Jodie Foster a failli avoir un rôle clé dans The Game, de David Fincher

La comédienne a finalement été retenue sur Contact, de Robert Zemeckis, mais elle aurait adoré retrouver Michael Douglas sur ce thriller.

The Game reviendra en ce vendredi soir sur France 5. En fin d'année 1997, David Fincher avait surpris le public avec ce film à twists dans lequel un riche homme d'affaires reçoit un cadeau d'anniversaire surprenant. Joué par Michael Douglas, Nicholas Von Orton va plonger dans une spirale infernale à cause de ce concept dont il peine à comprendre les règles.

Aux côtés de la star de Basic Instinct, Sean Penn (L'Impasse) joue son frère, et Deborah Kara Unger (Crash) incarne sa femme. Mais le casting aurait pu être très différent : avant de choisir ces comédiens, David Fincher voulait initialement engager Jodie Foster pour interpréter un personnage clé de The Game. Rembobinons.

Au tout début des années 1990, la MGM reçoit un scénario très original signé John Brancato et Michael Ferris. Les enchères grimpent et c'est Propaganda Films qui récupère ses droits. Le réalisateur Jonathan Mostow (Breakdown) est alors engagé pour réaliser The Game avec Kyle MacLachlan, qui cartonne à l'époque grâce à Twin Peaks, et Bridget Fonda (J.F. partagerait appartement). Les prises de vue sont prévues pour février 1993, mais quand les droits du film passent au studio Polygram, le réalisateur jette l'éponge : il restera seulement producteur de ce projet dont le concept lui plait.

C'est un autre producteur, Steve Golin, qui fait alors passer le script à David Fincher, en espérant qu'il voudra le réaliser. Celui-ci aime bien son point de départ, mais il trouve que le personnage principal est trop "plat", alors il engage Andrew Kevin Walker, son scénariste de Seven, pour le rendre plus cynique. Après six semaines de réécritures, il apprécie l'évolution de son anti-héros, et accepte de faire de The Game son prochain projet.

Sauf qu'entre temps, Brad Pitt se révèle être disponible pour tourner dans Seven, qui devient sa nouvelle priorité. Le succès de ce thriller très sombre permettra à la production de The Game d'avoir un budget plus élevé que prévu, ce qui rassure Michael Douglas, qui avait hésité à accepter le rôle principal, sachant que PolyGram était un "petit" studio.

Seven sort au tournant de l'hiver 1995-1996, choque le public qui acclame son réalisateur, alors la firme profite de ce bon accueil pour teaser l'arrivée sur The Game de Jodie Foster. Présent au marché du film du festival de Cannes cette année-là, Polygram assure que la star du Silence des Agneaux fera face à Michael Douglas.

David Fincher est alors ravi de pouvoir diriger une actrice aussi populaire, mais il craint qu'elle ne soit déstabilisée par le fait que son rôle sera plus petit que celui de son partenaire de jeu masculin. Les deux comédiens ayant presque 20 ans d'écart, il est question de réécrire le script pour qu'elle incarne la fille de Nicholas Von Orton, sauf que cette idée ne plaît pas tellement à Douglas, qui préférerait qu'elle interprète sa sœur. Soit le personnage à l'origine de toute l'intrigue, puisque c'est elle qui offrirait à son personnage le fameux "jeu". Jodie Foster accepte cette idée, ravie de retrouver Michael Douglas après Napoléon et Samantha, qu'elle a tourné à ses côtés quand elle n'avait que 9 ans, et lui 28.

Cette différence d'âge aurait-elle profondément bouleversé la dynamique entre les deux personnages ? On ne le saura jamais, puisque Jodie Foster a finalement été retenue sur Contact, de Robert Zemeckis, ce qui l'a obligée à refuser l'offre de PolyGram. Cet abandon a par ailleurs entraîné un procès entre l'actrice et la boîte de production, à cause de leur accord conclu seulement oralement à propos de sa participation à The Game. En revanche, elle est restée en très bons termes avec son metteur en scène, et quand celui-ci s'est retrouvé sans star pour Panic Room (2002), sa comédienne Nicole Kidman s'étang blessée quelques jours plus tôt sur le plateau de Moulin Rouge !, elle a signé au pied levé pour en être l'héroïne. Elle a même abandonné la présidence du festival de Cannes 2001 pour accepter l'offre de David Fincher !

Jodie Foster n'étant plus de la partie, le jeu a repris avec un personnage de frère, et non de sœur. Jeff Bridges a été approché pour l'incarner, avant que l'acteur des Anges de la nuit n'accepte le rôle. La distribution telle qu'on la connaît est alors officialisée, et le tournage peut démarrer à San Francisco, principalement de nuit.

"Ce dont je suis le plus fier à propos de ce film, c'est que c'est l'un des rares dont on ne peut pas deviner la fin, dira Michael Douglas en 2015 à Collider. C'est pour cette raison que j'aime tellement le sport : peu importe le jeu, vous ne pouvez pas deviner ce qui va se passer. Alors que dans la plupart des films, à la moitié, on sait déjà comment ça va finir. Dans The Game, vous ne pourriez pas imaginer le dénouement. Sans compter que David Fincher est un réalisateur talentueux. Le tournage fut très compliqué, parce qu'il fut très long (une centaine de jours, ndlr), et filmé la nuit. Mais au final j'ai trouvé que c'était un film très bien fait, inattendu et aujourd'hui encore, on me dit qu'au sein de ma filmographie, c'est un film que les gens aiment beaucoup."

Chez Première, si l'on reconnaît que le metteur en scène a pris soin de son esthétique, on est resté de marbre face au fameux twist. Sans le spoiler, on écrivait ainsi dans notre top des films de David Fincher, qu'il s'agissait de l'un des éléments les plus faibles de toute sa carrière :

"Il y a tant de choses à admirer dans The Game : la magnifique photo chromée de Harris Savides, la puissance minérale de Michael Douglas dans le dernier grand rôle de son âge d’or, l’indéniable frisson d’excitation quand la machine du "game" s’emballe, les fils psychanalitico-cinéphiles qu’y entremêlent David Fincher autour du rapport au père, à San Francisco et à Citizen Kane… Mais par n’importe quel bout qu’on prenne ce film, on en revient toujours au même problème : ce "twist" nul (on ne disait pas encore "déceptif" à l’époque) qui fait s’effondrer le château de cartes méticuleusement mis en place. Un ratage. Somptueux, certes, mais un ratage quand même."

On est peut-être un peu dur, mais il faut dire que Fincher l'est aussi : en 2014, le cinéaste expliquait à IndieWire qu'avec sa femme et productrice Cean Chaffin, ils étaient en désaccord à propos de The Game, et que rétrospectivement, il considérait qu'elle avait raison et qu'il avait raté sa fin.

"Elle a toujours été franchement virulente envers The Game. Elle m'avait carrément conseillé de ne pas le faire. Après coup, je dois le dire : ma femme avait raison. On a pas réussi à s'en sortir avec le troisième acte, et c'était de ma faute, car je trouvais ça plus marrant d'y aller à fond, je pensais que ce serait libérateur. C'était une erreur. Vous savez, en tant que spectateur, j'aime quand on ne sait pas où un film va. Ces derniers temps, c'est difficile de surprendre le public à ce niveau-là. Les gens voudraient voir tout le film dès sa bande-annonce de 90 secondes. Personnellement, j'aime anticiper l'énergie du public qui attend qu'on dévoile quelque chose, le pousser à se dire : 'Bon, il y a un truc particulier avec ce mec, on ne sait pas jusqu'où ça pourrait aller.'"

Voici la bande-annonce de The Game, à revoir ce soir sur France 5 :