Toutes les critiques de Gothika

Les critiques de la Presse

  1. Fluctuat

    Mathieu Kassovitz est un personnage sympathique. L'oeil séducteur, grande gueule, il donne l'impression de n'avoir besoin ni des médias, ni des spectateurs. Toujours dans le juste, le novateur, le dérangeant, ce cancre fils de bobos monte au créneau pour défendre sa vision du monde - quitte à paraître souvent juvénile et manichéen. Difficile dès lors de ne pas aimer un film de ce gentil rebelle… Heureusement Gothika est là pour nous prouver le contraire.
    De Métisse à Assassin(s) en passant par La Haine, de Amen aux films de Jacques Audiard, l'enfant prodige du cinéma français fait fi des protocoles et s'est souvent engagé à défendre rôles et idées. Les Rivières Pourpres déjà l'éloignait de ce chemin. On pouvait excuser cet écart en déclarant qu'il s'essayait à un film de genre et que bientôt, on allait voir ce qu'on allait voir… Là de même, on pourrait pousser notre admiration du côté de chez Sam. Notre frenchie indépendant - et qui emmerde le système ! - est invité à Hollywood pour réaliser un film de commande pour un des producteurs les plus influents du moment. Au passage il se fait offrir un gros budget et une actrice oscarisée. Cela force au respect ! Malheureusement là où on attendait que le génie novateur fasse des siennes pour notre plus grand bonheur, Gothika n'est finalement qu'une bonne série B…Tout commence dans un établissement de haute surveillance pour femmes gravement atteintes de troubles de la personnalité. Miranda, en brillante psychiatre, tente de comprendre l'attitude de ses malades. Chloé, notamment, lors de graves crises se déclare possédée… Un jour de pluie et de glissement de terrain, notre doctoresse doit changer de chemin pour rentrer chez elle auprès de son mari… Tous les amateurs de films d'épouvante et autres lecteurs du Petit Chaperon Rouge savent déjà ce qu'il lui en coûtera. Là réside un des problèmes de ce film qui se croit malin de jouer à faire tonner les éclairs ou à planquer l'assassin dans le couloir pour nous faire trembler. Trop nombreuses sont les scènes usant de tous les clichés du cinéma d'horreur.Cousue de bonne pensée hollywoodienne - voire d'intégrisme yankee - l'intrigue perd très vite de son attrait à mesure que les règles de ce fantastique se dévoilent. Au coeur de cette histoire d'esprits, on frémit parce qu'on ignore une partie de l'univers du film. Banale raison pour avoir peur. A mesure qu'on est dans la confidence notre intérêt s'étiole. Une fois l'intrigue plantée de force, et conduite à grands renforts d'embardées, l'histoire peine à finir au point de tomber dans le comique. Geste sans doute voulu mais déplacé. Pourquoi se moquer ainsi du spectateur qui ne souhaite qu'une chose : être pris par l'histoire ? Multipliant les conclusions, Kassovitz finit par épuiser le plus bienveillant de ses spectateurs.A voir l'équipe technique et artistique du film, on s'étonne d'un tel conservatisme tant dans le fond que dans la forme. Directeur de la photo, Matthew Libatique a par exemple travaillé sur Requiem for a Dream, Yannick Kergoat a signé le montage de Harry, un ami qui vous veut du bien, quant à John Ottman, il composa la musique d'Usual Suspects… autant de films à "petit" budget qui marquèrent leur temps par leur originalité, leur indépendance et leur engagement. Or rien ne manque plus ici. Dommage !Gothika
    Réalisateur : Mathieu Kassovitz
    Avec Halle Berry (Miranda Grey) - Penélope Cruz (Chloé Sava) - Robert Downey Jr. (Pete Graham)
    Etats-Unis - 2003 - 90 mn
    Sortie officielle le 7 janvier 2003[illustrations : © Columbia TriStar Films]
    - Lire la chronique de Les Rivières Pourpres (2000).
    - Le site officiel du film : gothika-lefilm.com