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Quiconque n'a pas vu les films précédents de Kim Kiduk devrait être sensible à cette variation poético-symbolique sur le destin. Mais les habitués risquent la lassitude : la plupart des procédés habituels du provocateur coréen tombent à plat, d'autant que la conclusion est singulièrement faible.
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Cinéaste stakhanoviste, Kim Ki-duk l'abonné des festivals termine l'année laborieusement. Nouvelle fable poétique sur le désir, L'Arc bande bien peu et s'effondre dans une mièvrerie où symbolisme et métaphore se succèdent au prix d'une lourdeur impossible.
Il n'est pas dans l'habitude de Kim Ki-duk de faire dans la finesse. Depuis L'Ile, son premier film distribué en France, on a saisi son penchant pour la métaphore psychanalytique bourrée, et son goût pour les paraboles folkloriques en kit. Alors qu'il est connu en Corée pour être haï par les féministes, on a vite décelé chez lui - et de film en film cela ne s'est pas démenti -, une vision de la femme limitée à des traits grossiers, vague objet de désir pulsionnel autour duquel l'homme tourne obsédé et primitif. Avec L'Arc pas de problème, KKD reste sur ses valeurs sûres : un conte poético-psychanalytique teinté de culture locale et de world musique aux sonorités ethniques saoulantes.Comme L'Ile, dont il partage le même fétichisme maritimo-sexuel creux (de l'hameçon à la canne à pêche, filiation ), L'Arc tente laborieusement d'être une parabole sur la femme (et l'homme aussi), le désir, la sexualité et ses ambiguïtés. Le récit tient en quelques lignes : un vieil homme et une jeune fille dont il s'occupe depuis dix ans vivent sur un bateau isolé du monde. Lui ramène des pêcheurs sur son embarcation, ne vit que dans l'attente des 17 ans de la jeune fille pour se marier et lui faire perdre sa virginité. Elle est insouciante, encore adolescente, belle ; elle attire les pêcheurs malgré elle, lui la protège toujours en dégainant son arc, ensemble ils sont capables de lire l'avenir grâce à un petit rituel (version bouddhiste light) à la Guillaume Tell.Pour son douzième film (comme l'annonce pompeusement un carton en pré-générique de fin), KKD ne nous épargne rien. Personnages silencieux ou chuchotants (ça fait auteur), scènes poétiques autoproclamées et kitsch (genre jouer de l'arc au clair de lune, très drôle), métaphores lourdingues sur le désir et ses ambivalences, ésotérisme de pacotille niais, tout y est. Entre la fille captive et farouche aux fonctions quasi-réduites à sa seule dimension sexuelle, le vieil homme possessif, obsessionnel, figure paternaliste semi-incestueuse qui la séquestre par pulsion, mais aussi par amour (évidemment), et l'arrivée du prince charmant jeune et beau (seul moment émouvant du film), L'Arc n'est vraiment pas possible. Mièvrerie, bêtise, emphase, symbolisme énorme, se succèdent en prenant des airs si solennels qu'on finit par être pris de rires gênés.L'arc et la flèche comme métaphore sexuelle, c'était plus déjà grossier qu'osé. Et culminer dans une scène où ladite flèche termine comme symbole déflorant la virginité de la jeune fille, c'est plus que la scène de trop, c'est navrant. S'il y avait de quoi apprécier cette vision âpre et presque sauvage des relations homme/femme que KKD tente de tisser de film en film (plutôt réussie en partie dans Adresse inconnue, son meilleur film), le cinéaste se plante lamentablement dès qu'il tente de donner une dimension poétique à son oeuvre. Davantage terrien que spirituel, son esthétique fade s'effondre dès qu'elle tâte du symbolisme. Trop long pour si peu, L'Arc aurait à peine tenu un court métrage. KKD rêve peut-être de devenir le nouveau Im Kwon-taek, il en est loin. Reste l'actrice, Seo Min-jeong (déjà vue dans Samaria), à elle on adhère complètement.L'Arc
Un film de Kim Ki-duk
Corée du Sud, 2004
Durée : 1h28
Avec Seo Min-jeong, Jeong Seong-hwai, Seo Ji-seok
Sortie salles France : 14 décembre 2005[Illustrations : L'Arc. Photos © TFM Distribution]
Sur Flu :
- Lire la chronique de Adresse inconnue (Kim Ki-duk, 2001)
- Lire la chronique de L'Ile (Kim ki-duk, 2000)
- Lire le portrait de Kim Ki-duk
- Lire le dossier "Matin calme, cinéma brut", publié à l'occasion de la rétrospective "50 ans de cinéma coréen" à la Cinémathèque française (février 2005)Sur le web :
- Le site du film
- Consultez salles et séances sur le site Allocine.fr