Première
Trois ans que les amateurs de films d’animation et de mangas l’attendaient. Le nouveau long-métrage du Japonais Masaaki Yuasa, l’ovni Inu-Oh ne devrait pas les décevoir. Celui qui fut révélé il y a bientôt vingt ans avec Mind Game, et qui a déjà signé les mélodieux Lou et l’Île aux sirènes (2017) et Ride Your Wave (2019) met à nouveau à l’honneur la musique dans Inu-Oh. Cette fois, il adapte le roman Le Roi chien de Hideo Furukawa, publié en France en février dernier (éditions Philippe Picquier), collaborant avec le mangaka Taiyou Matsumoto pour la deuxième fois.
Dans le Japon médiéval du XIVème siècle, une créature maudite nommée Inu-Oh rencontre un savant joueur de Biwa (un vieux luth japonais) aveugle, Tomona. Ce dernier joue quelques notes de musique et Inu-Oh se découvre un insolite instinct de danseur. Les deux se lient d’amitié. Et soudain, à mi-parcours, l’intrigue bascule. Lors d’une longue scène musicale (30 minutes), les dessins s’animent, les corps s’emballent et dansent (« breakdancent » même), les voix entonnent des refrains rock sur des riffs de guitare électrique. Le conte gentillet devient un pur opéra rock. Formellement, le film d’animation est impressionnant. Riche, innovant, hybride. Il mêle des traits de crayon précis et des étalages de gouache aux couleurs vives, des morales bienveillantes et des dialogues pudiques. Et élève la danse au rang d’exutoire libérateur. C’est poétique, historique (d’aucuns diraient nostalgique), sensible, étonnant, dynamique et l’on en passe. Vertigineux.
Estelle Aubin