Joe Penna confirme une bonne partie des espoirs placés en lui avec Arctic dans ce nouveau survival situé cette fois-ci dans l’espace
On a découvert Joe Penna en 2018 avec Arctic, son premier long métrage qui avait décroché une sélection hors compétition à Cannes où Madds Mikkelsen livrait une de ces performances intenses, dépouillés et intériorisés dont il a le secret dans la peau d’un personnage tentant de survivre dans le désert glacial arctique. Trois ans plus tard, le revoici sur Netflix avec un nouveau survival en terrain hostile, en l’occurrence l’espace. On y suit la mission d’un vaisseau spatial envoyé vers Mars dans le but de coloniser à terme cette planète. A bord, on retrouve la commandante Marina Barnett (Toni Collette) accompagnée par deux scientifiques, la docteure Zoe Levanson (Anna Kendrick) et le biologiste David Kim (Daniel Dae Kim). Après un décollage agité, tout semble rentrer dans l’ordre et l’équipage trouver sa vitesse de croisière jusqu’à ce qu’ils découvrent un passager clandestin (Shamier Anderson), dont la présence à bord se révèle à la fois accidentelle et source de péril mortel : l’oxygène étant forcément appeler à rapidement manquer
Penna installe sans temps mort les bases de son suspense en apesanteur qu’il va développer avec une épure dont il ne se départira jamais. Le Brésilien est décidément un cinéaste d’atmosphère et avec l’aide à la photo de Klemens Becker (qui a fait ses gammes comme opérateur caméra chez Paul Greengrass) et à la musique – omniprésente tout au long du récit – d’Hauschka (Lion), il crée à l’écran une ambiance aussi enveloppante qu’angoissante, sans que jamais l’extérieur n’interfère puisque les seuls échanges avec la Terre passent par le prisme du casque de la commandante. Certes, il ne renouvelle pas le genre en termes de récit qui obéit à un canevas on ne peut plus classique qu’il ne semble d’ailleurs jamais tenter de faire imploser comme le montre son parti pris de ne jamais chercher à créer la moindre ambigüité ou à émettre des doutes sur le pourquoi de la réelle présence à bord du clandestin. Ce qui intéresse Penna n’est pas tant de savoir lequel des quatre va devoir se sacrifier pour permettre aux trois autres de survivre mais ce que cette situation implique. Comme une métaphore des questions d’immigration qui font aux yeux de certains de l’étranger la menace ou de la thématique du déterminisme social puisque, spontanément, la commandante et le biologiste voient en l’intrus, ce technicien qui ne fait pas partie de « leur monde », celui qui doit être sacrifié dans ce vaisseau, chasse gardée des élites.
Dommage que Penna n’évite pas sur ces terrains–là un certain didactisme et un manichéisme paresseux dans l’écriture de ses personnages. Mais sa réalisation inventive (superbes scènes très graphiques hors du vaisseau), le refus de la moindre concession à l’épate, l’aspect ouvertement anti- hollywoodien de cette balade au cœur d’un genre hollywoodien en diable intriguent, séduisent et finissent par emporter le morceau, en dépit de ses nombreuses imperfections. Sans compter la part belle donnée à l’épatante Anna Kendrick, véritable moteur du quatuor de comédiens. Penna franchit donc non sans superbe la marche toujours délicate du deuxième film.
De Joe Penna. Avec Toni Collette, Anna Kendrick, Daniel Dae Kim… Durée : 1h56. Disponible à partir du 22 avril.
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