - marché sur moi. Mais aussi La Fille au bracelet de Stéphane Demoustier. J’ai trouvé ce film remarquablement interprété. Et pour moi qui ai beaucoup fréquenté les assises comme dessinateur et que ce sujet passionne, je trouve aussi l’univers particulièrement bien rendu.
Quel regard portez-vous sur cette drôle d’année que nous avons vécu ?
J’ai obtenu une reconnaissance que je n’avais jamais eu jusque là. Ca a quelque chose d’un peu déstabilisant mais surtout de très gratifiant. Ce fut donc une année de grand bonheur professionnel dont j’ai su profiter car il est fort possible que ça ne se reproduise pas de sitôt ! (rires)
Vous avez déjà l’après Josep dans la tête ?
Oui, j’ai déjà commencé à écrire un deuxième long.
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