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Les deux réalisateurs allemands de ce documentaire ont eu la bonne idée de confier une mini-caméra DV à un migrant, confiné à la frontière maroco-espagnole, qui filme le quotidien du camp où il séjourne avec d’autres clandestins en puissance. En attendant un hypothétique passage en Europe, Abou (c’est son prénom) capte sur le vif des scènes mi-cocasses mi-tragiques qui traduise l’absurdité de leur attente beckettienne. Le montage est au diapason : au sacrifice écoeurant d’un coq (pour obéir aux impératifs d’un rituel) succèdent les premiers pas joyeux d’un ânon dans les travées, jonchées de détritus, du camp. Tout n’est pas aussi subtil. Le mélange des images d’Abou, de celles des réalisateurs et des caméras thermiques (qui surveillent la frontière) procurent moins de sidération que de confusion. Quant à la voix off d’Abou, elle manque de naturel. En l’état, Les Sauteurs s’avère néanmoins un témoignage précieux sur une réalité largement ignorée.