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L'exposition Tim Burton à la cinémathèque rappelle l'importance du dessin chez ce cinéaste atypiqueAprès New York, Melbourne  Toronto, Los Angeles, l’exposition de dessins de Tim Burton  a élu domicile à la cinémathèque française. On peut y voir une série de croquis conceptuels, études et dessins préparatoires réalisés par Burton sur une période qui s’étend de son adolescence jusqu’à ses films récents. Ces images révèlent plusieurs choses. D’abord, Burton n’est pas un dessinateur classique. Comme il l’a déclaré souvent, c’est un prof de dessin qui lui a ouvert une porte en l’encourageant à s’expriment sans se soucier de technique. Ainsi affranchi  des contraintes figuratives ou normatives, il a pu donner vie à un univers très personnel en partant d’un faisceau d’influences assez cohérentes (Edgar Poe, Halloween, l’expressionisme, les giallo, les films Hammer...).On a pris l’habitude d’associer cet univers à ses réalisations pour le cinéma, qui sont la somme d’un ensemble de compétences (narratives, picturales, chorégraphiques,…) et dont on ne peut pas ignorer les contributions extérieures, les plus évidentes étant la musique de Danny Elfman, ou le jeu de Johnny Depp. L’exposition de dessins rappelle l’importance primordiale du graphisme dans la conception burtonienne. Le créateur d’Edward aux mains d’argent a toujours dessiné pour ses films, mais d’une façon très personnelle, qui rappelle ce que faisaient Kurosawa ou Fellini. Il y avait chez eux la même liberté par rapport aux contraintes purement fonctionnelles. C’est probablement ce qui rend leurs films uniques. Cette façon personnelle de procéder est particulièrement intéressante chez Burton, parce qu’en lui assurant une identité forte, elle lui a ouvert les portes des plus grands studios tout en le préservant des standards industriels.Récemment, un spécialiste des images de synthèse a surpris son monde alors qu’on lui demandait quel conseil il donnerait à un jeune : il recommandait de prendre un papier et un crayon. Ces outils primitifs sont le plus court chemin entre la pensée de l’auteur et leur concrétisation. A l’heure de la dématérialisation générale, c’est un sage conseil. Tim Burton l’applique à sa façon dans une industrie submergée d’outils informatiques. Ca ne veut pas dire qu’il les refuse. Au contraire, il sait s’en servir mieux que beaucoup : c’est grâce aux ordinateurs qu’il a pu mettre en oeuvre  une version moderne de l’animation image par image, abandonnée depuis longtemps parce que trop complexe. Par contre, il déteste les storyboards qui servent essentiellement à préparer des scènes d’action, dont on sait qu’elles ne sont pas une priorité chez lui (il n’y en a pratiquement pas dans Batman). Burton est un artisan qui travaille à la main (au moins pour les travaux de conception, les plus importants), et tant qu’il continuera, il restera en phase avec lui-même.