Affiches Films à l'affiche semaine du 6 novembre 2024
Metropolitan Filmexport/ Pyramide Distribution/ Jour2Fête

Ce qu’il faut voir en salles

L’ÉVÉNEMENT
THE SUBSTANCE ★★★★☆

De Coralie Fargeat

L’essentiel

Coralie Fargeat signe un film de body horror jusqu'au-boutiste et ultra-référencé qui dynamite tout sur son passage. A commencer par ses deux stars : Demi Moore et Margaret Qualley. Jouissif. Prix du scénario au Festival de Cannes. 

Reparti de Cannes avec un Prix du scénario, The Substance met en scène une « quinqua » (Demi Moore), ex-star de cinéma devenue vedette d’un show d’aérobic télévisuel que le producteur du programme décide de la virer du jour en lendemain pour caster une femme beaucoup plus jeune (Margaret Qualley). La paria reçoit dans le même temps une proposition louche qui ne se refuse pas : s'injecter une étrange substance qui va lui permettre de générer une sorte de double, une version améliorée d'elle-même, jeune et jolie, avec sa propre personnalité. Mais tous les sept jours, elle devra reprendre possession de son ancien corps pour éviter une dégradation irréversible de son apparence. On sait comment finissent les pactes faustiens. Très mal, en général. Et les deux êtres ainsi dédoublés vont très vite se livrer une guerre à distance. Mais la bonne idée est de raconter cette guerre d’un seul et même personnage physiquement clivé. Cette dualité permet au récit de dépasser sa simple visée politique (la rengaine usée jusqu’à l’os d’une société du spectacle et ses mirages, le féminisme triomphant...) pour se confronter à un défi purement organique de la représentation cinématographique. Et on en sort à la fois groggy et surexcité.  

Thomas Baurez

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PREMIÈRE A BEAUCOUP AIME

TROIS AMIES ★★★★☆

De Emmanuel Mouret

La parole chez Mouret n’est pas un simple accessoire, c’est même la raison d’être de ses films. Elle habille surtout physiquement et psychologiquement des personnages retenus prisonniers par des dilemmes moraux pleinement formulés. Art de la rhétorique où le hasard ne saurait être accidentel. Dans Trois amies, cette parole vient créer une tension directe entre les protagonistes. Joan (India Hair) hésite d’ailleurs à se confier à Alice (Camille Cottin) sur l’érosion de ses sentiments envers son compagnon. Dire, c’est incarner les choses et donc admettre qu’elles existent. Or le cœur de Joan ne saurait mentir, là où celui d’Alice s’accommode des circonstances. Dans ces Trois amies, tout rejaillit à la surface des lèvres, des corps donc du cadre. Les mots emplissent et étouffent l’espace. Trois amies se veut une variation sur le discours amoureux où chacun croise le fer avec sa propre conscience. La mise en scène fluide et élancée imprime une cadence foudroyante. Stimulant.

Thomas Baurez

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PREMIÈRE A AIME

L’AFFAIRE NEVENKA ★★★☆☆

De Iciar Bollain

C’est une affaire qui a impacté en profondeur la société espagnole. L’histoire de Nevenka Fernández, élue à la fin des années 90 à 25 ans conseillère municipale auprès d’Ismael Alvarez, un maire très charismatique, auprès duquel, après une brève liaison, elle va vivre l’enfer sur fond d’harcèlement. Sa parole à elle valant alors, dans ce premier cas de #MeToo politique du pays, bien moins que celle de l’édile. En s’emparant de cette affaire, Iciar Bollain entend redonner la parole à la victime qui eut à l’époque une majorité de l’opinion publique contre elle. Et c’est pourquoi la fiction – qui permet de vivre ce récit avec elle – paraît en effet la meilleure manière de s’en emparer, donnant à voir des moments qui n’auraient pas pu exister en documentaire, faute d’archives. Et l’aspect programmatique assumé du film en constitue un autre atout majeur, rappelant que dans ces affaires, les mêmes causes produisent toujours les mêmes effets aux mêmes moments sous le regard de ceux qui pensent que les femmes victimes l’ont bien cherché. Un film implacable et glaçant.

Thierry Cheze

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A TOUTE ALLURE ★★★☆☆

De Lucas Bernard

Tout part d’un coup de foudre, le temps d’une escale, d’un steward pour une officier de sous- marin tactique. Une idylle naissante brutalement interrompue par le départ en mission de la jeune femme que son prétendant va se mettre à suivre… embarquant dans le sous- marin, forcément interdit à des civils, pour le début d’un tour du monde sous- marin en vase clos. Pendant 90 minutes, les péripéties s’enchaînent sans temps mort en faisant fi de tout réalisme. Jouer à ce point l’absurde c’est évidemment prendre le risque de laisser des gens à quai, de ne pas toujours doser juste. A toute allure – sur lequel plane l’ombre de L’Homme de Rio - n’est pas exempt de ces scories mais rien ne vient entraver son rythme tonitruant qui sied parfaitement à Eye Haïdara et Pio Marmaï, dont la complicité très chien- chat crève l’écran.

Thierry Cheze

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AU BOULOT ! ★★★☆☆

De François Ruffin et Gilles Perret

Cette comédie-documentaire part d’un principe simple voire un peu racoleur, ce qui se répercute sur son entame quelque peu laborieuse. Député-cinéaste très médiatisé, François Ruffin s’est ainsi retrouvé en 2023 sur le plateau de l’émission Les Grandes Gueules face à l’avocate et chroniqueuse Sarah Saldmann qui a tenu des propos insultants envers les précaires et les travailleurs vivant au Smic et lui a proposé de tenter l’expérience de vivre avec 1300 euros pour mois. Le film est né de là et la caméra suit durant plusieurs journées Sarah Saldmann exercer sur le terrain et sous l’œil amusé de Ruffin des métiers difficiles comme auxiliaire de vie, découpeuse de poissons… Mais au-delà de ce dispositif médiatico- politique, les cinéastes donnent surtout la parole à de nombreuses personnes en détresse sociale qui confient leurs bouleversants parcours existentiels. Et Au boulot ! parvient à devenir, à force de précision et de qualité d’écoute, une puissante ode aux héros invisibles.

Damien Leblanc

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L’OMBRE DU COMMANDANT ★★★☆☆

De Daniel Völker

Le principe de L'Ombre du commandant est fascinant : parler au fils et au petit-fils de Rudolf Höss, le commandant d'Auschwitz -et personnage principal de La Zone d'intérêt. Face à ce docu à l'américaine, très « History Channel », aux effets appuyés, on peut débattre de l'utilité de cadrer la fumée d'une cigarette, alors que l'on vient d'évoquer celle qui sortait des cheminées des camps de la mort. Mais le projet reste fascinant, moins dans son rappel de l'horreur du passé que dans l'exposition des ténèbres qui traînent encore aujourd'hui : lorsque la fille de Höss, Puppi, devenue une aimable vieille dame vivotant sur la Côte Est américaine, se demande bien pourquoi il y a eu autant de survivants de la Shoah ou quand on voit le petit-fils de Höss, Kai, devenu un charismatique pasteur utiliser son terrible héritage familial pour prêcher la bonne parole auprès des soldats d'une base américaine...

Sylvestre Picard

VOYAGE A GAZA ★★★☆☆

De Piero Usberti

Fruit du séjour d’un jeune cinéaste franco-italien qui a passé trois mois à Gaza au printemps 2018, ce saisissant documentaire filme le quotidien de trentenaires palestiniens étouffés par la situation politique et par l’état de siège permanent imposé à la population. Au départ inspiré par le travail de recueil de témoignages réussi en 1963 par Chris Marker et Pierre Lhomme dans Le Joli Mai, Piero Usberti trouve finalement son propre style filmique et fait entendre en voix off ses poignantes réflexions personnelles sur les souffrances gazaouies. En diversifiant les thématiques et les portraits, ce film dont le montage s’est achevé une semaine avant l’embrasement mortel du 7 octobre 2023 porte un regard aussi tragique qu’universel sur une communauté de personnages s’apprêtant à se disloquer. Et la lumière éclatante captée par la caméra de devenir la triste incarnation d’un passé déjà lointain.

Damien Leblanc

HIDING SADDAM HUSSEIN ★★★☆☆

De Halkawt Mustafa

La Guerre d’Irak a déjà été raconté par le documentaire, à travers le film mémorial, et réécrite par le canon Hollywoodien (American Sniper). Le cinéaste kurde Halkwat Mustafa se risque à un nouveau genre avec ce docufiction sur les dernières heures du dictateur Saddam Hussein, caché chez un fermier en Irak. Par une simple interview on fait face à un Irakien modeste, vivant au fil des saisons, qui a caché l’homme le plus recherché du pays durant 4 ans. Le dispositif se nourrit de la question de la terre : quelle est cette terre, ce carré de terre cultivé, qui a résisté aux feux des Américains sans ciller, durant 4 ans, malgré la dissuasion militaire et les récompenses de 25 millions de dollars ? Ce questionnement introspectif, sur le paysan plus que le dictateur, est simple mais convainc par son vrai lyrisme qui mélange mélodies instrumentales, reconstitutions poétiques et found footage.

Romain Daum

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PREMIÈRE A MOYENNEMENT AIME

LOUISE VIOLET ★★☆☆☆

De Eric Besnard

Après Délicieux, Eric Besnard remonte de nouveau le temps vers la France de la fin du 19ème siècle et s’intéresse à la mise en place dans un village de campagne de l’Ecole de la République, gratuite, obligatoire et laïque tout juste instaurée. Alors que les récits autour de ces instituteurs chargés de cette mission, surnommés les hussards noirs de la République, mettent généralement en avant les hommes qui en constituaient l’immense majorité, Besnard a choisi, lui, comme personnage central une institutrice confrontée à une succession d’obstacles pour faire vivre cette révolution, marquant sa volonté de doubler d’un propos féministe sa célébration de l’idéal républicain d’une ascension sociale par le mérite. Mais, en dépit d’une interprétation solide, le résultat ne se hisse jamais vraiment au niveau de ces nobles intention. La faute à un scénario trop scolaire qui en surexpliquant tout, allonge un film qui aurait gagné à être grandement resserré.

Thierry Cheze

 

PREMIÈRE N’A PAS AIME

I FEEL FINE ★☆☆☆☆

De Austin et Hailey Spicer

Centré sur un adolescent qui souffre d’un trouble obsessionnel compulsif suicidaire, ce premier long métrage réalisé par un couple de cinéastes originaires de Floride tente de créer un mélange de tonalités qui aboutit pourtant à un assemblage de maladresses et de lourdeurs. Si la description d’une honorable communauté de parents et d’amis aimants prenant soin du jeune homme témoigne d’une volonté de faire coexister la tragédie et la croyance en la joie de vivre, les choix musicaux décalés et les effets stylistiques mimant un certain cinéma indépendant américain donnent l’étrange sensation que les cinéastes cherchent à produire un divertissement candide à partir d’une thématique grave et sérieuse. L’interprétation très limitée d’une partie du casting fait par ailleurs sonner faux bon nombre de séquences et l’émotion autour de ce groupe de personnages peine à prendre, faute de cohérence artistique.

Damien Leblanc

 

Et aussi

Here- Les Plus belles années de notre vie, de Robert Zemeckis

Oylem, de Arthur Borgnis

Les Reprises

Giorgino de Laurent Boutonnat

Madame de…, de Max Ophüls

Le Plaisir, de Max Ophüls

Sans lendemain, de Max Ophüls