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Genre à part entière, le film de frontière est surtout l’apanage des cinéastes américains qui en font, pour la plupart, leur cheval de bataille progressiste en portant un regard empathique, sinon moralisateur, sur le sujet. Pour son premier film, Fernanda Valadez propose le point de vue mexicain, et c’est forcément original : il ne s’agit plus de montrer l’oppresseur mais l’oppressé. Contrairement à ses homologues américains, Valadez ne s’attarde d’ailleurs quasiment pas sur le camp d’en face qui reste un hors champ fantasmatique. Elle se concentre plutôt sur les candidats à l’immigration et, plus spécialement encore, sur leurs proches qui vivent avec angoisse leur départ. Sans signe particulier suit ainsi la quête de Magdalena, une mère sans nouvelles de son fils depuis deux mois. En route vers la frontière, elle apprend que le bus qui le transportait a été attaqué par des pillards. Elle ne se résout pas pour autant au pire et rencontre un jeune homme qui fait le chemin inverse pour revoir les siens. Mélangeant l’exactitude documentaire répugnante (les sacs de cadavres, les charniers, l’impossibilité pour les familles d’identifier formellement les corps) et une forme d’errance surréaliste, Sans signe particulier emmène ses personnages et le spectateur aux confins de l’entendement. Que reste-t-il de notre humanité quand la barbarie est à nos portes, prête à nous engloutir ? Fernanda Valadez y répond magnifiquement par le dénouement le plus terrassant de l’année.