Chaque jour, retour sur les temps forts de l’édition 2022 du festival du film romantique.
L’hommage du jour : Christophe
Christophe est parti un triste jour d’avril 2020, victime de cette saloperie de COVID. Ses disques, ses chansons survivent évidemment à ce génie passé du yéyé à l’électro, d’Aline au Tourne-cœur sans de départir de sa classe folle et de sa belle bizarrerie. Mais comment se faire à cette idée que plus jamais on ne le verra sur scène dans ses concerts d’une beauté si singulière que chacun semblait un prototype éphémère qui n’était jamais le même que la veille et le lendemain ? Dominique Gonzalez-Foerster et Ange Leccia (plasticiens et vidéastes auxquels il avait appel lors de son retour aux concerts en 2002 après des années d’absence) parviennent le temps de 80 minutes magiques à combler fugacement ce vide avec leur documentaire Christophe… définitivement. On y voit et entend le chanteur sur scène, dans les coulisses, au milieu de son appartement parisien façon caverne d’Ali Baba. Un film comme un puzzle, comme un collage visuel et sonore pour raconter au plus près et au plus juste l’artiste qu’était Christophe, expérimentateur sans relâche, tordant ses chansons comme un sculpteur malaxant la glaise pour tendre vers le sublime.
Le duo du jour : Alex Lutz et Golshifteh Farahani
Pour son premier long métrage de réalisateur, Une comédie romantique, Thibault Segouin (co-scénariste de Guy) met en scène un quadra qui a toujours fui ses rêves (gagner sa vie comme chanteur) comme ses responsabilités par peur sans doute d’échouer. Et qui, après avoir disparu du jour au lendemain sans explication trois ans plus tôt, retrouve son ex et se découvre papa d’une petite fille… de 3 ans. Tant dans le ton que dans la belle lumière de Marie Demaison (la première assistante opératrice de Perdrix), le film fuit toute facilité mièvre et se joue avec malice des codes de la comédie romantique. Mais la légèreté profonde qui domine ce récit s’appuie aussi sur son duo de comédiens. Alex Lutz et Golshifteh Farahani n’avaient jamais travaillé ensemble et cette première fait des étincelles. Dans les cris, les éclats de rire comme dans les larmes. Les ruptures de ton font partie de leur ADN et donnent au récit le charme fou de l’inattendu.
Le retour en forme du jour : Hong Sang-soo
Hong Sang-soo est si prolifique – 15 longs métrages en 10 ans, qui dit mieux ? – et fait tellement partie du paysage qu’on finit par ne plus faire vraiment attention à ses films d’autant plus qu’ils s’appuient sur des éléments si immuables (durée hyper courte, large place consacrée aux ellipses comme aux discussions sans fin accompagnées de dégustation sans modération de breuvages fortement alcoolisés) qu’un chasse l’autre sans faire grand bruit. Mais quelque chose avec cette Romancière, Grand Prix du Jury à la dernière Berlinale, vient bousculer ce ronron et pas uniquement parce que le café remplace le traditionnel saké lors des échanges entre ses personnages (une romancière à succès, une de ses amies libraires perdue de vue depuis des années, un réalisateur, une star de cinéma…). La Romancière se vit en effet comme un dézingage en règle de l’hypocrisie qui règne à ses yeux en maître dans les milieux artistiques, entre compliments qui sonnent faux, rivalités à fleurets mouchetés, superficialité à tous les étages. Cette violence sourde qui éclate à intervalles réguliers lors de face à face tranchants raconte cette foire aux vanités dans un geste délicieusement impitoyable
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