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L’ouverture d’En corps ne manque ni d’audace, ni de panache. Dix minutes d’une représentation d’un ballet, La Bayadère, sans qu’on devine de quoi va parler le film. Un parti pris par lequel Cédric Klapisch place le spectateur en position active, l’entraîne dans ce qui l’a conduit à imaginer et tourner ce film. Sa passion pour la danse qui s’était déjà exprimée à travers divers documentaires et captations mais jamais par la fiction. Le récit tient ici volontairement en une phrase : après une grave blessure, une danseuse classique de 26 ans, tente de se réparer alors qu’on lui annonce sa carrière terminée. En corps n’a rien d’un suspense sur sa capacité à exercer ou non de nouveau son art. Ce qui intéresse Klapisch c’est le processus de reconstruction, les passerelles entre deux mondes – la danse contemporaine et moderne – que tant jurent irréconciliables. Il ne traite jamais cet art par le prisme de la compétition exacerbée (à l’image d’un Black swan) mais par la manière dont il envisage la pratique de cet art : une passion plutôt qu’un sacerdoce. Son œil connaisseur et la caméra à l’affût d’Alexis Kavyrchine (Adieu les cons) donnent naissance à une oeuvre enveloppante mais jamais mièvre et parsemée subtilement de moments de comédie comme Klapisch sait si bien les trousser, avec l’aide de seconds rôles inspirés (Pio Marmaï, François Civil, Denis Podalydès, Muriel Robin, Souheila Yacoub …). Mais cet édifice s’effondrerait comme un château de carte sans la prestation lumineuse dans le rôle central de Marion Barbeau, une danseuse étoile qui fait ses débuts d’actrice. Un coup d’essai façon coup de maître.