Toutes les critiques de Les prières de Delphine

Les critiques de Première

  1. Première

    Avec Mambar Pierrette (l’histoire d’une couturière de Douala qui se fait voler sa machine) et Les Prières de Delphine (un documentaire suivant l’arrivée en Belgique d’une jeune Camerounaise en quête d’un avenir), Rosine Mbakam, découverte à la Quinzaine des cinéastes l’an passé, s’impose immédiatement comme une voix puissante du cinéma contemporain. D’abord, pour la qualité avec laquelle elle parvient à mêler documentaire et fiction, la matière originaire du réel étant transcendée par l’originalité de ses dispositifs cinématographiques. Mambar Pierrette et Les Prières de Delphine ont ainsi en commun de ne jamais se retrouver esclaves leur sujet et d’éviter ainsi deux écueils : le misérabilisme et une impression de déjà vu. Mais si le travail de Mbakam est à ce point singulier, on le doit aussi à la crudité du regard qu’elle porte sur ses personnages, sur ces deux femmes, qui ont en commun d’être camerounaises certes, mais surtout d’être dominées voire parfois écrasées par des structures sociales. En ce sens, Les Prières… est peut-être le plus réussi : Delphine et la réalisatrice se sont rencontrées en Belgique, mais n’ont rien en commun sinon leur origine. Partant de leurs différences (Rosine Mbakam est venue en Europe pour étudier, Delphine dans l’espoir d’y avoir une vie meilleure), la mise à nue de Delphine à travers le récit de son existence en devient aussi politique que bouleversante. Et par ce dispositif naît alors sous nos yeux une amitié empreinte de sororité.

    Nicolas Moreno