Indiana Jones 4
Paramount Pictures

Le film maudit de la saga revient ce soir sur W9. Et si on lui donnait une seconde chance ?

"Indiana Jones est une trilogie", "Indiana Jones 4 n’existe pas". Depuis 15 ans, les fans de la saga ironisent sur Le Royaume du crâne de cristal. Considéré comme une catastrophe, le 4e volet des aventures du célèbre archéologue est frappé du sceau de l’infamie. Et ce n’est pas qu’une blague de twittos. Il y a quelques années, la BBC avait ainsi rediffusé les Indiana Jones pour Noël, en omettant sciemment l’épisode 4. Même déni lors de la projection organisée en 2017 par les Cinémas Pathé et présentée par Philippe Rouyer, tout simplement intitulée "Il était une fois… La trilogie Indiana Jones". Dur pour le plus gros succès de la franchise, qui a rapporté près de 800 millions de dollars dans le monde. Alors, Steven Spielberg et George Lucas ont-ils violé Indiana Jones comme dans le fameux épisode de South Park ?


 

Qu’on le veuille ou non, Indiana Jones 4 existe bel et bien. Et il est même plus vivant que jamais depuis la sortie du 5e film, Indiana Jones et le Cadran de la destinée, qui n’efface absolument pas les évènements du Crâne de Cristal (on ne vous en dit pas plus pour ne pas vous spoiler). Face à ce moment propice pour revisionner la saga, ou la faire découvrir à ses enfants, il est tentant de zapper le 4. Mais non, le rejeton maudit fait bien partie de la famille. Et il n’a pas été honteusement oublié par Disney Plus, qui a récupéré les films il y a quelques semaines. Ni par W9, qui le rediffuse ce soir pour boucler son cycle. 

Revoir Indiana Jones 4 en 2023 ravive des souvenirs douloureux. La scène du frigo, pour laquelle Spielberg avait endossé toute la responsabilité ("c’est ma faute, pas celle de George. Maintenant les gens ne disent plus jump the shark mais nuke the fridge, et j’en suis fier"). L’accent russe de Cate Blanchett, encore pire en VF. Et des CGI parfois dignes de La Momie (les fourmis géantes qui dévorent Igor Jijikine et bien sûr l’atroce et inutile plan sur l’alien à la fin du film). Mais, avec le recul et la mise en perspective du Cadran de la destinée, on ne peut s’empêcher de lui trouver des points positifs.


 

Indiana Jones avait 64 ans sur le tournage d’Indiana Jones 4. Dans une scène prémonitoire, Shia LaBeouf se moque du héros vieillissant en lui lâchant qu’il doit en avoir 80, soit l’âge qu’a Harrison Ford aujourd’hui pour la sortie du 5. En réalité, il pétait encore le feu à l’époque. En pleine forme, l’acteur s’était entrainé trois heures par jour pour le film, et assurait lui-même une bonne partie des cascades. Et ses célèbres bourre-pif y ont la même vigueur que dans les trois premiers Indy. 

Shia LaBeouf, reparlons-en. Il est absolument parfait en fils caché d’Henry Jones Jr., avec son look calqué sur le Marlon Brando de L'Équipée sauvage. Le retour du personnage de Marion (Karen Allen) est aussi une réussite, tout comme la prestation de John Hurt, génial en vieux fou perdu au fin fond de l’Amérique latine. Et puis il y a Spielberg, sa maestria et son sens du plan iconique. La scène de course poursuite dans un campus universitaire où se déroule une manifestation anti-communiste est un modèle du genre, et une des meilleures de la saga. Autre bon point vu d’aujourd’hui : Indiana Jones et le Crâne de Cristal tourne le dos à la misogynie du Temple maudit et de La dernière croisade, renouant avec L’Arche Perdue où Marion (déjà elle) incarnait un personnage féminin fort et indépendant. 

Indiana Jones 4
Paramount Pictures

Si les acteurs et la mise en scène sont au rendez-vous, il est en revanche plus compliqué de réhabiliter le scénario. Spielberg et Ford étaient très sceptiques face à l’idée de George Lucas d’incorporer des extra-terrestres dans Indiana Jones. Elle n’était pas mauvaise en soi, ni trop saugrenue pour une saga où on a déjà croisé des anges de la mort, un prêtre maléfique spécialiste en ablation du coeur ou un Chevalier de la table ronde vieux de mille ans. Mais elle était sacrément casse-gueule, et le Crâne de Cristal s’est clairement pris les pieds dans le tapis. 

On n’ira pas non plus jusqu’à dire, comme Quentin Tarantino, que le Crâne de Cristal est meilleur que La Dernière Croisade ("ce film est ennuyeux à mourir, on dirait Arrête ou ma mère va tirer"). Il reste clairement le mouton noir de la saga. Mais il ne mérite pas l’opprobre qu’il subit depuis tant d’années. Et sa scène finale, où Indy et Marion se marient, offrait une conclusion heureuse et honnête, à défaut d’être glorieuse, pour notre aventurier adoré. 

Notre critique d'Indiana Jones 5, le très surprenant épisode final de la franchise