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Christophe AUBERT / TELE 7 JOURS / SCOOP
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Jean-Jacques DESCAMPS / TELE 7 JOURS / SCOOP
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Christophe FILLIEULE / GILBERT ET MARINETTE / FRANCE5

Bernard de le Villardiere

« J?avais 10 ans. Je vivais à Gênes, en Italie, où mon père était en poste. C?est la première fois qu?il nous parlait, à mon frère et moi, de politique, comme à des adultes. Il se demandait si la France n?allait pas devenir une république populaire ! Nous sommes donc partis au Liban sans passer par la France. Dix ans plus tard, je faisais partie du mouvement hippie.»

Bruno Gaccio

«J?avais 11 ans et je travaillais ! Il n?y avait plus classe. Je faisais donc des trous dans des fiches cartonnées pour l?imprimerie où était employée ma mère, à Saint-Etienne. Elle n?était pas gréviste car elle n?avait pas le choix, mais elle pensait qu?il fallait changer le monde. Je me souviens aussi qu?il n?y avait plus d?essence et que mon père, maçon, râlait.»

Catherine Laborde

« J?avais 16 ans et j?étais en terminale littéraire, au lycée de jeunes filles Camille Jullian à Bordeaux. Nous revendiquions le droit de fumer à la récréation et l?autorisation de faire entrer les garçons dans la cour. Je me souviens m?être sentie toute petite, dans mon imperméable bleu trop grand, lors des manifestations de rue. Mai 68 m?a fait mûrir d?un coup. J?ai pris conscience du combat pour la conquête de la liberté. Mon père me voyait prof d?anglais, comme lui. Moi, je voulais être comédienne. J?ai mené de front une licence d?anglais et le Conservatoire de Bordeaux. »

Daniel Picouly

«J?étais alors étudiant en droit à Assas. Je venais de la cité Million, à Orly. La rencontre avec le monde germanopratin fut un choc culturel. Je n?ai pas adhéré aux valeurs soixante-huitardes. Pour moi, c?était un mouvement bourgeois. Je ne contestais pas l?autorité des parents J?aimais les miens, conscient des efforts qu?ils faisaient pour mes frères et moi? Effrayé par l?intolérance et la violence de certains contestataires, je ne comprenais pas ces étudiants nantis qui crachaient sur leurs pères. Instruit par l?histoire de Robespierre, Danton et Saint Just, je me méfiais. Les héros des barricades pouvaient très bien se muer en criminels de masse.»

Franz-Olivier Giesbert

«J?étais étudiant en droit à la fac de Rouen. Je n?ai pas participé aux événements, car je n?étais pas fasciné par les idées gauchistes. À l?époque, j?étais déjà social-démocrate. Le bruit a couru que j?avais été trotskiste. En fait, j?ai été raflé par la police en compagnie d?une militante de ce mouvement que j?étais en train de draguer.»

Gerard Holtz

« Je me souviens des parcours en Mobylette, entre mon domicile à Belleville, Arts et Métiers ?où je fabriquais des bracelets-montres avec mon père?, le BHV ?où je vendais des disques? et l?université d?Assas, où je suivais une deuxième année de droit. J?assistais aux AG de l?UNEF, mais je ne lançais pas de pavés sur les barricades. Un jour, avec les copains, on est tombé sur un barrage policier. Là, un flic m?a visé à tir tendu. Hors de moi, j?ai pris un chiffon et lui ai renvoyé sa grenade. Il y a prescription? »

Guillaume Durand

« J?étais en seconde, au lycée Janson de Sailly à Paris. Je n?appartenais à aucune organisation d?extrême gauche, mais j?ai beaucoup participé au mouvement et regardé avec cette curiosité ce qui a abouti à mon métier de journaliste. Mon père avait une galerie d?art au Quartier Latin et je connaissais bien le milieu des artistes. Ils se sont réveillés un matin au bord de la révolution, et ça m?a donné un regard très ironique sur cette époque. Ce qui m?a le plus marqué, c?était les manifestations quotidiennes et le fonctionnement de la société par ce qu?on appelle maintenant le buzz.»

Karine Le Marchand

«Je suis née à Nancy, en 68. Mes grands-parents ont vécu les événements comme les prémices d?une guerre civile. Ils se préoccupaient plus de stocker beurre et sucre que de philosopher. Elevée par des femmes, j?ai baigné dans le féminisme et je suis par nature contestataire. Ma mère nous a toujours permis d?argumenter et a été, pour moi, davantage une copine.»

Mademoiselle Agnes

« Je suis née à Pau fin 68, dans une famille d?origine tunisienne, à mille lieues de la révolte de Saint-Germain-des-Prés et de ses barricades. Mon seul regret est de ne pas avoir eu 20 ans à l?époque pour participer à la rébellion. L?idée de porter une grande robe à fleurs et des nattes et de vivre en communauté me plaît beaucoup, un rêve qu?on est nombreux à partager. »

Nelson Monfort

« J?avais 13 ans. J?étais pensionnaire dans un collège en Suisse, donc bien loin de tous ces événements. 1968 m?évoque avant tout l?assassinat de Robert Kennedy. Ce 5 juin, une partie de ma jeunesse s?en est allée. À la disparition de John Kennedy, j?étais trop jeune. Mais son frère, lui, me faisait rêver. Son action aurait pu changer l?histoire de l?Amérique et celle du monde. L?autre souvenir, ce sont les JO d?hiver de Grenoble? »

Paul Amar

«J?avais 18 ans. J?étais élève de terminale dans un lycée de Lyon. J?ai pris une part active dans les événements. Mon engagement n?était pas politique. On souffrait surtout du déficit de relations entre profs et élèves. J?ai été nommé président du Comité d?Action Lycéen de la ville de Lyon. L?événement qui m?a le plus marqué se déroula lors d?une manifestation. Pied-noir d?Algérie, j?avais acquis une méfiance naturelle vis-à-vis des attroupements populaires. En voyant dans le cortège, tous ces gars vêtus de noirs, j?ai senti que quelque chose ne tournait pas rond. J?ai remonté le cortège et demandé à tous les lycéens de se disperser et rentrer chez eux. À hauteur, du pont Lafayette, un manifestant a lancé à toute vitesse un camion contre les forces de l?ordre après avoir sauté de la cabine. Il y a eu un mort parmi les gardes mobiles. Le seul de mai 68. »

Philippe Gildas

"J'étais rédacteur en chef des journaux du matin sur RTL. Je me levais à 3h00 et je voyais dans les rues les traces des combats de la veille. Le 10 mai, je suis parti à Quiberon, Je m'occupais de la mise à l'eau de Pen Duick IV, le bateau d'Eric Tabarly. Ensemble, on a découvert les événements du 10 mai dans une auberge bretonne. J'ai également raté la journée du 30 mai puisque nous étions partis pour la course à Plymouth"

Patrick Poivre d'Arvor

« J?étais étudiant à Sciences-Po et aux Langues? O. Mai 68 fut un moment d?excitation incroyable. Des barricades de la place Maubert, je renvoyais aux CRS leurs grenades lacrymogènes. Pour gagner ma vie, je vendais à la criée Le Monde et France Soir. Dans la rue, je croisais les reporters d?Europe 1 et RTL. Ça été le déclic pour devenir journaliste, et non diplomate, mon choix initial. »

Serge Moati

« Je faisais mon service militaire au Niger, trois années dans le cadre de la coopération comme assistant du cinéaste ethnologue Jean Rouch. Rentré en France le 30 mai, j?ai vécu la fin du mouvement. J?arrivais d?un pays très pauvre, où les gens souffraient de la faim, et je ne comprenais pas les mobiles de cette révolte, même si j?étais de tout c?ur avec les manifestants?»