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On ne sait pas trop si on doit se marrer. Le type fout un peu la trouille. Slavia Fetisov, l’un des meilleurs joueurs de hockey devenu ministre des sports de Poutine, toise le réalisateur, se fout de sa gueule, l’ignore en jouant avec son portable, avant de s’arrêter, de le regarder agressivement. Et de lui faire un gros doigt. Ce sont les premiers plans de Red Army, un blocumentaire ou si on préfère, un doc - surexcitant sur le papier – qui devait chroniquer l’affrontement Est-Ouest à travers les compètes internationales de hockey. Les plans sur les entraînements de hockey, les matches, la formation (utilisant les techniques de danses et d’échecs) sont fascinants, mais très vite, Red Army enfile les clichés sur la Russie communiste et les Yankees cupides. Témoignages unilatéraux, mise en scène mal foutue, traficotage des images d’archives… Le film de Gabe Polsky devient un trompe-l'œil qui à force de vouloir en dire trop finit par ne rien raconter et se révèle incapable de tenir ses promesses de film de sport politique.Mais l’ennui véritable, c’est le piratage du film par Slavia Fetisov. Acteur brillant, filmé avec une désinvolture qui devient un peu malfaisante, il confisque le film, le transforme en plaidoyer pro domo. On sent pourtant la personnalité emmêlée de ce hockeyeur qui correspond d’ailleurs à la période trouble qu’il traverse : ombrageux, ambitieux (on ne se retrouve pas ministre des sports de Poutine comme ça), ses absences répétées et sa faconde, tout ça en font un type un peu inquiétant. Mais Polsky ne le remet jamais en cause (comme Schroeder face à Vergès dans L'Avocat de la terreur, par exemple) et lui offre au contraire une tribune. 15 minutes finales d’autodrome pures. A Cannes, Fetisov, complètement identique à sa version "cinéma", en convient à demi-mot dans un sourire : "Gabe m’avait montré une première version de son film. M’a pas plu. Je lui ai dit qu’on devait tout reprendre. On s’est revus, on a tout refait … Ce n’était pas la bonne façon de raconter l’histoire". Lui qui aurait dû n’être au mieux qu’un fil rouge hijacke le film et devient le héros de ce monument à sa gloire. Qui est loin d’être le dernier : "Il y a un téléfilm en quatre parties sur ma vie qui est en train de se tourner en Russie..." Le doigt d’honneur de Red Army, au fond, il est pour qui ? Le cinéaste ou le spectateur ?Bande-annonce de Red Army, présenté hors compétition au 67ème Festival de Cannes :