L'acteur de Taken se réinvente une nouvelle fois dans ce beau drame automnal, plus langueur que thriller.
Surtout, soyez prévenus : bien que The Secret Man - Mark Felt mette en avant Liam Neeson en big boss du FBI plongé dans le scandale du Watergate en 1974, ne vous attendez pas à un mélange de Taken et des Hommes du président où Neeson casserait la gueule à des journalistes en pantalon pattes d'eph'. Ni à une réactu neesonienne des Trois jours du Condor. The Secret Man, c'est évidemment le show de Liam (alias Mark Felt) qui vient de raccrocher son calibre -trop vieux pour ces conneries, comme il l'a fait savoir- et laisse à d'autres la tâche de flinguer les méchants. Le voilà derrière un bureau, costard impeccable, bras droit de J. Edgar Hoover. Mais là où Hoover est un monstre vieillissant, invisible car intelligemment situé hors champ (on ne le verra jamais du film, mais on en parle beaucoup), Felt est un chevalier en acier trempé, qui va se retrouver confronté à la fois à la disparition de son seigneur lige et au classique dilemme impensable : trahir pour la bonne cause.
Ainsi The Secret Man s'envisage plus comme un portrait physique et moral d'un G-Man presque trop incorruptible, honorable jusqu'à l'intransigeance, que comme celui d'un thriller 70s grisâtre. Pas de gunfights mais beaucoup de dialogues dans des bureaux, des portes qui claquent, des mensonges entre collègues, un rien de fatigue et de nostalgie qui traîne dans l'air alors que le règne des malfaisants (Nixon, Hoover) s'achève ; le bilan d'un homme qui rentre dans l'hiver de sa vie. Un feeling automnal autant souligné par la partition soupirante de Daniel Pemberton (l'un des meilleurs compositeurs actuels : Steve Jobs, Le Roi Arthur, Mal de pierres...) que par la mise en scène strictement classique de Peter Landesman, auteur déjà d'un très efficace Parkland (2013) qui dépouillait l'assassinat de Kennedy de toutes ses théories complotistes. Dans le même ordre d'idée, The Secret Man, adapté des mémoires officielles du vrai Felt, raconte l'histoire de Gorge profonde du point de vue du FBI -et donc des flics et du pouvoir. Ceci dit, il y a quelque chose de profondément inspirant et émouvant dans le portrait que Neeson fait du chevalier Felt, dans la lignée de son Qui-Gon Jinn et de son Godefroy de Kingdom of Heaven. Un rôle en forme de boussole morale dont on ressent plus que jamais la nécessité.
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