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The Grand Budapest Hotel sera diffusé ce soir sur TMC.

TMC proposera ce soir à 20h55 le plus grand succès de Wes Anderson en France : The Grand Budapest Hotel. Avant sa sortie, début 2014, Première avait rencontré le réalisateur pour parler un peu de son univers si particulier.

 


Pourriez-vous nous dire ce qui vous lie à l'Europe et à Paris en particulier ? J’habite New York mais je viens régulièrement ici car j’y ai cet appartement. J’adore parce que c’est complètement différent du Texas où j’ai été élevé. Chez vous, tout ressemble à une aventure, ne serait-ce que sortir pour aller prendre un petit déjeuner. Avant de m’installer dans cette ville, je ne la connaissais qu’à travers les films, ceux de Marcel Carné ou de la Nouvelle Vague. Pour moi, Paris est autant un décor de cinéma que Monument Valley pour vous. Et puis ça faisait plusieurs années que je voulais tourner en Europe.

À en juger par le nombre de plans élaborés en studio, on dirait que vous aimez bien les artifices... Détrompez-vous, nous avons eu très peu recours au studio, à part pour construire quelques modèles réduits à Babelsberg. The Grand... a été tourné à Görlitz, en Haute-Saxe. Beaucoup de décors ont en réalité été réalisés sur place. Par exemple, le hall de l’hôtel, cette espèce d’atrium avec des escaliers, fait partie d’un grand magasin de Görlitz, à l’intérieur duquel nous avons construit des murs afin qu’il ressemble à un hôtel. Nous avons procédé ainsi avec presque tout, en adaptant des lieux existants ou en combinant des choses créées de toutes pièces avec de vrais endroits. La piscine et les bains, par exemple, sont réels.

The Grand Budapest Hotel, un miracle de Wes Anderson

Ca marche très bien car on ne fait pas la distinction entre le vrai et le fabriqué. Avec le recul, voyez-vous une grande différence entre ce que vous imaginiez pendant l’écriture du scénario et le résultat ? Quand je travaillais sur le script, je n’imaginais tourner qu’en décors naturels, mais en cours de production, de nouvelles idées se sont imposées. Par exemple, nous avons longtemps cherché un hôtel. Cependant, plus je me documentais et plus les images se précisaient dans ma tête, ce qui m’a amené à faire construire les choses exactement comme je les imaginais, quitte à utiliser des décors peints ou des modèles réduits. Pour l’ambiance, nous nous sommes aussi inspiré des tableaux du peintre Caspar David Friedrich.

À propos de peinture, d’où vient le portrait que tout le monde convoite dans le film ? Il a été conçu par Michael Taylor, un artiste anglais dont nous avons trouvé certaines œuvres sur le site de la Royal Society of Portrait Painters, qui rassemble les travaux de plus de cinquante portraitistes anglais. La plupart sont exposés à la National Portrait Gallery, un musée londonien que j’ai toujours aimé. Nous avons donc demandé à Taylor de créer un portrait spécialement pour le film, en prenant pour modèle quelqu’un que nous avons sélectionné et habillé d’une certaine manière. Dès que le script a été prêt, j’avais deux priorités : mettre immédiatement les directeurs de casting au travail pour trouver l’interprète de Zero (le groom joué par Tony Revolori), puis lancer la réalisation de ce tableau, dont je suis satisfait. Je savais par expérience qu’un tel travail peut prendre beaucoup de temps, c’est pourquoi nous avons demandé au peintre de commencer au moins huit mois avant le début du tournage.

Lorsque Ralph Fiennes (qui interprète M. Gustave, le concierge) embarque le tableau, il le remplace par une œuvre d’Egon Schiele. Ironiquement, vous n’accordez aucune valeur à cette dernière... Le fait est qu’avec le temps, la plupart de ce qui se trouve dans le château du film est appelé à prendre beaucoup de valeur, mais au moment où se situe l’action, les auteurs de ces toiles ne sont pas encore connus. Pour cette scène, nous avons dû créer notre propre Schiele.

A-t-il vraiment été question que Johnny Depp incarne le concierge ? Ce n’est qu’une rumeur. Dès le début, nous avons écrit le rôle pour Ralph. J’ai du mal à imaginer quelqu’un d’autre. Le personnage est très volubile, il fait de grands discours. Peu d’acteurs sont capables de jouer ça. Je me suis toujours dit qu’il fallait un Anglais pour interpréter M. Gustave, or je connaissais un peu Ralph et je cherchais à travailler avec lui depuis longtemps déjà.

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Une grande part de l’énergie qui se dégage du film provient du texte. Comment écrivez-vous ? Avez-vous eu du mal à trouver le bon rythme ? Je ne sais pas, mais l’important est avant tout de déterminer la façon de parler d’un personnage avec ses particularités. Dans ce cas précis, je me suis inspiré de quelqu’un que je connais. À partir de là, je n’ai eu aucun mal à écrire les dialogues. De même pour les vers que récite M. Gustave – dans le film, il a cinq extraits de poésie à déclamer.

Pour revenir à l’aspect visuel, la majeure partie du film est au format carré. Avez-vous fait ce choix pour rester fidèle à l’époque ?C’était un peu l’idée, mais ça faisait aussi un moment que je voulais tourner dans ce format qui me plaît beaucoup. C’est en quelque sorte le cadre le plus naturel pour le cinéma parce que c’est l’apparence qu’il a sur le négatif. C’est aussi un bon outil pour filmer les acteurs. Au fil du tournage, l’équipe caméra s’est très bien accommodée de cette forme inhabituelle, au point de s’y attacher et de souhaiter l’utiliser plus souvent. J’avais essayé de tourner mon premier long métrage en 4/3, mais sans succès car il n’aurait pas été possible de l’exploiter. Aujourd’hui, une fois transférés en numérique, les films sont projetables dans tous les formats imaginables.

Quel effet ça vous fait de voir qu’un livre (The Wes Anderson Collection) est consacré à votre carrière alors que vous êtes toujours en vie ? C’est assez étrange parce que même si mon nom est sur la couverture de cet ouvrage, ce n’est pas moi qui l’ai rédigé. Je connais l’auteur, Matt Zeitz, depuis plusieurs années et je lui ai accordé des interviews pour ce livre. Il a écrit des essais sur tous mes films, qui les mettent chacun en valeur, et a fait réaliser des illustrations pour l’occasion. Le travail qui a été produit est très bon et c’est assez plaisant de voir le résultat.
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