Des tickets à 150 dollars pièce et des machines contrôlant les rêves des spectateurs : voilà une partie de l’avenir du cinéma suivant la boule de cristal de Steven Spielberg et George Lucas. Les deux amis, parmi les créateurs les plus célèbres de l’industrie du cinoche, étaient présents le 12 juin dernier à la fac de cinéma de l’USC (University of South California, là où ils ont fait leurs études et se sont rencontrés en 1967) pour une conférence sur l’état de l’industrie. Ils y ont ainsi exprimé leur vision de l’avenir du cinéma. Et son modèle actuel va à sa perte, d’après eux : la cause principale étant l’hypertrophie du budget des films de studio, ces derniers coûtant tellement cher que le moindre échec a des conséquences désastreuses."Il y aura sans doute une grosse explosion", prédit Spielberg dans ses propos rapportés par Variety. "Ou plutôt une implosion, lorsque trois, quatre ou six films de ces films aux budgets énormes se crasheront et on changera de paradigme pour de bon." Et vers quel nouveau "paradigme" se dirigera-t-on ? "Il y aura moins de cinémas, mais ils seront de plus en plus gros", estime Lucas. "Aller au cinéma pourra vous coûter 50, 100 ou 150 dollars, comme le prix d’un billet à Broadway ou celui d’un match de foot. Ca coûtera très cher…""On est arrivés à un point où un studio préfère investir 250 millions dans un seul film pour tenter de décrocher la timbale d’un coup, plutôt que de faire une myriade de projets plus intéressants, profonds et personnels qui risqueraient de se perdre dans la masse," analyse Spielberg. Qui a rappelé à cette occasion que son Lincoln, pas assez bankable aux yeux des gros studios, "était à deux doigts de devenir un téléfilm HBO" (tout comme Ma vie avec Liberace de Steven Soderbergh jugé "trop gay" pour les majors)…Une drôle de façon de tresser des couronnes à un système qu’ils ont contribué à bâtir. Elevés à la culture télévisuelle, George et Steven furent parmi les fossoyeurs à la fois de l’Ancien et du Nouvel Hollywood (les expérimentations auteurisantes des années 60-70) en édifiant à la fin des années 70 le système des blockbusters (pubs télé à gogo et merchandising, l’un avec Les Dents de la mer en 1975 et l’autre avec La Guerre des étoiles en 1977). Un système qui pourrait donc arriver en fin de cycle, d’après Lucas et Spielberg.La réalité s’arrête iciD’ailleurs, où en est Spielberg ? Malgré le succès de Lincoln (275 millions de dollars gagnés, un Oscar et un Golden Globe pour Daniel Day-Lewis), Les Aventures de Tintin n’a marché qu’à l’international (296 millions de recettes partout, contre seulement 77 aux USA) tandis que Cheval de guerre connaissait une carrière correcte (177 millions de recettes mondiales pour un budget de 66). Et Spielberg semble être revenu à des projets assez sombres : son blockbuster de SF Robopocalypse ayant été annulé (signe des temps, donc ?), il serait en train de monter American Sniper avec Bradley Cooper -biopic d’un tireur d’élite de l’armée américaine- ainsi qu’une série télé dérivée de l’univers de science-fiction militariste du jeu vidéo Halo.L’avenir se situerait plutôt du côté des jeux vidéos, et George a estimé à la même conférence que la manette classique sera dépassée et que "la prochaine étape est de contrôler vos rêves. Ca fera appel à une certaine zone du cerveau... Vous mettrez une sorte de chapeau ou vous vous connecterez à un ordi et vous créerez votre propre monde. Ca arruvera dans 10 ou 15 ans, ce n'est pas une vision délirante."Revenons quelques instants au présent : Lucas, après le flop de son film de guerre aérienne Red Tails (un de ses vieux projets), a vendu en novembre dernier sa société LucasFilm à Disney pour la coquette somme de 4 milliards dollars et a pris sa retraite -en attendant la nouvelle trilogie de la Guerre des étoiles avec l’Episode VII, prévu pour l’été 2015 avec J.J.Abrams à la réalisation et Kathleen Kennedy (bras droit de Spielberg) à la production. Verra-t-on un jour un film Star Wars (Disney en prévoit un par an à partir de 2015) modifiable par la pensée pour 150 dollars dans un cinéma hypertechnologique ?En attendant de savoir si les prédictions de nos Nostradamus d’Hollywood se vérifient ou pas, rappelons la devise de l’Ecole des arts cinématographiques de l’Université de Californie du Sud, sur les bancs de laquelle Lucas et Spielberg se sont rencontrés un beau jour de 1967 : limes regiones rerum. Soit, traduit du latin de cuisine, "la réalité s’arrête ici".Voir aussi : Google veut prédire le résultat des films au box-office
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Steven Spielberg et George Lucas prédisent la fin (ou presque) du cinéma
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