Première
Importantissime. Les mots manquent. Crucial, vital, ultra pertinent… Que dire d’autre ? D’abord expliquer l’histoire qui se déroule sous nos yeux : celle de l’Iranienne Reyhaneh Jabbari qui, en 2007, âgée de 19 ans, entaille et tue l’homme sur le point de la violer. Double problème, il est puissant. Elle, non. Reyhaneh est accusée du meurtre, jetée en prison, condamnée à mort après un procès malhonnête. Pendue en 2014. Entre-temps, elle est devenue, à l’instar de Mahsa Amini aujourd’hui, une figure de la lutte pour les droits des femmes en Iran.
Et puis ? Regarder la mère qui témoigne. Raconte plutôt. Raconte sa fille face caméra, du coin de son appartement. Explique comment elle s’est débattue pour faire éclater la vérité. Sans pathos. Sœur, père, amis prennent ensuite la parole. Via des entretiens posés, des images banales du camescope parental, des vidéos et des sons enregistrés clandestinement en Iran – fait passible d’au moins cinq ans de prison. Surgit enfin, par moments, la voix-off de Reyhaneh à la manière du Dernier jour du condamné de Victor Hugo.
Ce documentaire de l’Allemande Steffi Niederzoll fait écho au récent She Said, fiction américaine qui filmait la chute de l’ogre Harvey Weinstein, tant la superposition d’images et de témoignages, de mots et de souvenirs poussent au vertige. Tant, en face, la réaction des femmes est sororale et l’injustice frontale. Dégueulasse. Sept hivers à Téhéran, auréolé de deux prix à la dernière Berlinale, est une secousse. Émotionnelle et politique.
Estelle Aubin