Voilà une belle année pour vous !Pour nous, car le théâtre, c’est vraiment l’art du partage. Ces deux pièces ont été montées par la même équipe artistique et c’était très riche de regarder travailler de grands acteurs, tels que Robert Hirsch et Fabrice Luchini. C’était d’autant plus intéressant pour moi que ces deux spectacles sont très différents : Le Père est une farce qui va vers l’émotion, alors que Une Heure de tranquillité est une vraie comédie dont l’objectif est clairement de faire rire.Le Père a été rédigé spécialement pour Robert Hirsch. Une commande ?On a dîné ensemble et je lui ai dit que je rêvais d’écrire pour lui. Il m’a répondu : « Deux fois on a écrit pour moi, et deux fois j’ai refusé. » Mais cela n’a pas suffi à me démotiver. Ce n’était donc pas une commande, mais bien un désir. Le point de départ, pour moi, c’est toujours l’admiration.Comment avez-vous abordé l’écriture pour ce grand comédien ?Un grand acteur, c’est comme un instrument. On le connaît, on a sa tessiture dans l’oreille. En fait, c’est très musical. Je voulais aller vers Robert Hirsch, et je l’ai toujours vu comme la conjonction très étonnante du clown et du tragédien. Et c’est en cherchant du côté de ce mélange de drôlerie et de douleur que s’est imposé à moi le thème de la pièce : un homme, tout au bout de sa vie, qui s’égare dans le labyrinthe de sa mémoire.Le Père aborde un thème sensible, or le public a répondu présent.On ne s’attendait pas à ce que le spectacle soit reçu avec autant d’enthousiasme. A quoi sert le théâtre, si tant est qu’il serve à quelque chose, sinon à proposer un miroir immédiat de la vie des hommes ? L’extrême vieillesse est un drame que l’on porte tous en nous. C’est le drame qui nous attend à titre personnel. Et je pense que c’est un sujet qui touche en profondeur notre société.Une Heure de tranquillité a été écrite pour Luchini ?Luchini, lui, dit qu’elle a été écrite pour Poiret. Et j’aime assez qu’il dise cela, parce que ce n’est pas totalement faux. Ce qui est vrai, c’est qu’en l’écrivant, je me disais souvent : « Si Luchini jouait ça, il serait parfait. » Mais je n’y croyais pas. J’ai quand même tenté ma chance…Et il a accepté !Le jour où il a reçu la pièce, il m’a demandé de passer chez lui, et nous l’avons lue ensemble. C’était un vendredi. Il m’a dit : « Tu crois que c’est possible demain avec des comédiens ? » J’appelle des amis et organise une lecture à la hâte. A 14h, après avoir lu la pièce, on va boire un verre et il me donne son accord ! En fait, il s’est décidé en quelques heures… C’est la magie du théâtre !Cette « heure de tranquillité » parle de quoi ?De quelqu’un qui a envie de faire quelque chose et qui en est empêché. Ce collectionneur a déniché le disque de jazz de ses rêves et désire l’écouter tranquillement. Or, tout le monde vient le déranger, sa femme, ses amis. C’est l’histoire d’un désir contrarié. Une accumulation de choses à la Feydeau qui surgissent pour faire obstacle. C’est une machinerie à jouer, à rire.Les deux pièces ont le même metteur en scène, Ladislas Chollat…J’avais vu ses spectacles, mais Le Père est notre première collaboration. Je suis autant impressionné par les qualités du metteur en scène que par celles de l’homme, qui d’ailleurs se rejoignent. Monter un spectacle, c’est se confronter à plein de difficultés, et Ladislas gère cela comme un capitaine de navire, avec humilité et intelligence. Il n’a jamais mis en scène de comédie pure, mais il possède le sens du rythme et de l’humour. Alors je me suis dit qu’on pouvait, l’un et l’autre, aller sur ce terrain comique qui n’est pas vraiment le nôtre.On ressent quoi devant ce succès ?Cela m’est déjà arrivé de sentir, dans une salle, que les choses ne prenaient pas toujours. Cela peut rendre très triste. Alors, à l’inverse, quand on sent que les gens reçoivent vraiment ce qu’on tente de leur proposer, comme c’est le cas par exemple du Père, alors c’est la plus belle récompense…
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