Réactualisation du samedi 6 septembre à 19h50 : Alba Rohrwacher et Adam Driver ont remporté respectivement la coupe Volpi de la meilleure actrice et du meilleur acteur lors du 71ème festival de Venise.
Repéré avec La solitude des nombres premiers (2010), qui conjuguait maîtrise du récit, justesse de la direction d’acteur et un style fortement inspiré du giallo, Saverio Costanzo avait réussi à imposer son nom dans le cinéma italien. En présentant son dernier film cette année à Venise, le cinéaste confirme sa capacité à adapter des histoires fortes avec une voix originale et une grande subtilité. Situé à New York, Hungry hearts débute par ce qui est probablement la séquence de coup de foudre la plus incongrue jamais vue sur un écran. En refermant la porte qui mène aux toilettes d’un restaurant chinois, une Italienne solitaire (Alba Rohrwacher, encore) se retrouve coincée dans un espace minuscule avec une homme (Adam Driver, l’acteur montant) qui vient de déposer dans les toilettes d’à côté un souvenir assez odorant pour obliger la fille à se boucher le nez. Ces étranges et absurdes circonstances suffisent pour les rapprocher définitivement. Bientôt, ils sont mariés, et la naissance de leur enfant pose les bases d’un drame qui petit à petit, prend l’intensité d’un film d’horreur tout en restant dans un cadre totalement réaliste. De ce point de vue, la référence à Rosemary’s baby est non seulement pertinente, mais totalement assumée.
L’origine du conflit vient d’un désaccord trivial sur la façon d’alimenter l’enfant. La mère est végétarienne et essaie de le nourrir sans protéines animales. Le père est rationnel, et en constatant la mauvaise mine de son fils, il l’emmène chez le médecin qui diagnostique une malnutrition. La suite dégénère en crise de confiance, mais sans qu'ils ne cessent de s'aimer, l’un et l’autre restant foncièrement attachés. Le récit est subtilement écrit pour ne jamais imposer de vérité et laisse planer le doute sur qui a tort ou qui a raison. Les acteurs sont impressionnants. Adam Driver, déjà repéré chez les frères Coen, conjugue puissance et délicatesse dans un physique imposant. Alba Rohrwacher (incidemment la compagne du réalisateur), projette une dose adéquate de détermination et de fragilité.
La chute est brutale, imprévisible et logique, mais ne cède aucunement à la facilité comme c’est parfois le cas lorsqu’il faut régler le problème d’un personnage gênant.
Gérard Delorme
Le film, distribué par Bac Films, sortira au début de l'année 2015.
Commentaires