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  Mel le fou serait en négociation pour réaliser un film sur l’histoire de Judas Maccabée, héros de la résistance juive durant l’antiquité. Vu son passif et son fondamentalisme chrétien, ça pourrait quand même poser problème. C’est finalement le site Vulture qui résume le mieux cette affaire : “Mel Gibson fait donc un film pour ses plus grands fans : les juifs” et un peu plus loin :  “ça t’inspire quoi Lars Von Trier ?”. La nouvelle a mis le feu aux poudres hier soir et la presse US oscille ce matin entre ironie et interrogations. Le site Deadline annonçait que Mel Gibson - qui s’était un peu éloigné du showbizz après ses démêlés judiciaires - serait aujourd’hui en discussion pour écrire et même réaliser un film sur Judas Maccabée. Posez vos règles et vos crayons, un petit détour historique est ici nécessaire. Vers le deuxième siècle avant JC, alors que les rois Séleucides tentent de prendre le contrôle de la Judée et de la Samarie (entendez mettre au pas une région à forte identité culturelle et religieuse), une famille juive mène la rébellion contre le pouvoir central. Les Maccabées. Judas et ses frères vont se battre pendant des années, prendre le maquis, s’attaquer aux fonctionnaires grecs et défendre la Judée. L’épisode est connu. Il a inspiré les peintres (Rubens notamment), des romans, est célébré tous les ans lors de la fête juive de Hanoukkah et reste l’un des plus beaux moment d’action de la Bible (sérieux). On imaginait bien qu’Hollywood voudrait s’emparer de ce sujet et l’idée d’un film sur les Maccabées traine depuis quelques années sur les étagères des studios. Mais sous l’oeilleton de Mad Mel ?    Mel le fou, donc, qui ferait le portrait d’une des plus grandes figures de l’histoire juive, du héros rebelle qui résista aux envahisseurs grecs et à l’héllénisation forcée ? D’une certaine manière c’est assez cohérent. Judas Maccabée est le cousin juif de William Wallace, leader de la rébellion écossaise et héros de Braveheart - deux Oscars au compteur. Sa barbarie esthétique, son goût pour les langues mortes et la sauvagerie christique ou paienne a évidemment de quoi faire des étincelles avec un sujet pareil. Mais on ne doit pas oublier que Mel Gibson est aussi connu pour ses position idéologiques douteuses et son fondamentalisme chrétien hardcore. On parle bien de l’acteur bourré qui, au volant de sa voiture, avait eu des propos notoirement antisémite, de cet acteur aux convictions religieuses ultra-traditionnalistes qui, avec son Evangile de cellulo, avait repeint l’histoire du Christ en lettre de sang. OK, il ne faut pas confondre l’homme et l’oeuvre et loin de nous l’idée d’être les Sainte Beuve du cinéma. On rappellera juste que si sa Passion avait réussi à transformer le nouveau testament en objet de cinéma fascinant - en nanar gore franchement spectaculaire et osé - le film reprenait à son compte la vieille rengaine chrétienne des Juifs déicides, assassins du fils de Dieu. Que son film d’une violence extrême tentait de nous faire prendre les vessies antisémites pour des lanternes historiques. On a du coup le droit de se demander comment Gibson pourrait traiter cette figure historique centrale dans la constitution de l’histoire juive.Comme si ça ne suffisait pas, on apprenait également qu’un autre scénariste plancherait sur l’affaire : Joe Estzerhas, responsable de  Basic Instinct 1 & 2 ou Showgirls. On ne voit pas très bien le rapport entre la Judée antique et le pole dance, mais c'est finalement, la partie la plus intéressante du projet. Parce que quand il n'écrit pas sur les fantasmes macho et le stupre, Estzerhas, scénariste de génie, signe des films plus engagés comme La Main droite du diable de Costa Gavras ou Music Box (qui revenait sur les massacres nazis en Hongrie). Les deux hommes parviendront-ils à un équilibre entre fureur et orthodoxie ? Sauvagerie et historicité ?Le projet a désormais clairement un gout de souffre.