Première
par Sylvestre Picard
Film de commande produit par la BBC l’an dernier à l’occasion du centenaire de l’armistice, Pour les soldats tombés a l’air d’un documentaire tout ce qu’il y a de plus normal. Des centaines de témoignages de soldats anglais sont lus par des acteurs âgés sur fond d’images d’archives souvent inédites et poignantes, mais colorisées et sonorisées pour les rendre plus « vraies ». Le procédé employé par Peter Jackson (et par tant d’autres sociétés de documentaires) pourrait donner matière à débat : ici, ce n’est pas le propos. Avec l’aide de ses techniciens du studio de postproduction Weta (qui sont en ce moment au boulot pour restaurer de la même façon cinquante-cinq heures de film, inédites, sur le making of de l’enregistrement du Let it be des Beatles en 1969), Jackson s’approprie son matériau pour en faire un film de fiction, son film sur la Première Guerre mondiale. Il fait du cinéma, aussi vrai que son faux documentaire, Forgotten Silver, consacré à un pionnier imaginaire du cinoche néo-zélandais. C’est donc un récit, forcément orienté, mais littéralement bouleversant, qui rend hommage à l’expérience de ces fantassins plongés dans l’enfer de la Grande Guerre. Le mélange des affiches de propagande (permettant un clin d’oeil savant à King Kong) et des images retravaillées donnent un aspect inédit à 14-18. Le ciel n’a jamais été si bleu, l’herbe si verte, le sang si rouge.