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Le Réveil de la Force rend joliment hommage à la trilogie originelle et donne confiance en l’avenir grâce à une relève sacrément prometteuse.

"C’est comme un concert. Vous voulez écouter les nouveaux morceaux mais, surtout, vous voulez entendre les anciens tubes". Un cliché, énoncé qui plus est par Kathleen Kennedy, présidente de LucasFilms et chef d’orchestre du Réveil de la Force. Il ne s’agit donc pas tant d’une vérité profonde que d’une note d’intention. Ça n’en reste pas moins vrai. 32 ans après Le Retour du Jedi, c’est ça qu’on attend : retrouver les personnages que l’on connaît, renouer avec la plus grande légende de l’histoire du cinéma. Celle qui a bercé notre enfance ou dont on a tant entendu parler en grandissant. On sera ravis de faire de nouvelles rencontres mais ce n'est pas pour eux qu’on achète notre place. Han, Luke, Leia. Ils ont vieilli, beaucoup, et leurs visages ridés, leurs chevelures grisonnantes ne font qu’amplifier la puissance émotionnelle de ces retrouvailles. Oui, en allant voir le nouveau Star Wars, on veut entendre les anciens tubes. Le Faucon Millenium, les cris de Chewie, les bips de R2-D2, les mauvaises jokes de C-3PO, les voyages en vitesse lumière, les planètes désertiques, les soleils couchants, les combats dans l’espace, les sabrolasers, le bruit des blasters – la musique de John Williams. Y’a tout ça dans Le Réveil de la Force. Et même un peu plus. Car – dans les limites respectueuses que J.J. s’est fixé – on peut faire un peu de neuf avec du vieux.

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Le passage de flambeau

Géré avec une infinie délicatesse, presque avec pudeur, le mythe est donc intact. Mieux, il est réintroduit en tant que tel : un mythe, une légende qui a bercé les jeunes héros du film. Lorsque Rey (Daisy Ridley) et Finn (John Boyega) rencontrent Han Solo (Harrison Ford) pour la première fois, ils sont dans la même position que le spectateur, celle de la vénération, et de l’envie d’y croire : "Vous êtes le fameux Han Solo ? Celui qui a combattu aux côtés de Luke Skywalker ?", - "Vous voulez dire que la Force, les Jedi, c’était vrai ?" - "Tout était vrai". J.J. Abrams, dont une des grandes qualités est de savoir si bien garder contact avec les émotions de cinéma de l’enfance (souvenez-vous de Super 8), met constamment en abîme ces grandes retrouvailles. Le Réveil de la Force dialectise non seulement le rapport du public à la légende, mais aussi l’idée de la transmission. De l’hommage respectueux de l’héritier au patriarche. Dans un univers peuplé de maître et de jeunes padawans sur qui pèse depuis toujours la malédiction des Atrides, les symboles sont faciles à placer : la filiation et l’héritage sont les enjeux centraux du film qui met plusieurs fois en scène des passages de flambeau.

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Les nouveaux héros

La mission est de taille pour les héritiers qui devront perpétuer la légende. Et c’est l’autre grande réussite du Réveil de la Force : la noblesse, la bravoure, l’humanité et la coolitude, aussi, coulent dans les veines de cette nouvelle génération. Daisy Ridley, le sosie de Keira Knightley, crève l’écran. Cette pilleuse d’épaves solitaire, warrior livrée à elle-même sur une planète hostile qui doit apprivoiser son destin, poursuit à la fois l’héritage de Luke Skywalker et des figures féminines de la saga. On ne développera pas trop sur le personnage d’Adam Driver, étonnant méchant, plus nuancé que son illustre prédécesseur. Oscar Isaac, pilote virtuose et tête brûlée, atteint presque immédiatement le niveau de coolitude de Solo – et encore, il n’en est qu’à l’échauffement avec quelques scènes que l’on espère voir multipliées dans la suite. John Boyega, le fameux Finn, est quant à lui une des seules idées vraiment neuves du film de J.J., et une belle : un stormtrooper repenti, l’humain derrière le casque blanc et froid, qui parvient à susciter de l’émotion avant même de l’avoir retiré, dès l’ouverture. Last but nos least, le déjà célèbre BB8, qui faisait il y a quelques semaines la Une de Time Magazine, est réellement une des stars du film. Encore plus touchant que R2, encore plus "humanisé" que C3PO, le petit robot (dont on n’a pas réussi à vérifier s’il était vraiment une fille) est un peu le Wall-E de cette galaxie très très lointaine et imprime instantanément sa marque – y compris dans les magasins de jouets, ce qui fait aussi partie du jeu.

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Alors Abrams s’est peut-être "contenté" de rejouer Star Wars, comme on compile des vieux tubes, introduisant prudemment des nouveaux morceaux au doux air familier et tentant à peine quelques notes inédites (dont on apprécie le son). Mais l’ensemble ressemble furieusement à un best-of.