Fotogenico
JHR Films

A travers la quête éperdue d’un père sur les traces de sa fille morte, ce film électrise tout sur son passage : le cadre, les êtres, la musique et Marseille.

Au cinéma, les occasions de ressentir les vibrations d’un espace - rêvé ou pas - sont trop rares pour avoir envie de rester lover dedans quand l’occasion se présente. Hasard du calendrier, on a découvert Fotogenico lors du dernier Festival de Cannes où il paradait discrétos à l’ACID le même jour que L’Amour ouf rutilant de partout et où il réussissait, tout aussi coloré, saturé de néons et de musiques que le film de Gilles Lellouche à faire magistralement jaillir territoires et personnages. Le film délivre une énergie purement existentielle entendue qu’elle s’incarne dans tous les pores du cadre jusqu’à étreindre viscéralement le spectateur.

On entre ici par la grâce hirsute de Raoul (sublime Christophe Paou, jadis Inconnu du lac pour Guiraudie), père naufragé qui débarque à Marseille à la recherche des traces laissées par Agnès, sa fille morte un an plus tôt. Il se retrouve d’emblée confronté à des décors peu conformes à ce qu’il pensait. « De tous les endroits, y a plus rien qui correspond ! » s’étonne-t-il à moitié à poil après une baignade nocturne près du Vieux Port. De ce trompe-l’œil s’ouvre un monde sensible que Raoul accueille avec la félicité du squatteur.

Le voilà au milieu de jeunes gens modernes, jadis liés par la musique mais dont l’esprit de bande s’est perdu. Raoul entend tout réparer au nom d’Agnès. Sublimes séquences d’un père cherchant l’endroit précis où sa fille a péri pour s’y allonger à son tour. Fotogenico est un film électrique, ultra-sensible mais jamais larmoyant, propre à réenchanter un cinéma français trop bien peigné.

De Marcia Romano et Benoît Sabatier. Avec Christophe Paou, Roxane Mesquida, Angèle Metzger… Durée 1h38. Sortie le 11 décembre 2024