C'était le film le plus attendu du festival de Cannes 2011. Le retour d'un cinéaste culte avec un film que tout le monde comparait déjà au 2001 de Kubrick. On a vu Tree of Life. Alors ? Hué par une partie de la salle et (un peu) applaudi, le film a divisé le festival. Et la rédaction.CONTREQuelle déception. Avec Tree of life, Terrence Malick a manqué son 2001, l’odyssée de l’espace. L’épopée métaphysique du réalisateur des Moissons du Ciel, film star de la compétition cannoise cette année, ne comble pas la formidable attente qui s’était créée autour du film. Le film s’ouvre pourtant par un sidérant ballet voltigeant dans l’espace et le temps entre Big-Bang et modernité urbaine, ovules et dinosaures, ciel, terre et mer.  Puis la caméra omnisciente de Malick, en mouvement perpétuel, attarde sa folle course cosmogonique sur la chronique tragique d’une famille du Sud des Etats-Unis.  Jack, l’aîné d’une fratrie, a un rapport difficile avec son père, incarné par Brad Pitt. Autoritaire, individualiste, chantre de la loi du plus fort, il est l’exact contraire de son épouse, femme d’une grande douceur jouée par Jessica Chastain. Le couple est chargé d’illustrer à l’écran l’antagonisme entre nature et grâce, que Malick va chercher à résoudre en épousant le regard innocent, donc divin, de Jack (joué par Sean Penn à l’âge adulte) le temps d’une longue méditation sur la vie et la mort. Mais le réalisateur ne parvient pas à réitérer le miracle de ses précédents films, qui mêlaient de manière si sublime les destinées tragiques de ses personnages avec l’ordre naturel, via la grâce, qui les transcendaient. En voulant embrasser une sorte de Totalité absolue, l’ambitieuse odyssée familiale et cosmique de Tree Of Life parait paradoxalement repliée sur elle-même, dénuée d’humanité. Comme si, à trop le regarder, Malick s’était extrait du monde.Par Eric VernayPOURL’un des films les plus attendus au monde , Tree of life va très probablement donner du grain à moudre à tous ceux qui s’apprêtent à brûler Terrence Malick après l’avoir adoré. Sitôt le sujet exposé  (comment faire le deuil d’un fils -ou d’un frère, selon le point de vue- mort à l’âge de 19 ans), le film digresse étrangement pendant une vingtaine de minutes avec ce qui ressemble à un montage d’extraits de documentaires naturalistes qui, sans les commentaires mystiques en voix off, évoquent l’idée qu’on se fait  d’un trip au LSD. Malick va probablement se faire lyncher pour avoir voulu établir un lien entre ces visions cosmiques et l’histoire qu’il  raconte. Elle décrit essentiellement la vie de famille du point de vue du fils aîné, qui souffre encore plus que ses frères de l’autorité écrasante du père (Brad Pitt) . En liant l’infiniment grand et l’infiniment petit, Malick  ne fait que proposer une solution mystique au deuil. On peut adhérer ou non. Mais il est difficile de nier la stupéfiante capacité du cinéaste à évoquer l’enfance d’une façon purement sensorielle, avec des moyens purement cinématographiques. Magistralement photographié, le film est traversé de moments fulgurants qui témoignent d’un niveau de maîtrise stratosphérique que plus personne, depuis que David Lynch a pris une semi retraite, n’est actuellement capable d’atteindre.Par Gérard Delorme