Toutes les critiques de Fario

Les critiques de Première

  1. Première

    C’est un jeune homme qui a perdu le désir, dans tous les sens du terme. De faire l’amour, d’abord : on le voit renoncer piteusement à coucher avec une inconnue rencontrée au hasard d’une soirée techno parce qu’il n’a pas d’érection. Puis, on le comprend peu à peu, Léo n’a plus vraiment envie de vivre non plus. Un matin, ce héros à la mélancolie flagrante doit quitter Berlin pour rentrer dans son village natal du Doubs et vendre les dernières terres de son père agriculteur, qui s’est suicidé quelques années plus tôt. Sur place, plus rien n’est comme avant. Sa bande d’amis a changé, sa famille a renoncé à vendre ses terres au promoteur immobilier qui voulait acheter. Leur activité, polluante, est dénoncée par les agriculteurs du coin. Indécis, Léo se laisse vivre. Jusqu’au jour où il voit des farios — une race de truite, qui donne son nom à ce beau premier film — mutants, nager dans la rivière. La pollution, sans doute.  Avec ce conte d’eau douce, Lucie Prost compose une délicate réflexion sur la place que nous occupons dans le monde. Il y a la manière dont le héros (Finnegan Oldfield, lumineux) réinvestit sa propre communauté, la place des jeunes générations dans ce tumulte et enfin, la raison d’être de ce film, le rapport de destruction que les hommes entretiennent avec la nature et le vivant autour d’eux. Autant de questions brûlantes d’actualité que la jeune réalisatrice met en image avec beaucoup de mystère et un peu de magie. Un mélange décidemment fertile. 

    Emma Poesy