Le Théâtre de la Cité Internationale accueille actuellement le Cabaret New Burlesque où s’exhibent les « girls » de Tournée, le film de Mathieu Amalric. Mais au fait, le Burlesque, c’est quoi ?Ceux qui croient que le Burlesque est uniquement un genre cinématographique propre aux films muets de Charlie Chaplin et Buster Keaton, ne sont pas à la page. Ceux qui croient que Burlesque est un film (sorti en salles mercredi dernier) avec Cher et Cristina Aguilera en têtes d’affiche n’ont pas tort mais ce n’est pas tout. Ceux qui ont vu Tournée, le film de Mathieu Amalric primé à Cannes, ont eu un aperçu du genre, mais pas pour de vrai parce qu’au ciné, c’est pas pareil. Bon, alors le Burlesque c’est quoi ? Et bien, c’est du strip-tease, carrément mais pas complètement. Un strip-tease ludique à caution artistique, qui obéit à des codes bien définis. D’abord, c’est un look : port des strass et paillettes obligatoire, faux cils et maquillage de cocotte, talons vertigineux, bas résilles ou couleur chair, éventuellement boa ou éventail géant de plumes chatoyantes, gants de soie, corset et robe de princesse hollywoodienne vite enlevés pour laisser place aux « pasties » (ces cache-tétons scintillants souvent ornés d’un ponpon) et au string de rigueur. Mais attention, pornographie et vulgarité ne sont pas acceptés au domaine enchanté du Burlesque. Le corps est ici sujet fier de son propre show et non pas objet de voyeurisme dégradant. Car le Burlesque est aussi une attitude : celle d’une femme qui assume son corps tel qu’il est, en dehors des diktats de minceurs archétypaux et des canons de beauté photoshopés. Il affiche une femme décomplexée et heureuse de s’exhiber, maîtresse de son corps et de son show. Une attitude féministe au fond, même si son but premier n’est pas de revendiquer un message mais bien de partager du bon temps.Né dans les années 30 aux Etats-Unis, ce genre d’effeuillage glamour et coquin à visée ouvertement divertissante trouve son inspiration originelle dans les spectacles de music hall parisiens où se produisaient des artistes féminines indépendantes comme Colette. Erotisme raffiné, séduction travaillée, les bases du Burlesque étaient là. Les pin-up des années 50 ont pris le relai, laissant tomber le corset quand vint le vent de liberté de 68. Le Burlesque et ses accessoires fifties a été remis au goût du jour par la diva du genre, Dita Von Teese, dont la célébrité en a fait le porte-flambeau international. Mais il n’y a pas que Dita qui sait y faire et Gentry de Paris est une autre maîtresse en la matière. Les deux se sont d’ailleurs produites dans la même revue au Casino de Paris en 2009. Un show sur mesure, théâtralisé et chorégraphié, respectant tous les codes du genre.Depuis, le Burlesque s’infiltre partout et s’enseigne. Gentry de Paris a ouvert sa propre école, « L’Ecole supérieure de Burlesque ». Mais les cours se développent un peu partout dans la capitale. Juliette Dragon et ses Filles de Joie donnent désormais un rendez-vous de cours réguliers à la Bellevilloise pour apprendre les bases du striptease dans la joie et la bonne humeur. Pourquoi le Burlesque revient-il à la mode ? De quel phénomène de société est-il le révélateur ? Ce qui est surtout identifiable, c’est que le Burlesque se décline désormais en « New Burlesque », plus trash, plus décalé, plus créatif car moins formaté que le Burlesque pur. Un genre dérivé où chaque effeuilleuse laisse libre cours à sa personnalité de façon plus radicale. Il n’y a qu’à voir Le Cabaret New Burlesque qui se joue actuellement au Théâtre de la Cité Internationale pour prendre la mesure du phénomène. Les filles sur scène sont les vedettes du film Tournée, une bande de filles plantureuses et exubérantes qui parviennent à galvaniser les spectateurs d’un théâtre public à la programmation exigeante en montrant leurs fesses et roulant des seins. Inimaginable ? Mode passagère ou engouement véritable ?Pourquoi le New Burlesque fait-il salle comble ? Dans notre société contemporaine, marquée par le mouvement queer et les « gender studies » américaines, il est monnaie courante de questionner les genres (masculins et féminins) sur lesquels la société s’est fondée. Avec son expression d’une féminité exacerbée, jouant autant du corps que des attributs de parures (maquillage, bijoux, tenues), avec sa version d’un érotisme excentrique et bon enfant, avec sa mise en jeu du folklore américain (le pays du dollar, des cowboys et de Marilyn Monroe), les « performeuses » de New Burlesque, véhiculent au-delà du « fun » un comportement de femmes libres jouant de leur corps avec un plaisir assumé et utilisant à leur gré et à leur sauce les codes culturels qui nous façonnent. Leurs numéros exhibent les artifices de la féminité plus que la nudité, mettant en avant la « construction du genre » et donc reflétant de façon joviale un féminisme moderne et plein d’humour. Et comme chaque effeuilleuse imagine son show selon sa personnalité, la diversité des numéros proposés fait du New Burlesque un terrain d’expression idéal. Ainsi, divertissement pur et laboratoire artistique, archétypes et individualités, se côtoient sur un même plateau. Les éventails over size agitent un vent de liberté et de sensualité sur les chairs généreuses et mouvantes. Car avant tout, le New Burlesque est traversé par l’esprit festif de la danse. Pourquoi s’en priver ?Par Marie Plantin.>> Voir les photos du Cabaret New Burlesque !>> Réservez vos places pour le spectacle, Cabaret New Burlesque !
- Cinéma
- News Cinéma
- La Folie du Burlesque : Retour sur un phénomène qui ne date pas d’hier
La Folie du Burlesque : Retour sur un phénomène qui ne date pas d’hier
Commentaires